Photo : M. Hacène Par Wafia Sifouane Après deux semaines de représentations, le Festival national du théâtre professionnel (FNTP) d'Alger, qui en est à sa 6e édition, a pris fin mardi soir dernier en surprenant le public – comme il ne l'a pas fait avec les pièces programmées en compétition – avec un palmarès inattendu. D'ailleurs, en raison de la qualité des treize pièces ayant concouru cette année et dont la majorité se sont distinguées par leur médiocrité, le grand prix du 6e FNTP a été retiré. Le jury a refusé de le décerner et s'est contenté simplement d'attribuer son prix spécial à la comédie musicale du Théâtre régional de Béjaïa Au-Delà la mer mise en scène par le musicien Bazou. Le Théâtre régional de Constantine, qui a participé cette année avec la pièce Laylat elayali de Mohamed Teyb Dehimi, a raflé pour sa part trois distinctions : le prix de la meilleure interprétation féminine remis à Mouni Boualem, le prix du meilleur espoir masculin remis à Mohamed Deloum et le prix de la meilleure scénographie à Yahia Ben Amar. Le rejoint en seconde position, avec deux distinctions, le Théâtre régional de Batna, qui a concouru avec la pièce l'Etang des loups, un spectacle qui valu au jeune et talentueux Fawzi Ben Brahem le prix de la meilleure mise en scène suivi du prix de la meilleur interprétation masculine décerné à Mohamed Zaoui. Pour sa part, le Théâtre national d'Alger, qui a présenté en compétition la pièce le Rêve d'un père, s'est contenté du prix du meilleur espoir féminin remis à Sabrina Boudaoui.Le jury, présidé par Ahmed Menouar, s'est abstenu de remettre deux autres prix dont le prix de la meilleure musique et le prix du meilleur texte. Cette décision a étonné plus d'un parmi l'assistance en raison de la qualité non discutable des textes de certaines pièces, à leur tête la Nuit d'Alamut écrite par H'mida El Ayachi et présenté par le Théâtre régional de Sidi Bel Abbès. Avec un palmarès peu convaincant, le jury a bouclé la boucle avec un véritable coup de Jarnac en éliminant de la compétition la pièce le Mur de la troupe Derb Al Assil de Laghouat en invoquant sa non-conformité au règlement du FNTP. Les jurés ont justifié leur décision en affirmant que la représentation n'a pas respecté l'article 12 du règlement du festival, qui stipule que la pièce en compétition doit avoir une durée de 50 minutes au moins. Sidérant et complètement illogique, car cette même pièce a obtenu le premier prix lors du Festival national de théâtre professionnel de Sidi Bel Abbès qui l'a qualifié pour la compétition du FNTP. Comment se fait-il que le jury de Sidi Bel Abbès a attribué le premier prix et la sélection à une pièce qui sera disqualifiée ? Manque de communication ou méconnaissance du règlement intérieur ? En tout cas, cette disqualification a été interprétée comme une injustice envers une troupe d'amateurs «professionnels» qui ont présenté un produit de qualité, que des comédiens, auteurs et metteurs en scène ont salué, et auxquels le public aurait certainement accordé son prix. Par ailleurs, le jury de cette édition n'a pas manqué de critiquer la qualité peu acceptable de certaines pièces inscrites en compétition tout en appelant le commissariat du FNTP à se montrer plus sélectif et exigeant. Dans ce sillage, il a proposé la création d'une commission qui s'occupera de la sélection des pièces en compétition et recommandé la réduction de la durée du festival de 14 à 10 jours, cela en vue de privilégier la qualité sur la quantité, ce qui donnera «dix spectacles en dix jours». En outre, le jury a également déploré l'introduction du langage urbain au sein de certaines représentations ainsi que le manque de créativité et d'innovation des metteurs en scène. Véritable fiasco et longuement critiqué par l'ensemble des médias depuis son lancement le 24 mai dernier, le FNTP a bel et bien reflété l'état catastrophique dans lequel baigne le 4e art algérien. Néanmoins, il a donné l'occasion à certains artistes de briller de par leur talent, comme le jeune Fawzi Ben Brahim et la troupe de Laghouat. On saluera également les recommandations du jury qui vont droit au but et expriment la nécessité de mettre de l'ordre dans l'encadrement de cet art, avec l'espoir que cela fera jaillir un véritable potentiel artistique.