Plus de quatre mois après la chute du président Hosni Moubarak, la situation en Egypte reste fragile. De violents affrontements entre police et manifestants au Caire ont fait près de 80 blessés, faisant monter la tension et l'incertitude politique. Les heurts ont opposé, durant la nuit de mardi à hier, des manifestants aux forces anti-émeutes dans le centre du Caire. La place Tahrir, devenue célèbre pour avoir été l'épicentre des rassemblements anti-régime du début de l'année, a été particulièrement secouée de nouveau. Des échauffourées ont eu lieu notamment aux abords du ministère de l'Intérieur. De petits groupes de manifestants ont lancé des pierres sur la police qui a riposté avec des gaz lacrymogènes. Plusieurs rues du centre-ville ont été fermées par la police. Ces heurts sont parmi les plus graves survenus au Caire depuis la chute, le 11 février dernier, de Moubarak. Les incidents ont eu principalement pour acteurs la police, des manifestants proches des mouvements ayant contribué à renverser Moubarak et des partisans de l'ancien Raïs. L'armée, qui dirige désormais le pays, a publié sur le réseau social Facebook un communiqué dénonçant une tentative de «déstabilisation» de l'Egypte. La «Coalition des jeunes de la révolution» a, de son côté, accusé «des éléments loyaux envers l'ancien régime» de faire dans la provocation. Et les «balataguias», ces fameux groupes de voyous au service de la clientèle du régime, auraient repris du service. Les incidents ont débuté lors d'une cérémonie dans un petit théâtre du centre du Caire à la mémoire des victimes du soulèvement contre le régime de Moubarak de janvier et février derniers. Ces affrontements au Caire surviennent alors que l'Egypte vit une transition de tous les possibles. Le climat politique est tendu et marqué par des manifestations récurrentes. L'ancien chef d'Etat est actuellement hospitalisé à Charm El Cheikh, au bord de la mer Rouge, en attendant l'ouverture de son procès prévue le 3 août. Ces affrontements se sont produits quelques heures après l'annonce de la dissolution par la justice des conseils municipaux élus sous Moubarak et massivement dominés par les partisans de l'ancien régime. L'armée, qui dirige désormais directement le pays par l'entremise du conseil suprême des forces armées, est de plus en plus ouvertement critiquée pour la manière dont elle gère la transition. De nombreuses voix s'élèvent pour demander le report des élections législatives prévues en septembre. Le débat est également explosif autour du calendrier de rédaction d'une nouvelle constitution et de la place de la religion dans les institutions. Beaucoup d'Egyptiens craignent que le soulèvement populaire soit dévoyé de ses véritables objectifs. Un appel est lancé à une grande manifestation le 8 juillet. Objectif : sauver les acquis de la révolution. M. B.