Photo : S. Zoheir Par Abdelkrim Ghezali Le doute sur les intentions de réformer le système s'installe au sein de la classe politique en raison du contenu antidémocratique des avant-projets de lois relatifs à l'information, au régime électoral et aux partis. Les moutures de ces avant-projets, qui ont été révélées à l'opinion publique à travers des fuites organisées ou des relations de copinage, sont en totale contradiction avec le discours du président annonçant un train de réformes politiques et institutionnelles. Le projet du code de l'information est pire que la loi en vigueur, même si l'intention d'ouvrir le champ audiovisuel est annoncée. La loi sur les partis fait de ces derniers des structures relevant du ministère de l'Intérieur, alors que le code électoral n'encourage pas la représentativité de toutes les forces politiques existantes. Une série de consultations a eu lieu, pilotée par Bensalah, dans le but justement d'impliquer les partis, les journalistes, le mouvement associatifs et autre catégories socioprofessionnelles dans l'élaboration de ces projets de lois. Manifestement, et au vu des réactions suscitées par le contenu des moutures rendues publiques, les propositions formulées devant la commission Bensalah n'ont pas été prises en compte. En tout état de cause, tel que ces avant-projet de loi ont été élaborés, l'objectif des réformes politiques est détourné, ce qui risque de placer l'Algérie à la traîne des pays de la région où les débats sur le devenir des nations bat son plein et où des révolutions culturelle et mentale sont en train de s'opérer à un rythme effréné. Au-delà d'une diplomatie floue qui dément ce qu'on lui prête comme position sans qu'elle exprime une position claire sur la Libye et, plus précisément, sur le CNT, on a l'impression que l'Algérie redoute les changements qui s'opèrent à ses frontières. Cette impression est renforcée par ces projets de loi restrictifs des libertés et dont le réflexe inspirateur révèle une attitude paternaliste qui considère les Algériens mineurs à vie. Si les motivations des rédacteurs de ces projets visent à rééditer l'expérience de l'ouverture démocratique de 1989, ce serait aller trop vite en besogne que de vouloir lier l'ouverture démocratique au risque islamiste et par ricochet au risque d'une instabilité du pays. Ceux qui ont reconnu un parti qui nie la démocratie avant de décider d'arrêter le processus électoral sont responsables de la tragédie nationale et non la démocratie. Si les décideurs avaient respecté la Constitution de 1989 qui interdit tout parti basé sur la religion, la race, le sexe, la langue et le régionalisme, le FIS aurait été réduit à sa plus simple expression. Si les décideurs avaient adopté un mode électoral à la proportionnelle intégrale nationale, le FIS n'aurait jamais pu dépasser les 20 à 23% des voix. Si les décideurs avaient respecté la légalité et laissé la majorité du FIS légiférer et gouverner, le président de la République avait toutes les prérogatives de dissoudre le parlement en cas de non respect de l'esprit et de la lettre de la Constitution. Donc, la démocratie a été étouffée à dessein sans que le processus démocratique soit porteur de danger pour la stabilité du pays et la cohésion nationale. C'est à ce titre qu'il s'agit de ne pas reproduire les réflexes paternalistes et de tuteur d'un peuple car la société algérienne n'est plus celle des années soixante. C'est à ce titre aussi, que la seule loi qui doit précéder la révision constitutionnelle est la loi électorale qui doit encadrer l'élection de la prochaine APN. L'heure aujourd'hui est à un débat national sur le projet de société, sur la loi cadre de la nation afin de rattraper le retard cumulé et d'engager l'Algérie sur la voie de la démocratie où le peuple est l'unique source de légitimité et d'en finir avec la médiocrité qui règne et qui est responsable des retards de l'Algérie dans tous les domaines.