Photo : M. Hacène Par Salah Benreguia Les récentes statistiques émanant de la plus grande banque en Algérie spécialisée dans l'immobilier, en l'occurrence Cnep-Banque (voir encadré ci-dessous), ne peuvent cacher le mécontentement et la déception des postulants aux crédits à taux bonifié pour l'acquisition d'un logement. Même si le gouvernement multiplie les mesures incitatives et les formules, théoriquement, très encourageantes, la réalité est tout autre. En effet, les professionnels de l'immobilier le disent : la crise de logement persistera malgré les décisions prises ces dernières années. Ces mesures, selon eux, ne peuvent régler, à elles seules, l'une des crises majeures à laquelle font face et le peuple et l'Etat algérien. Les prix des logements sont excessifs, voire inabordables. Ils sont bien supérieurs aux montants des prêts accordés par les banques. Echantillon : le prix d'un F3 d'une superficie ne dépassant pas les 80 m⊃2;, chez un promoteur immobilier aussi bien à Alger que dans les autres grandes villes (Oran, Annaba, Béjaïa, Constantine…) oscille entre 7 et 10 millions de dinars. Le crédit à taux bonifiés pour un simple cadre dont le salaire ne dépasse pas les 45 000 DA est, en fonction de son âge, entre 2 et 2,8 millions de dinars. Même si, également, les pouvoirs publics exhibent le nombre de dossiers traités et éligibles depuis la mise en œuvre de cette mesure, il y a une année (le cas de la Cnep-Banque), au niveau des différentes catégories socioprofessionnelles concernées, le temps n'est pas à l'euphorie. «Il existe un décalage énorme entre les mesures prises par les pouvoirs publics et les exigences du marché», estime un expert. Pour ce dernier, les prêts bancaires sont inaccessibles pour les bourses moyennes, dans la mesure où les prêts à taux d'intérêt bonifié fixé à 1% sont destinés aux revenus allant de 1 à 6 fois le SNMG, et à 3% pour les revenus représentant 7 à 12 fois le SNMG. Outre le fossé qui sépare les montants proposés par les banques et les prix exigés par les promoteurs immobiliers, le salarié moyen est confronté, dès le départ, à un autre problème. Les critères d'éligibilité éliminent de facto un bon nombre de salariés dont le revenu mensuel n'ouvre pas droit à ce nouveau mode de financement. Ce qui, selon les spécialistes, réduit considérablement l'engouement tant attendu de la part des pouvoirs publics. Ces deux éléments ne contribuent guère à la résolution du deuxième plus grand problème social des Algériens. Face à cet état de fait, le gouvernement tente de trouver des solutions pour éradiquer ou du moins apaiser la tension sociale, due souvent au chômage et à la crise de logement. En sus de l'instauration de ce type de crédit, une autre mesure a été prise lors du dernier Conseil des ministres. Il s'agit du dégel du foncier et la bonification des crédits pour les promoteurs immobiliers ainsi que la création de filières immobilières au niveau des banques, à l'image de la Cnep-Immo. Ces mesures «vont permettre un développement plus accru de l'offre», selon l'Association des banques et des établissements financiers (Abef). Mais au niveau des banques, on estime que «ce sont les paramètres du marché qui déterminent réellement la réussite ou non de ce genre de lois». En effet, plusieurs banquiers ont relevé les contraintes d'un tel dispositif. «L'offre des banques est intéressante mais ce sont les autres paramètres du marché qui constituent un frein», explique-t-on. Que faudrait-il faire alors ? Les experts estiment que l'offre du marché immobilier reste toujours insuffisante par rapport aux demandes de plus en plus nombreuses qui affluent au niveau des banques et que seuls les logements neufs, collectifs, contractés auprès d'un promoteur immobilier public ou privé, sont éligibles au soutien de l'Etat. «L'offre n'ayant pas changé depuis 2001, la demande a augmenté d'une manière exponentielle», nous a expliqué un spécialiste. Ce dernier soutient que la solution réside dans l'augmentation de l'offre et pas seulement des formules de crédit. S. B. Crédits hypothécaires : les dernières statistiques de la Cnep La Caisse nationale d'épargne et de prévoyance (Cnep-banque) a octroyé 11 567 crédits hypothécaires aux particuliers durant le premier semestre 2011, en hausse de 64% par rapport au 1er semestre de 2010, pour un montant de plus de 19 milliards de dinars, soit une évolution de 97,5%. Selon les derniers chiffres répercutés par l'APS, ces crédits étaient au nombre de 7 037 pour un montant de 9,62 milliards de dinars durant le premier semestre de 2010. Sur l'ensemble des crédits, 6 588 crédits bonifiés totalisant un montant de plus de 9 milliards de dinars ont été accordés durant les six premiers mois de l'année en cours, soit une hausse de 4539% en nombre et de plus de 4237% en termes de montant. Les crédits bonifiés, lancés en mars 2010, ont ainsi dépassé durant les six premiers mois de 2011 l'ensemble des crédits bonifiés accordés durant les trois derniers trimestres de 2010, estimés à 6 218 crédits d'un montant total de 7,73 milliards de dinars, selon la Cnep-Banque.