Tout le monde a vu et connaît ces étals qu'on voit dressés un peu partout dans nos villes proposant des musiques et des films à profusion, au choix et pour une bouchée de pain. On peut se payer le film qui cartonne au box-office comme on peut y trouver les «â'ras» (Pl. de âar's, fête de mariage) animés par Amar Ezzahi, El Anka ou Guerouabi. On vous proposera même un paquet de films sur DvX ou des compiles sur CD compressé. Et ça ne vous coûtera pas plus cher que le dernier album d'un cheb ou la nouvelle publication d'un jeune auteur, qu'on peut d'ailleurs également trouver en vente sur le marché parallèle.Ces produits culturels ne sont pas uniquement vendus dans la rue sur ces planches dressées sur des tréteaux bricolés ou étalés à même le sol sur des bâches en plastique, des points de vente qui n'ont évidemment pas de registre du commerce ni ne payent aucun impôt, taxe ou loyer. On trouve des DVD et des CD piratés même dans certains magasins. La seule différence entre les supports numériques qu'on trouve dans la rue et ceux exposés dans les rayonnages de ces magasins est dans l'emballage. La pochette est remplacée par un boîtier, avec affiche du film photocopiée, un rien plus esthétique.Certains disquaires vont jusqu'à apposer le timbre fiscal de l'Office national des droits d'auteur et droits voisins (Onda) sur les produits. Ces vignettes ne sont évidemment pas fournies par l'Office, mais achetées sur le marché parallèle qui alimente le commerce informel de la musique et des films. Il faut toutefois préciser que «marché parallèle» et «commerce informel» ne sont que des termes génériques qu'on utilise pour différencier entre les activités ayant une existence administrative et celles qui en sont dépourvues. Car ces dernières, comme celles formelles, se déroulent au su et au vu de tous. Les CD, DVD et DvX sont exposés au regard de tous les passants et tout le monde sait que ces produits sont piratés.Il est vrai que l'Onda fait de temps en temps des contrôles qui se soldent par des saisies relativement importantes de produits piratés. Mais que pèsent quelques dizaines de milliers de CD et DVD saisis dans un marché qui se chiffre en dizaines de millions en pièces et centaines de millions en dinars ?Et que deviennent les droits d'auteur dans tout ça ? En fait, les productions piratées sont «étrangères» pour la majorité, donc non inscrites à l'Onda qui, de ce fait, ne peut défendre les droits de leurs propriétaires. Le piratage a encore de beaux jours devant lui en Algérie, et ce ne sont pas les citoyens qui s'en plaindraient, eux qui en profitent pleinement pour pouvoir écouter des musiques, voir des films ou consulter des ouvrages (les livres ne sont pas à l'abri du piratage) introuvables en Algérie ou excessivement chers. La culture informelle fait tache d'huile et va jusqu'à tutoyer celle formelle qu'elle croise et concurrence même. H. G.