Photo : Riad Par Faouzia Ababsa Alors que le Conseil des ministres, en première lecture, a clairement et expressément énoncé que «le projet de loi n'autorise aucune interférence dans l'organisation interne des partis politiques et se limite à énoncer l'obligation pour les statuts de ces derniers de fixer des règles démocratiques pour régir leur fonctionnement, d'encourager la promotion de l'élément féminin dans leurs instances dirigeantes et de fixer, enfin, des règles pour assurer la transparence dans le financement des partis et pour la lutte contre toute forme de corruption dans la vie politique», voilà que le document transmis samedi dernier à la Chambre basse du Parlement réintroduit les dispositions visant à la mise sous tutelle du département de l'Intérieur les partis politiques. C'est en effet le cas pour la disposition relative à l'obligation faite aux partis politiques de transmettre leur plan d'action au ministère de l'Intérieur, de compter parmi leurs membres dirigeants la gent féminine. Ce que beaucoup de formations politiques considèrent comme une ingérence dans les affaires internes. En effet, un parti réactionnaire ou rétrograde par rapport aux femmes n'est pas tenu de compter dans ses organes dirigeants des femmes. Le projet de loi organique prévoit également que le parti politique doit transmettre son programme d'action lors du dépôt de son dossier d'agrément. Or, dans toute démocratie, le programme ou le plan d'action est du seul ressort du congrès qui en définit les contours. Sur un autre plan, le projet de texte prévoit dans son article 75 le gel des activités d'un parti qui n'aura pas pris part à 4 joutes électorales. Cette disposition dénie le droit au boycott des élections, qui est une prise de position politique du parti, lequel ayant le droit de ne pas prendre part à des élections s'il estime que cela ne va pas dans le sens de ses intérêts. Autre disposition pour le moins surprenante, celle ayant trait à la déchéance du mandat d'un élu lorsque son parti est dissous par voie judiciaire. Ce qui est en contradiction avec le projet de loi électorale. Mais, à la décharge des rédacteurs du projet, personne ne s'imaginait que l'article 67 du projet de loi organique relatif au régime électoral allait être abrogé par la commission juridique de l'APN. À moins que la plénière ne décide de le réintroduire, le deuxième alinéa de l'article 44 du projet de loi organique sur les partis politiques devra être revu. L'article 14, tel que rédigé, réduit en quelque sorte l'expression partisane, en faisant obligation aux partis de concourir et participer «à la vie politique en vulgarisant auprès des institutions publiques de l'Etat, du Parlement et des Assemblées populaires locales», leur projet politique. Cela veut dire qu'en dehors du Parlement, des institutions locales ou nationales, ils ne peuvent porter leur programme devant les citoyens. C'est une sorte d'intégration qui ne dit pas son nom. Le projet de loi comporte des dispositions qui entretiennent l'ambiguïté. L'article 60 dispose que «les dons, legs et libéralités ne peuvent provenir que des personnes physiques identifiées. Ils ne peuvent excéder 33 fois le salaire minimum garanti, par donation et pas an». L'ambiguïté réside dans le fait que la disposition ne dispose pas si le «bienfaiteur» peut faire un don, un legs et une libéralité en même temps une fois par an. Et les trois ne sont pas synonymes. D'autre part, le plafond fixé par la disposition, c'est-à-dire 300 fois le SNMG (soit 540 millions de centimes). Ce qui est énorme et encourage plusieurs fléaux portant atteinte à la moralisation de la vie politique déjà largement entamée. D'abord, le blanchiment d'argent, ensuite la «mafiotisation» des partis. On a déjà vu, et plusieurs partis politiques en ont fait l'aveu notamment lors des dernières élections législatives de 2007, que des hommes d'affaires ont donné de l'argent à certains partis, soit pour figurer en bonne place sur leur liste électorale, soit pour que ledit parti défende leurs intérêts au sein du Parlement à travers des amendements à suggérer à leur avantage. Le cas de la légalisation de l'importation de la friperie dans la Loi de finances complémentaire pour 2011 est édifiant. Cela étant, le projet de loi comporte plusieurs dispositions positives. Beaucoup de contraintes sont levées, des améliorations constatées et des rectifications apportées par rapport à la loi encore en vigueur. C'est le cas du droit des partis de recourir à la justice (Conseil d'Etat), lorsqu'il y a contentieux avec l'administration, ou le silence que pourrait observer le ministère de l'Intérieur sur la décision d'agrément et qui vaudra permission pour le parti d'exercer ses activités.