De notre correspondant à Paris Merzak Meneceur Lundi 31 octobre, 13h35, grande salle des conférences de l'Unesco. Après le vote nominal et son décompte, pour savoir si la Palestine est acceptée ou pas comme membre de plein droit de l'institution, arrive le moment du verdict. Face à une salle en attente, Mme Katalin Nogyay, présidente de la 36e session de la Conférence générale, prend la parole pour annoncer le résultat : «Nombre de pays ayant le droit de vote, 185. Nombre de pays présents au vote, 173. Abstentions, 52. Je vous rappelle que la majorité des deux tiers requise est de 81. Majorité acquise, 107. Contre 14. Mesdames et Messieurs, la Conférence générale a donc voté en faveur du projet de résolution et a décidé d'admettre la Palestine à l'Unesco. Permettez- moi de féliciter la Palestine pour son admission.» Un grand instant d'émotion envahit l'assistance qui se lève et applaudit à tout rompre pour saluer ce moment historique. Un grand moment historique qui voit, pour la première fois, une organisation des Nations unies accueillir la Palestine bafouée de tous ses droits depuis 60 ans.La Palestine a osé. La Palestine a gagné en dépit d'un forcing effréné des Etats-Unis et d'Israël pour dissuader de nombreux pays à voter le projet de résolution présenté par le Conseil exécutif de l'Unesco. Ceux qui ont été relativement sensibles aux arguments des adversaires de l'admission, plus sûrement par crainte de représailles financières, ont préféré se réfugier dans l'abstention. Sinon, comment comprendre une telle position prise par plusieurs pays africains comme le Burundi, le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire ou le Liberia ? Parmi les pays qui ont voté contre, il y a inévitablement les Etats-Unis, Israël, l'Allemagne et le Canada. Mais comment comprendre le choix des Pays-Bas et de la Lituanie. Cependant, avec quatorze voix, l'isolement des anti-Palestine à l'Unesco est manifeste, un score squelettique pour empêcher la Palestine de devenir le 195e membre de l'Unesco. Leur argument principal, pas d'admission avant que l'ONU et son Conseil de sécurité ne tranchent, pas avant un accord de paix israélo-palestinien, a été battu en brèche. Ils ont reçu une véritable claque qui démontre combien la cause palestinienne a gagné des partisans sur la scène internationale. Et que dire de l'Union européenne, qui, devant une telle circonstance, n'avait d'Union que le nom. Outre les pays cités ci-dessus qui ont voté contre, certains ont choisi l'abstention comme la Bulgarie, le Portugal et l'Italie. Et d'autres ont pris partie en faveur de la Palestine comme l'Espagne, l'Autriche, l'Irlande, la Belgique… et la France qui fut la grande surprise, car au Conseil exécutif elle avait eu la préférence de l'abstention. «Oui, la Palestine a le droit de devenir membre de l'Unesco», a déclaré sans ambages le chef de la délégation française. Les grandes nations comme la Chine, la Russie, le Brésil et l'Inde ont voté en faveur de la Palestine comme la grande majorité des Etats d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Les pays arabes et musulmans ont été unanimes, considérant la victoire de la Palestine comme étant la leur. L'Algérie, naturellement, n'a pas fait défaut. Lors des explications du vote qui a suivi le résultat, l'ambassadeur, délégué permanent de l'Algérie à l'Unesco, Missoum Sbih, a fait une courte et limpide déclaration : «L'Algérie salue la décision historique de la 36e session de la Conférence générale, qui consacre, enfin, l'admission de la Palestine en tant que membre à part entière au sein de l'Unesco». «Cette importante décision, a-t-il ajouté, votée par une majorité significative, constitue un acte de paix conforme aux idéaux et objectifs de l'Unesco et représente une avancée majeure dans la reconnaissance attendue en tant qu'Etat membre de l'Organisation des Nations unies.»Le ministre des Affaires étrangères de la Palestine, Ryad Al Malki, a pris la parole avant le vote et à la clôture des explications de vote, pour, d'abord, bien argumenter les raisons de la demande d'admission de son Etat, pour, ensuite, remercier la Conférence pour sa décision, et enfin, assurer de l'engagement de la Palestine à assumer toutes ses responsabilités au sein de l'institution mondiale de la Culture, de l'Education et des Sciences. Par son acte historique du 31 octobre, l'Unesco a démontré, comme le disait l'Indien Nehru, qu'elle est «la conscience de la communauté internationale». «Par le vote d'aujourd'hui, nous l'avons prouvé», a relevé le chef de la délégation du Sri Lanka, convaincu, comme tous les Etats qui ont voté en faveur de la Palestine, que la cause palestinienne va booster les discussions qui se déroulent au Conseil de sécurité de l'ONU et faire avancer la démarche envers la reconnaissance de la Palestine en tant que membre de plein droit à la maison de verre de New York.