Photo : M. Hacène De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Le mouvement associatif accorde ces dernières années un intérêt particulier au patrimoine et à sa promotion. Des citoyens ont lancé plusieurs initiatives à Béjaïa pour la préservation et de la restauration des biens culturels. La wilaya recèle en effet un patrimoine matériel et immatériel d'une grande richesse. On peut citer plusieurs collectifs qui se sont pleinement investis dans ce domaine. Le Groupe de recherche sur l'histoire des mathématiques à Béjaïa, Gehimab, l'Association de sauvegarde du patrimoine culturel de Béjaïa, ASPCB, l'Association pour la renaissance de l'Institut coranique Sidi Touati, Aricst, la Fondation Cheikh Aheddad, FCA, le Cercle Citadelle-Casbah, 3C, le Collectif patrimoine et identité, CPI, et l'Association de sauvegarde et de protection de la baie des Aiguades, Aspba, font partie de ce dense tissu associatif qui œuvre pour la vulgarisation et la mise en valeur des trésors patrimoniaux. Tous ces acteurs agissent pour faire connaître des sites historiques ou archéologiques et faire découvrir des traditions culturelles de la région dans le but avoué de «vendre son image comme destination touristique privilégiée». Même dans les bourgades éloignées, des comités ont vu le jour pour restaurer les villages traditionnels et les transformer en centres de vacances durant la saison estivale. L'entreprise du mouvement associatif ne s'arrête pas là puisque des séminaires et des rencontres, consacrés à la restitution des œuvres de plusieurs savants, ulémas et personnalités historiques qui ont fait le prestige de l'antique Bgayet, sont régulièrement organisés. De riches expositions, des brochures et des œuvres de théâtre ont servi de supports à la résurrection de grandes figures de la résistance algérienne, des éminences artistiques, scientifiques et religieuses.Comme pour accompagner cette dynamique, les pouvoirs publics ont aussi lancé depuis l'année 2000 un programme de restauration de sites urbains. La mosquée et les dépendances de la Casbah au cœur même de la ville de Béjaïa, la medersa de Cheikh Aheddad à Seddouk, la zaouïa et l'école coranique de Sidi Yahia Aïdli à Tamokra (Akbou) ont déjà bénéficié d'opérations de rénovation et d'extension. Des études ont été lancées pour la restauration d'autre sites comme les deux portes Bab El Fouka et Bab El Bahr (communément appelée porte Sarazine), édifiées à l'époque du sultan hammadite, le Fort Abdelkader qui date de l'occupation espagnole, la Qalaâ de Beni Abbas dont la maison de Cheikh El Mokrani (meneur du mouvement insurrectionnel de 1871) et la mosquée Ibn Souane. Des travaux de confortement sont aussi nécessaires à la koubba de Sidi Yahia Abou Zakaria (époque médiévale) et au musée de Bordj Moussa (ouvrage militaire espagnol). Dans son plan de sauvegarde du patrimoine cultuel, la direction de tutelle a inscrit le site classé de Tiklat (Tubusuctu, une ville romaine de 25 ha, érigée en 27 av J-C pour servir de colonie aux vétérans de la 7ème légion).Mais de par son ampleur, un tel héritage nécessite beaucoup plus de soin et de technicité pour son maintien en bon état. Les observateurs avertis ne cessent de souligner la mauvaise qualité des travaux entrepris et les modifications introduites qui altèrent l'aspect original de ces monuments historiques. Les conditions de préservation et de restauration optimales ne répondent que rarement aux standards internationaux définis par l'Unesco. Le savoir-faire en la matière fait souvent défaut aux entrepreneurs locaux. Les établissements de la formation professionnelle, les instituts de l'enseignement supérieur et l'université n'accordent pas beaucoup d'importance aux filières artistiques. Au manque de formateurs s'ajoute le peu d'engouement des étudiants pour ce genre de métiers peu demandés sur le marché du travail. Les artisans qualifiés sont également rares. Les «anciens» ont pris leur retraite sans laisser de relève pour leur succéder. L'élection récente de l'Algérie au Comité du patrimoine mondial de l'Unesco constitue une aubaine pour bénéficier des expériences des autres pays en la matière. Il s'agit surtout d'acquérir les techniques modernes employées dans la restauration des joyaux architecturaux et de s'imprégner des méthodes d'exploitation, de gestion et de rentabilisation ultérieures.