Douze employés des Nations unies en Algérie sont mis en cause pour des «manquements significatifs» à la sécurité constatés après l'attentat à Alger contre l'ONU le 11 décembre 2007, qui a fait 41 morts, dont 17 membres du personnel de l'ONU. Dans un rapport de 88 pages émanant du groupe d'experts chargé d'examiner les responsabilités individuelles en lien avec l'attentat à la voiture piégée, il a été conclu à des «manquements significatifs dans le jugement et les performances des personnes impliquées» dans la sécurité des Nations unies à Alger. Mis en ligne sur le site Internet de l'organisation internationale, ce rapport a établi qu'il était «impossible de dissocier la question de la responsabilité individuelle de celle de la structure en matière de sécurité». Dans une conférence de presse animée à la fin de la semaine dernière, M. Ralph Zacklin, ancien sous-secrétaire général aux affaires juridiques et chef du Groupe indépendant sur la sûreté et la sécurité du personnel et des locaux des Nations unies, a indiqué que le groupe indépendant, composé de cinq membres et créé en juin 2008, avait rassemblé des éléments sur «12 individus et un organisme de responsabilité collective», à savoir l'équipe chargée de la gestion de la sécurité et cela après avoir eu des entretiens avec 54 personnes et examiné des milliers de pages de documents. Il a recommandé des mesures administratives à l'égard de six personnes et des mesures disciplinaires à l'encontre de quatre autres. M. Zacklin a néanmoins rejeté l'idée de toute «négligence criminelle» dans cette affaire. Il a expliqué que le mandat du panel l'autorisait seulement à faire des recommandations au secrétaire général, et que les mesures prises par la suite revenaient à «la discrétion du secrétaire général». Mais, a-t-il précisé, les travaux du panel ont surtout permis de mettre à jour des «problèmes dans la structure en matière de sécurité». «Le système de sécurité par phase, tel qu'il est actuellement constitué, ne fonctionne pas correctement car il est interprété de différentes manières par différentes personnes dans différents lieux d'affectation», a-t-il déclaré. Le système de sécurité par phase permet aux autorités des Nations unies de relever le niveau d'alerte en fonction de la menace qui, selon elles, pèse sur le personnel et les locaux de l'ONU dans un pays donné. M. Zacklin a appelé à une réforme urgente de ce système. Il a indiqué qu'il y avait plusieurs explications à ces dysfonctionnements. Comme le «manque de supervision satisfaisante, de formation et de recrutement du personnel chargé de la sécurité qui ne peut être imputé simplement au manque de moyens financiers». «Les Nations unies n'auront jamais le même type de budget que les gouvernements nationaux pour leur sécurité», a-t-il dit. Il faut donc établir des priorités concernant les missions confiées à chaque département, la composition du personnel de ces départements, et sa formation. Il a également souligné le «conflit d'intérêts» dans lequel se trouve, selon les conclusions du Groupe indépendant, le responsable désigné dans chaque bureau de l'ONU sur le terrain. Il est à la fois chargé des tâches de sécurité et de la mise en œuvre des programmes, «ce qui crée une situation très difficile pour la personne qui doit assumer ces responsabilités», a-t-il déclaré. Il a, enfin, évoqué les difficultés dans les relations avec un pays hôte que peut entraîner une hausse du niveau d'alerte dans le système de sécurité par phase de l'ONU. «Le Groupe indépendant a établi que de nombreux pays hôtes ne voient pas d'un bon œil le fait que la sécurité soit placée à un niveau élevé, car, pour eux, cela indique que le pays n'est pas sûr», a-t-il déclaré. Le groupe d'experts a, ainsi, regretté la «politisation», par l'Algérie, du niveau de sécurité maintenu par l'ONU qui avait été abaissé à sa demande avant l'attentat. «L'Algérie n'était pas très contente de voir que le niveau de sécurité de l'ONU était maintenu à un niveau élevé», a-t-il dit, expliquant que, dans de nombreux cas, les gouvernements estiment qu'il s'agit d'un reflet de la situation sécuritaire générale dans le pays. Depuis, le niveau d'alerte est repassé de 1 à 3, a souligné M. Zacklin. «Les supérieurs hiérarchiques [de l'ONU, ndlr] étaient préoccupés par l'Afghanistan, l'Irak, le Liban, la Somalie et le Soudan. L'Algérie n'était pas sur l'écran radar», a conclu Ralph Zacklin. Interrogé sur la démission en juin dernier du secrétaire général adjoint à la sécurité et à la sûreté, M. David Veness, le chef du Groupe indépendant a déclaré : «Nous apprécions le fait qu'il ait démissionné.» H. Y.