Bahreïn bouge à nouveau. Le petit royaume connaît un regain de violence sur fond de nouvelles manifestations de l'opposition, interdites par les autorités. Des centaines de personnes s'étaient rassemblées samedi dernier à l'appel du principal mouvement de l'opposition al-Wefaq, pour protester contre le déploiement des forces de sécurité et l'interdiction des manifestations par les autorités. Le président du Wefaq, Ali Selmen, a participé à ces manifestations, en présence de plusieurs personnalités d'opposition. Selon les agences de presse, des dizaines d'individus armés ont mené, le jour même, une attaque contre le village de Dar Klib, situé à 20 km au sud-ouest de la capitale Manama, a indiqué l'association Al-Wifaq. Il s'agit de la troisième attaque de ce genre menée contre ce même village en une semaine, selon l'opposition. Un haut responsable de la sécurité générale au Bahreïn, Tarek El hassen, a affirmé que les rassemblements, marches et sit-in sont interdits à «Toubli» près de la capitale Manama. Le ministère de l'Intérieur bahreïni a de son côté annoncé que l'Etat ne tolérera pas l'anarchie et les atteintes à la sécurité nationale en réaction au mouvement de protestation de l'opposition. Le ministère a affirmé que les rassemblements, et les manifestations organisées par certains mouvements en référence aux forces de l'opposition doivent être légales. Il a expliqué, dans un communiqué, que les manifestations étaient soumises à l'obtention au préalable d'une autorisation des services concernés, tout en mettant en garde que les autorités bahreïnies ne sauraient tolérer les tentatives de déstabilisation du pays. La nouvelle vague de contestation intervient suite à la mort d'un adolescent par le tir d'une bombe lacrymogène de la police, lors de manifestations le 31 décembre, et une autre personne qui tentait de le secourir a été blessée par un tir de la police, selon le mouvement de l'opposition Wefaq. Les policiers ont dispersé à coups de grenades lacrymogènes et de barres de fer des jeunes qui manifestaient à Sitra et d'autres localités des environs de Manama après les funérailles de l'adolescent. «Des dizaines de personnes ont été incommodées par les gaz lacrymogènes ou blessées, mais ont été traitées dans les maisons par des médecins volontaires, de peur d'être arrêtées à l'hôpital», a déclaré Nabil Rajab, président du Centre de Bahreïn pour les droits de l'homme. L'agence de presse officielle du Bahreïn (Bna) a indiqué qu'après les funérailles, «un groupe de saboteurs a mené une marche illégale, bloqué les rues et lancé des pierres, des barres de fer et des cocktails molotov en direction de la police». Le gouvernement a, en outre, fait état d'une embuscade tendue vendredi par des manifestants à une patrouille de police à Nuwaidrat, près de Sitra, pendant laquelle des cocktails molotov ont été utilisés. Le gouvernement a également annoncé dans un communiqué, l'arrestation de plusieurs suspects à la suite de cet incident qui a endommagé un véhicule de la police. Ces attaques sont survenues alors que ces dernières semaines, les Bahreïnis poursuivaient leur mouvement de protestation contre la famille royale contestée depuis février dernier. A l'étranger, les Etats-Unis, qui ont la base de leur V flotte à Bahreïn, ont exprimé leur «profonde inquiétude» sur la tension qui persiste au pays et ont demandé aux autorités bahreïnies d'engager une enquête complète sur les actes de violence. Les Etats-Unis «demandent à tous les manifestants de cesser leurs actes de violence, et exhortent la police et les forces de sécurité de se garder de l'usage excessif de la force», a insisté la porte-parole. «Le gouvernement bahreïni a pris des mesures importantes pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission d'enquête indépendante, et nous l'exhortons à poursuivre cette importante action sans délai et à poursuivre les réformes», a-t-elle noté. Le royaume de Bahreïn était en mi-février dernier et en juin 2011, le théâtre de manifestations antigouvernementales sur fond de revendications sociales et politiques. La répression de ce mouvement a fait 35 morts dont cinq policiers mais aussi des cas de torture dans les prisons. Le 23 novembre 2011, la commission d'enquête a élaboré un rapport global sur les violences mettant en exergue «un usage disproportionnée et injustifié» de la force contre les manifestants par les forces de sécurité. R. I.