La candidature du président du Sénégal, Abdoulaye Wade, pour un troisième mandat présidentiel ne semble pas être contestée par les seuls sénégalais qui veulent sauvegarder les acquis démocratiques de la dernière décennie. Plusieurs voix extérieures se joignent à l'opposition sénégalaise qui réclame le départ de Wade sans effusion de sang. L'Union européenne, les Etats-Unis et d'autres pays s'inquiètent en fait de la propagation des violences préélectorales au Sénégal à moins d'un mois de la présidentielle. Trois personnes sont déjà mortes depuis le 27 janvier à la suite des affrontements entre les manifestants et les forces de l'ordre à Dakar et dans d'autres villes du nord du pays.Les autorités sénégalaises avaient refusé de délivrer l'autorisation demandée par l'opposition pour organiser un rassemblement à Dakar. Mais les opposants à la candidature de Wade, âgé de 85 ans, regroupés au sein du Mouvement du 23 juin (M23), étaient déterminés à se rassembler, hier dans l'après-midi, dans la capitale pour dénoncer la tentative de l'actuel chef d'Etat à instaurer une dictature au lieu de se retirer avec les honneurs après deux mandats successifs à la tête du pays. Le M23 a rejeté en bloc la décision du Conseil constitutionnel qui a donné son quitus pour Abdoulaye Wade pour briguer un troisième mandat alors que la candidature de certains opposants, comme Youssou N'dour, a été invalidée par la même institution, pourtant chargée de faire respecter les lois électorales. Rappelant son attachement au droit de manifester, la France (ancien colonisateur), a exhorté les autorités de Dakar pour revenir sur leur décision et de ne pas quadriller la capitale avec les services de sécurité, au risque de provoquer de nouvelles violences. «Notre attachement au droit à manifester pacifiquement, rappelé au cours d'une déclaration précédente, est toujours valable», a dit le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero, interrogé sur cette interdiction justifiée par l'absence d'une «déclaration préalable».Les Etats-Unis sont plus directs et s'opposent ouvertement à la candidature de Wade. «Nous respectons le processus politique et légal et le fait qu'il (Abdoulaye Wade) soit autorisé à briguer un nouveau mandat mais le message que nous lui adressons reste le même : l'attitude digne d'un chef d'Etat serait de céder la place à la prochaine génération», a déclaré la porte-parole du département d'Etat américain, Victoria Nuland, en réaction à l'annonce de la validité de la candidature du président sortant. De son côté, l'Union européenne a appelé, hier matin, le gouvernement et l'opposition au Sénégal à la retenue. Bruxelles a demandé à «toutes les parties à faire preuve de retenue et à opter pour le dialogue, dans l'intérêt de la tenue d'élections pacifiques, libres et équitables, qui doivent refléter la volonté du peuple sénégalais», a indiqué Michael Mann, porte-parole de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton.Les chancelleries étrangères s'inquiètent également du harcèlement dont font objets certains leaders de l'opposition et du M23. Toutefois, même si les pays occidentaux appellent les deux parties en conflit à la retenue, il devient de plus en plus claire que la candidature de Wade n'est pas appréciée par ces chancelleries qui ont tendance ces derniers temps à lâcher les vieux dictateurs, comme cela est le cas dans le monde arabe en ce moment. L. M.