L'annonce a mis le feu aux poudres à Dakar : le Conseil constitutionnel du Sénégal a rejeté la candidature du chanteur Youssou Ndour à l'élection présidentielle du 26 février, et validé celle du président sortant Abdoulaye Wade, accusé de s'accrocher au pouvoir. La compétition s'engage entre le président sortant, trois anciens Premier ministres, Idrissa Seck, Macky Sall et Moustapha Niasse, ainsi que le dirigeant de l'opposition socialiste, Ousmane Tanor Dieng. Abdoulaye Wade est en lice pour un troisième mandat alors que la Constitution n'a prévu que deux mandat pour un candidat ! Le Conseil a motivé son refus de valider la candidature de Youssou Ndour en constatant qu'il a produit une liste de 12 936 électeurs appuyant sa candidature, dont seulement 8 911 ont pu être identifiés et leurs signatures validées, alors qu'il en faut 10 000 au minimum. À 85 ans, Abdoulaye Wade, élu en 2000, réélu en 2007 pour cinq ans après une révision constitutionnelle en 2001, se représente pour sept ans après le rétablissement du septennat en 2008 par une nouvelle révision constitutionnelle. Et c'est là tout le subterfuge : les partisans de Wade affirment que le comptage doit se faire à partir de la dernière révision constitutionnelle, qu'il s'agit donc d'un second mandat légal. Pour ses opposants, cette troisième candidature est contraire à la Constitution. Le verdict de la Cour constitutionnelle a déclenché de violentes protestations dans la capitale, où des représentants de l'opposition et de la société civile avaient appelé à manifester peu avant l'annonce de la décision. Regroupés dans le Mouvement du 23 juin (M23), les opposants se disent décidés à poursuivre la résistance contre le coup d'Etat constitutionnel que constitue cette validation de la candidature de Wade. Des échauffourées se sont produites entre les forces de l'ordre et les opposants de Wade dans le centre de Dakar, autour de la place de l'Obélisque, lieu de rassemblement de l'opposition, notamment le mouvement de jeunesse “Y en a marre”. “Wade n'a qu'à s'en aller, il faut qu'il dégage”, hurlaient à la lumière des flammes de jeunes manifestants. Pour sa part, Youssou N'Dour, pénalisé par la décision du Conseil constitutionnel, dénonce un “coup de force” du président Wade, ajoutant : “Je suis candidat et je le reste”, et précisant qu'il avait “48 heures pour un recours” contre la décision du Conseil. Les autres candidats retenus pour la course présidentielle parlent également de coup d'Etat, tout en déplorant la répression des manifestations de l'opposition. D. B