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«Le 19 mars 1962 est la résultante d'un combat armé»
Mohamed Bousmaha ancien membre de la Wilaya IV à La Tribune
Publié dans La Tribune le 18 - 03 - 2012


Entretien réalisé par
Younès Djama

La Tribune : Comment avez-vous accueilli l'annonce du cessez-le-feu ?
MOHAMED BOUSMAHA : J'étais réfugié ce jour-là dans une villa sur les hauteurs d'Alger, plus exactement au lieu-dit les Deux-Piliers de Bouzaréah. Comme beaucoup de mes compatriotes, j'ai appris la nouvelle par le biais de la radio. Je me trouvais chez un dénommé Chaâbane. Cette nouvelle m'a beaucoup contenté ainsi que mes hôtes, surtout qu'elle (la signature des accords, ndlr) consacrait l'aboutissement d'une lutte aux énormes sacrifices. Je tiens à dire que les allégations selon lesquelles de Gaulle nous a donné l'indépendance sont totalement fausses. Les Accords d'Evian sont bel et bien la résultante d'un combat armé.

La signature des accords d'Evian s'était accompagnée d'actions armées particulièrement violentes, notamment du côté de l'OAS. Qu'en était-il réellement ?
Auparavant, je dois rappeler certains faits historiques ayant précédé cette signature. De Gaulle a évoqué pour la première fois, en septembre 1959, l'autodétermination, mais, par la suite, son discours a évolué pour entamer des contacts directs avec le Gpra. Cependant qu'il avait toujours des arrière-pensées, il ne voulait pas vraiment de l'indépendance, lui, qui avait employé plusieurs stratégies en projetant notamment de diviser l'ALN. Un jour, il a même déclaré qu'il ne négocierait qu'avec ceux qui n'étaient pas «hors combat», dans une volonté de mettre l'intérieur en confrontation avec l'extérieur. Il a aussi refusé de céder sur le littoral algérois et le Sud, etc.De notre côté, nous répondions à chaque tentative de division du pays en rappelant notre vœu d'indépendance. Nous luttions sur quatre fronts : d'un côté, le Front de l'armée française et l'Organisation de l'armée secrète (OAS), d'un autre côté, nous devions également faire face à d'autres miliciens armés issus d'autres mouvements paramilitaires : à l'instar du Front de l'Algérie démocratique (FAD), dirigé à l'époque par un ancien messaliste, Khalifa Benamar, ainsi que les barbouzes composés d'anciens déserteurs du Mouvement pour la coopération (MPA). Pour revenir à l'OAS, la création de cette organisation paramilitaire s'est faite avant même le putsch manqué de militaires français à l'image de Salan contre de Gaulle. Au niveau de la Zone 6, nous avons réussi à imposer l'insécurité à l'intérieur même d'Alger, pourtant la seule région où le couvre-feu n'était pas en vigueur. Un officier français reconnaissait, en décembre 1961, que la cadence des actions militaires de l'ALN a atteint 50 actions par jour, soit une moyenne supérieure de deux fois que lors de la Bataille d'Alger. On a tendance à penser que l'OAS a commencé ses attentats terroristes après la signature des Accords d'Evian ; or, cette organisation paramilitaire a été créée en janvier 1961 lors des Barricades, lorsque Salan et La gaillarde entre autres éléments du Front de l'Algérie française (FAF) se sont installés en Espagne d'où ils dirigeaient leurs attentats commis en Algérie. En mars-avril 1962, de retour à Alger, les fondateurs de l'OAS ont entrepris une tentative de putsch contre de Gaulle, cependant sans succès. Suite à cela, ils sont entrés en clandestinité. Et c'est à partir de ce moment que la lutte contre l'OAS était devenue très dure.

Comment s'est déroulée la création de l'instance exécutive de Rocher Noir et quelles étaient ses missions ?
L'instance exécutive de Rocher Noir (Boumerdès), présidée par Abderrahmane Farés, est née au lendemain même de la signature des Accords d'Evian le 19 mars 1962. Elle était composée de 7 représentants de l'administration coloniale (3 militants français dits progressistes et 4 algériens qui représentent la troisième force c'est-à-dire favorables à une coopération avec les français) et du côté algérien, il y avait 4 délégués du Gpra (Gouvernement provisoire) : Chawki Mostefaï responsable de la délégation, Belaïd Abdesselem, Mohamed Benteftifa (pharmacien de profession installé à Blida) et un dénommé Hamidou (avocat). Plus tard, on a ajouté à cette délégation Abdelmalek Temmam qui purgeait dix ans de travaux forcés dans la prison d'El Harrach à cette période avant qu'il ne soit relaxé sur la demande du Gpra. La mission de l'instance exécutive provisoire se déclinait en deux volets : politique et sécuritaire. Politique à travers la Commission de préparation du référendum de l'autodétermination ; et sécuritaire à travers la commission du cessez-le-feu chargée de faire régner l'ordre en cette période de troubles où l'OAS redoublait de férocité. En réalité, faut-il le souligner, la délégation du FLN n'avait pas réellement de pouvoir, sa présence n'était que symbolique. Le véritable pouvoir était exercé par Abderrahmane Farés, président de l'Instance exécutive provisoire, et un certain Hessar qui avait hérité du «département» de l'Intérieur. Car, il faut savoir que cette instance s'apparentait à un «mini gouvernement» où chaque membre avait ses attributions. Une fois installés, les membres de l'instance provisoire ont pris attache avec la Wilaya IV dont Rocher Noir faisait partie. Nous avons discuté d'un certain nombre de points, notamment comment assurer le cessez-le-feu. Abderrahmane Farés nous a assuré que ce point était pris en charge par l'instance exécutive à travers la commission nationale co-présidée du côté algérien par un dénommé Allahoum et un général français. Pour notre part, nous devions installer une commission de wilaya et des commissions au niveau de chaque zone. Suite à ces contacts, la Wilaya IV a désigné deux représentants (Sadek Batel et Akkouche promus à l'occasion au grade de capitaines) pour siéger au sein de la Commission nationale de cessez-le-feu.

Quelle était la réaction du FLN face à ce qui était appelé à cette époque les «tribunaux populaires» ?
En Wilaya IV, en plus des supplétifs de l'armée française (harkis), nous devions également faire face à trois autres groupes de contre-révolutionnaires qui avaient mis en place des compagnies contre le Front de Libération nationale (FLN) dont celui de l'Ouest (Aïn Defla), dirigé par un certain dénommé Bachagha Boualem. Au Centre, il y avait le groupe d'un certain Bensaïdi installé du côté de Ksar El Boukhari, Aïn Boucif et Chellala. Il y avait aussi un groupe de messalistes qui opérait du côté de Sidi Aïssa. En 1956, les Français ont commencé à recruter des éléments parmi les populations pauvres, à la fois pour leurs besoins de reconnaissance du terrain mais aussi pour attirer la sympathie des populations. Certains harkis ont tout simplement été recrutés parce qu'ils étaient de pauvres paysans.
On compte également parmi les «recrues» d'anciens moudjahidine qui, une fois arrêtées, ont subi une espèce de «lavage de cerveau», et alors ils se sont mis au service des forces coloniales. Je dois souligner concernant les harkis qu'il n'a jamais été question d'instruction donnée par le FLN en vue d'exécuter ces supplétifs de l'armée française, et j'ajouterai que les quelque 2 000 assassinats qu'il y a eu relèvent d'actes individuels. Je réfute catégoriquement les allégations colportées par certains cercles en France et notamment les descendants des harkis, selon lesquelles il y aurait eu 200 000 exécutions. Il faut savoir que les populations se faisaient justice par elles-mêmes sans demander d'autorisation de l'ALN ni de quelque autre autorité révolutionnaire. En notre qualité de dirigeants, nous leur avons strictement interdit ce genre de pratiques. En ce qui concerne la Wilaya IV, nous avons enregistré moins de 200 actes de vengeance qui ont visé des harkis. Le seul dépassement qu'il y a eu était l'œuvre d'un certain Ahmed Zahaf, ancien membre de l'ALN, qui avait installé, en août1960, un tribunal populaire à Berrouaghia. Il a fait installer une estrade en plein centre de la ville en prenant le soin de convoquer les notabilités locales. Il appelait les coupables et les jugeait sur la place. Heureusement que nous avons mis fin à ces agissements une fois informés, sans qu'il y ait d'exécution.

Vous étiez partie prenante de la grave crise de 1962. Un conflit sanglant a eu lieu et des morts algériens sont tombés. Que s'est-il passé réellement ?
Lors de la crise de l'été 1962, la Wilaya IV a observé une position neutre par rapport au conflit de légitimité opposant le clan de Ben Bella, d'un côté, et le Gpra, de l'autre. Le colonel Bencherif que nous avons chargé de transmettre notre position au Congrès de Tripoli nous a trahi et a fait croire aux présents que nous soutenions le clan de l'armée des frontières qui pouvait également compter sur le soutien de Abderrahmane Farés chef de l'instance exécutive provisoire de Rocher Noir. Nous avons interdit l'entrée des troupes de l'armée des frontières dans Alger. Face à notre refus, ils ont décidé d'utiliser la force ; même Yacef Saâdi chef militaire de la zone autonome d'Alger n'a pas réussi à nous déstabiliser. Les éléments de l'armée des frontières s'étaient réunis fin août 1962 à Boussaâda. On peut citer entre autres : Ben Bella, Boumediène, Chérif Belkacem, Zerguini. Ils ont pris la décision d'entrer par la force en Wilaya IV dont les chefs ont dû résister. Un conflit armé s'en est alors suivi, avec malheureusement plusieurs victimes. Les troupes de l'armée des frontières opéraient en trois fronts dont celui de Sour El Ghozlane pour le front venant du sud à la limite de Ksar El Boukhari (Médéa), et nous avons dû nous opposer. Alger déclarée ville ouverte a vu le déploiement de trois bataillons. Des accrochages ont eu lieu. Des morts sont également tombés. C'est le début d'une spirale de violence qui n'a pris fin qu'avec l'entrée des troupes de l'armée des frontières dans la capitale quelques mois plus tard. Un cessez-le feu a été proclamé, et deux commissions ont été mises sur pied en prévision de la Constituante : une commission politique dont la mission était de préparer les listes de l'Assemblée constituante et une autre militaire chargée de préparer la reconversion de l'armée nationale sur l'ensemble des wilayas. Houari Boumediène a immédiatement pris la décision de rebaptiser l'Armée de libération nationale (ALN) par Armée populaire nationale (ANP). Il est utile de souligner que contrairement à ce que prétendent leurs éléments, les troupes de l'armée des frontières ont accédé dans Alger après notre consentement. Sinon, nous les aurions stoppés net à Tablat. Une fois le calme revenu, nous nous sommes réunis avec Ahmed Ben Bella dans sa résidence de la Villa Joly (Alger) pour discuter de la question de la reconversion de l'armée nationale, mais cette réunion s'est déroulée en l'absence de l'armée des frontières. Une défection qui avait fortement décontenancé Ben Bella. Quoi qu'il en soit, la première constituante est née et a vu siéger en son sein des figures illustres de la révolution à l'image des Ferhat Abbès et Hocine Aït Ahmed, Boumediène et Ben Bella n'étaient quant à eux que de simples députés. Il faut noter que les drames successifs que le pays a eu à vivre, par la suite, étaient la résultante de la crise de 1962 où toutes les forces révolutionnaires se sont désunies.


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