Des milliers de manifestants hostiles au régime syrien ont défilé hier. Le cessez-le-feu décrété depuis une semaine a été qualifié de «très fragile» par l'émissaire international Kofi Annan. Violée fréquemment depuis son instauration le 12 avril, la trêve a de nouveau été mise à mal avec l'assassinat de 18 membres des forces de l'ordre, tués par des «terroristes» selon les médias officiels et des bombardements sur Homs. La France déposera prochainement un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU pour mettre en place une mission d'observation du cessez-le-feu «aussi robuste que possible», après que le chef de l'ONU Ban Ki-moon a recommandé l'envoi de 300 observateurs au total. Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a estimé que cette future force devrait avoir les moyens de faire «respecter la liberté de manifestation» en Syrie, en proie depuis le 15 mars 2011 à une révolte populaire qui s'est ensuite militarisée face à la répression sanglante. Mais alors que des défilés ont débuté comme chaque vendredi depuis 13 mois, l'équipe restreinte d'observateurs déjà sur le terrain a indiqué qu'elle n'assisterait pas aux manifestations afin d'éviter que sa «présence ne soit utilisée» pour favoriser «une escalade» de la violence. Pour cette journée de mobilisation placée sous le slogan «nous serons victorieux et Assad sera défait», des vidéos mises en ligne par des militants ont montré des milliers de manifestants à Qamichli, dans le nord-est kurde, scandant «Homs, nous sommes avec toi jusqu'à la mort». «Un groupe terroriste armé a fait exploser une charge de 100 kilogrammes à Sahm al-Jolane (sud) tuant 18 membres des forces de l'ordre», selon les médias officiels et trois autres ont péri ailleurs dans le pays. L'Osdh a affirmé que les forces syriennes avaient tué un militant et un civil dans la région d'Idleb et à Alep dans le nord, tandis que Homs, surnommée la «capitale de la révolution» par les militants, était bombardée «à raison d'un obus de mortier toutes les cinq minutes». Après avoir tergiversé, Damas a signé jeudi le protocole organisant le travail, et en particulier la liberté de mouvement, des observateurs, condition sine qua non de la poursuite de leur mission lancée lundi. Malgré les engagements répétés de Damas de respecter le plan de l'émissaire international Kofi Annan, son porte-parole Ahmed Fawzi a jugé que la situation sur le terrain «n'est pas bonne», soulignant que le cessez-le-feu est toujours «très fragile». Estimant le plan Annan «voué à l'échec» à cause du manque de coopération du régime, les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL) ont réclamé une intervention militaire passant outre le Conseil de sécurité, longtemps paralysé par les veto russe et chinois. Moscou a, d'ailleurs, estimé que la trêve était «dans l'ensemble» respectée, alors que les violences ont fait en 13 mois plus de 11 100 morts selon l'Osdh. Si les pays occidentaux continuent de rejeter tout recours à la force hors mandat de l'ONU, une quinzaine de chefs de diplomatie arabes et occidentaux ont évoqué jeudi à Paris une implication de l'Otan. La secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, a appelé à «s'orienter vigoureusement vers le Conseil de sécurité en vue d'une résolution sous le chapitre VII de la Charte de l'ONU qui permet d'imposer, y compris par la force, des mesures en cas de menace contre la paix». Enfin, l'Union européenne pourrait adopter lundi un 14e train de sanctions contre le régime, visant les produits de luxe et le matériel pouvant être détourné à des fins de répression. R. I.