Les greffiers et les fonctionnaires du secteur de la justice poursuivent leur débrayage entamé le 10 avril dernier, contrairement à l'interprétation qui a été faite du communiqué diffusé, la veille, par la Fédération nationale des fonctionnaires de la justice, dans lequel la fédération indiquait qu'elle prolongeait la grève de deux autres jours, laissant penser à une fin du débrayage à partir du 2 mai. «La grève se poursuit et nous allons réunir demain (aujourd'hui, ndlr) le Conseil national qui tranchera des suites à donner à ce mouvement, en fonction de la réponse de la tutelle», nous a confié hier, lors d'un entretien téléphonique, le président de la fédération, Mourad Ghedia. Notre interlocuteur a indiqué que le président de la République, en sa qualité de premier magistrat du pays, a été destinataire, hier, d'un rapport de situation détaillé émanant de la Fédération des fonctionnaires de la justice, souhaitant son arbitrage. Le représentant des greffiers et fonctionnaires fait, par ailleurs, part de la persistance des «pressions et dépassements» dont font l'objet les grévistes, depuis le début de leur mouvement. Il précise, également, que la menace de radiation brandie par le ministère de la Justice à l'encontre des récalcitrants qui se refusent à répondre positivement à son appel pour la reprise du travail, est d'ores et déjà effective. «Au tribunal de Kherrata (w. Sétif), la force publique est intervenue pour contraindre les grévistes à reprendre le travail», précise M. Ghedia. Dans le communiqué diffusé samedi dernier, la Fédération des fonctionnaires de la justice a dénoncé les «pressions, intimidations et dépassements dangereux dont ont fait l'objet les grévistes de la part de la tutelle, allant même jusqu'à user de procédés antiréglementaires», et salué «l'abnégation et le sens de la responsabilité des grévistes qui ont gelé l'ensemble des Cours et tribunaux» dans leur combat pour recouvrer «leur dignité avant leurs droits». La fédération a remercié, en outre, tous ceux (organisations de défense des droits de l'Homme, avocats, presse écrite, et autres personnalités publiques, etc.) qui ont apporté leur soutien aux grévistes, et se félicite particulièrement des déclarations du président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini, qui avait rejeté dans des déclarations publiques les pressions et les violences faites aux greffiers. Lancé le 10 avril dernier, le débrayage des greffiers et corps communs du secteur de la justice intervient en réponse à la «sourde oreille» de la tutelle devant leurs revendications. Les grévistes revendiquent essentiellement leur intégration dans le secteur de la justice au même titre que le corps des magistrats pour ne plus dépendre de la Fonction publique, la révision de leur statut particulier, et réitèrent leur droit au logement de fonction. Ils réclament également des prêts bancaires pour l'achat de véhicules pour pouvoir se déplacer la nuit, notamment pour ce qui est des femmes qui assurent les audiences pénales dont la quasi-totalité se termine au-delà de minuit. Les greffiers affirment, par ailleurs, que la tutelle n'a pas respecté ses engagements concernant la promesse liée au paiement des heures supplémentaires, notamment pour ceux qui assurent les audiences criminelles.La grève des greffiers a suscité un élan de solidarité notamment de la part des avocats. Ces derniers ont tout bonnement refusé de plaider devant les huissiers de justice auxquels le ministère de la Justice a fait appel pour remplacer les greffiers, qualifiant ce procédé d'«antiréglementaire». Dans une déclaration publique, le Conseil national de l'Ordre des avocats, tout en ne manquant pas d'afficher son soutien aux grévistes, n'en reste pas moins inquiet de la situation qui tend à durer. Y. D.