La Fédération nationale des fonctionnaires du secteur de la justice (Fnsj) a décidé de prolonger sa grève entamée le 10 avril pour deux autres jours, tout en prévenant que des actions de protestation seront organisées en parallèle. Dans un communiqué, la fédération a indiqué, hier, que cette décision a été prise à l'issue d'une réunion qui l'a regroupée le 27 avril avec les représentants des Cours de justice du pays, lors de laquelle tous se sont prononcés pour la poursuite du débrayage. La même source précise que l'estimation du taux d'adhésion au mouvement de grève, entre le 10 et le 26 avril, a atteint 95%, en dépit des «intimidations et menaces subies par les grévistes». Cette adhésion massive, souligne la Fnsj, est la première du genre depuis que les fonctionnaires du secteur se sont dotés d'un syndicat, lequel est affilié au Snapap (Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique). La fédération appelle les autres fonctionnaires qui n'ont pas fait grève «à se joindre au mouvement, et ne pas attendre que les choses s'arrangent et en tirer les dividendes». Dans le communiqué signé par son président, Mourad Ghedia, la Fédération des fonctionnaires de la justice dénonce les «pressions, intimidations et dépassements dangereux dont ont fait l'objet les grévistes de la part de la tutelle, allant même jusqu'à user de procédés antiréglementaires», et salue «l'abnégation et le sens de la responsabilité des grévistes qui ont gelé l'ensemble des Cours et tribunaux» dans leur combat pour recouvrer «leur dignité avant leurs droits». La fédération remercie, en outre, tous ceux (organisations de défense des droits de l'Homme, avocats, presse écrite, et autres personnalités publiques, etc.) qui ont apporté leur soutien aux grévistes, et se félicite particulièrement des déclarations du président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini, qui avait rejeté dans des déclarations publiques les pressions et les violences faites aux greffiers. Lancé le 10 avril dernier, le débrayage des greffiers et corps communs du secteur de la justice intervient en réponse à la «sourde oreille» de la tutelle devant leurs revendications. Les grévistes revendiquent essentiellement leur intégration dans le secteur de la justice au même titre que le corps des magistrats pour ne plus dépendre de la Fonction publique, la révision de leur statut particulier, et réitèrent leur droit au logement de fonction. Ils réclament également des prêts bancaires pour l'achat de véhicules pour pouvoir se déplacer la nuit, notamment pour ce qui est des femmes qui assurent les audiences pénales dont la quasi-totalité se terminent au-delà de minuit. Les greffiers affirment, par ailleurs, que la tutelle n'a pas respecté ses engagements concernant la promesse liée au paiement des heures supplémentaires, notamment pour ceux qui assurent les audiences criminelles. La grève des greffiers a suscité un élan de solidarité notamment de la part des avocats. Ces derniers ont tout bonnement refusé de plaider devant les huissiers de justice auxquels le ministère de la Justice a fait appel pour remplacer les greffiers, qualifiant ce procédé d'«antiréglementaire». Dans une déclaration publique, le Conseil national de l'Ordre des avocats, tout en ne manquant pas d'afficher son soutien aux grévistes, n'en reste pas moins inquiet de la situation qui tend à durer. «Nous avons constaté que des audiences publiques ont lieu en l'absence de greffiers qui y sont habilités légalement et leur remplacement par des huissiers de justice qui ne bénéficient pas du statut juridique», constate l'Ordre des avocats qualifiant la procédure d'illégale «que le barreau ne cautionne pas». Pour les robes noires, «le recours aux huissiers de justice porte atteinte aux principales procédures judiciaires» pour la tenue des audiences tant près des Cours que près des tribunaux. Ne voulant pas prendre part aux «violations flagrantes», les membres de la défense refusent de plaider devant des «collectifs illégaux». Le communiqué de l'Ordre des avocats souligne, en outre, que pour veiller au bon fonctionnement de la justice et garantir les droits des justiciables, «il faudrait trouver une solution dans les plus brefs délais». Y. D.