Tout touriste arrivant dans une ville cherche ce qui la caractérise, la différencie. Sa cuisine, son architecture, son histoire et les vestiges qui l'illustrent sont autant de «curiosités» à découvrir. Que seraient Rome sans son Colisée, son Panthéon, ses fontaines… ; Paris sans la tour Eiffel, les palais, les monuments historiques… ; Venise sans les gondoles, les ponts, les sestieres, le palais des Doges… ; Amsterdam sans les canaux, les musées (plus d'une cinquantaine), le quartier historique… ; Agra sans le Taj Mahal, le Fort rouge, le Fatehpur-Sikri… ; la Chine sans la muraille ? Et la liste des villes qui doivent les millions de touristes qui les visitent et leur renommée mondiale à leur patrimoine qu'elles ont su valoriser et exploiter, est longue.Evidement condition sine qua non, il faut que les vestiges patrimoniaux existent d'abord, et que, ensuite, la ville en ait pris soin, les ait bichonnés et mis en valeur. Qu'en est-il des villes algériennes ? Elles ont toutes un capital patrimonial appréciable qui ne demande qu'à être exploité. Comptoirs commerciaux puniques, villes garnisons romaines, cités fortifiées ottomanes et métropoles modernes construites par l'occupant français – qui, avec une politique de déculturation pour une colonisation de peuplement, n'a pas hésité à détruire des chefs-d'œuvre architecturaux et des vestiges laissés par ses prédécesseurs –, les villes algériennes ont gardé de chaque occupation des traces, des témoins. De tous ces biens patrimoniaux, les casbahs sont les seules pratiquement à avoir bénéficié, même tardivement, d'une attention relativement conséquente. Intégrées dans les secteurs sauvegardés, ces cités antiques, après avoir été amputées d'îlots entiers détruits par l'homme ou le temps et les éléments, voient leur chance d'échapper à la disparition grandir.Mais ce ne sont pas tous les sites historiques et monuments architecturaux noyés dans le tissu urbain de nos villes côtières, principalement, qui auront eu cette «chance». Bien malin qui saura dénicher parmi tous ces greffons urbanistiques le vestige architectural, surtout que ces bâtiments ne sont pas classés comme «Monument du patrimoine national», ce qui aiderait à leur préservation ; déjà que ceux qui le sont ne sont aucunement signalés. On ne trouve pas la moindre plaque indicatrice qui présenterait brièvement le monument et son histoire.C'est ainsi que des bâtiments, des sites et des biens qui ont tout pour être classés sont complètement ignorés et délaissés, donc livrés à la disparition. Des immeubles aux portes et frontons ouvragés, qui sont des témoins de l'histoire de l'architecture urbaine, tombent en ruine sans que personne ne s'en soucie. Des statues ont été déboulonnées pour l'unique raison qu'elles étaient un tantinet dénudées ou parce qu'elles étaient l'œuvre d'artistes français durant l'occupation ! Guernica de Picasso n'a-t-elle pas été inspirée par le massacre de la ville éponyme ? H. G.