L'initiative Notre Algérie bâtie sur de nouvelles idées (Nabni) a fait connaître, hier, à Alger, le chapitre «développement économique et création d'emplois» du rapport «cinquantenaire de l'indépendance ; enseignement et vision pour l'Algérie de 2020». Elle a formulé, dans ce registre, un ensemble de propositions, selon lesquelles elle souhaite façonner, au plan économique, l'Algérie de 2020, une échéance devant symboliser le début de l'après-pétrole pour le pays. Dans l'intervalle, l'Algérie continue à fonctionner au rythme d'une économie pétrolière, dont la rente ne profite pas à tout le monde. Et, c'est ce pétrole là qui fait que le budget de l'Etat est tiré de la fiscalité pétrolière et continue à l'être, les exportations hors hydrocarbures ne représentant qu'un pour cent des volumes globaux des produits exportés. Ce pourcentage, Nabni propose de le porter à dix pour cent, à l'horizon 2020, et de travailler à des projets structurants hors hydrocarbures, des projets qui feront qu'en 2020 le budget de l'Etat ne dépendra plus de cette fiscalité pétrolière, mais d'autres ressources. «La partie est jouable» expliquent, enthousiastes, les animateurs de Nabni. Mais est-il possible de mettre en place une économie solide, basée sur les PME, sur les exportations, sur les IDE ? Kamel Bouzidi n'y croit pas trop, estimant que «l'Etat s'est embourbé dans la rente, affichant une richesse illusoire, éphémère», allusion faite aux deux cent milliards de réserves de change, dont une partie est placée à l'extérieur. «Une démarche pas bonne», estime Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, et pour qui les Etats-Unis peuvent mobiliser, à tout moment, l'argent placé dans leurs institutions, les fonds qui se trouvent sur leurs territoires, s'ils jugent que cela est nécessaire. Hadj Nacer souligne que cette devise aurait été plus rentable, si elle avait été mise dans un fonds souverain, une idée qu'il n'a, cependant, pas réussi à faire aboutir. Hadj Nacer pose un impératif : celui de rendre licite la richesse, parce que «si on ne le fait pas, chacun va se mettre à s'enrichir au détriment de l'intérêt général, sans avoir à se demander s'il pourra, lui, apporter quelque chose au pays», dit-il. L'on est, en fait, dans l'informel, une économie souterraine dont il faut se débarrasser pour contribuer à assainir le climat des affaires, ainsi que le propose Nabni. Mais, pour l'ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, «l'informel est au sommet, jamais à la base». Hadj Nacer a souhaité que Nabni interroge les deux anciennes générations sur le pourquoi du blocage dans les politiques économiques antérieures, même si on est dans des logiques économiques complètement différentes. Nabni en a pris note. Youcef Benabdellah souligne, lui, que «ces réserves nous donnent accès aux importations, sans nous endetter. Elles ne constituent qu'une partie de la réalité de l'économie nationale. Elles accroissent l'illusion d'une richesse. Cette dernière est porteuse de danger», note Hadj Nacer. L'initiative Nabni estime, par ailleurs, que, «s'il y a des sujets où il est nécessaire d'opérer un virage à cent-quatre-vingt degrés, il y en a d'autres, dont les infrastructures et l'énergie, où il n‘y a rien de fondamental à proposé». Le secteur de l'énergie a été juste survolé, dans les propositions formulées par Nabni, ainsi que le souligne El Kadi Ihcène, journaliste et directeur du site économique Maghrebemergent.info. «On pouvait être sur le même sentier que la Grèce, un pays qui n'arrive pas à payer ses fonctionnaires», dit-il. Pour El Kadi Ihcène, «il faut identifier les résistances, et il y en a, dans le secteur de l'énergie. Il n'y a pas un seul responsable du ministère de l'Energie qui puisse parler de décroissance dans ce secteur». Et d'ajouter qu'«il y a également résistance sur le modèle de croissance à adopter ; que, souvent, on met en avant l'avantage comparatif, y compris sur la question des prix du carburant». El Kadi Ihcène estime, par ailleurs, qu'«il est évident que Sonatrach ne puisse constituer un acteur central dans le renouvelable». Il relève aussi, que «ce sera une bonne idée d'investir dans l'économie verte, mais le pays doit avoir la technologie nécessaire pour cela». Y. S.