Comme le constatait superbement un de nos confrères, «contrairement à la gestion fortement dépensière» des années précédentes et l'explosion de la dette extérieure, «l'Etat a eu une attitude très prudente au cours de cette dernière décennie». A cet effet, il n'y a nulle nécessité d'imager le retour à une sérénité sur tous les plans que la crise financière mondiale actuelle ne risquerait pas non plus de remettre en cause. Du moins si elle-même ne dure pas dans le temps. Que d'aucuns ne partagent pas une telle opinion, d'ailleurs le contraire aurait été mal à propos dans la mesure où le débat s'en retrouve biaisé, seraient les bienvenus. Mais la réalité est là, la situation générale du pays, qu'elle soit politique, sociale, économique, le changement, voire les changements sont nettement perceptibles après l'esquisse enregistrée au début du troisième millénaire et presque une décennie après. Sans exagération, l'Algérie s'est inscrite au diapason de toutes les mutations qui ont marqué la planète et le mérite de ses gouvernants est que les performances enregistrées au cours de cette période l'ont été plus que souvent dans la souffrance en raison d'un isolement orchestré sinon voulu par un environnement international hostile, d'une part, mais également de l'obsolescence inavouée des mécanismes institutionnels internes qui en réglaient la vie. En fait, la conjoncture prévalant et la spirale interminable que subissait le pays sont autant de circonstances atténuantes quoiqu'un retour à la réalité, un sursaut lucide étaient salvateurs. L'Algérie a eu à modifier par trois reprises sa première loi. Successivement en 1976, en 1989 et en 1996. Des mutations socio-politico-économiques externes dont l'influence rejaillissait ou pouvait rejaillir sur l'Algérie obligeaient de fait ses dirigeants à s'inscrire dans ces bouleversements pour ne pas être victimes d'un quelconque anachronisme. Or, l'agitation formidable qui marque le monde dans toutes ses strates ne peut que conduire l'Algérie à s'y inscrire non pas par puéril suivisme mais dans l'objectif d'anticiper sur tous types de soubresauts de nature à remettre en cause une stabilité durement acquise et que lui envient bien des nations. Nous n'en parlerons jamais assez mais le confrère qui évoquait un «changement à partir de l'an 2000» touchait du doigt une réalité. La rupture, parce que rupture il y a, est bel et bien venue d'une nouvelle façon de gérer, de conduire les affaires nationales imposée et pour cause par l'avènement d'une forme de dyarchie au sommet de l'Etat, mais seulement en théorie sachant que, depuis 1999, le ou les pendants du chef de l'Etat ne suivaient pas ou n'arrivaient pas à suivre soit par disqualification des membres de l'exécutif soit par asynchronisme des institutions. Comme il y a eu nécessité d'amender la première loi à chaque fois que les circonstances en faisaient obligation, celle de 1996 a besoin à son tour d'être dépoussiérée et d'être l'objet d'un lifting qui mettrait au diapason et les textes et leurs exécutants. Au premier chef, le président de la République dont les attributions pour ne pas dire les pouvoirs ont un réel besoin d'être étendus, une condition sine qua non d'ailleurs pour que la dynamique entamée depuis l'orée 2000 puisse être maintenue, dans le sens où, depuis sa désignation, il est non seulement celui dont les choix politiques ont été porteurs mais aussi parce qu'il est jusqu'à ce jour le seul à s'être exposé publiquement à toutes les mesures prises. Il semble dès lors normal et légitime que le président de la République envisage l'amendement d'une disposition de la Constitution qui lui permettrait de continuer l'œuvre entamée depuis presque une dizaine d'années et plus particulièrement de se doter des moyens de la parachever à hauteur des institutions. Parler dans ce cas d'«une quête de pouvoir absolu qui ne dit pas son nom» équivaut au procès d'intention ni plus ni moins. Il suffirait pour cela de faire un comparatif de l'Algérie ante et post 2000. Il paraît regrettable que l'amendement de l'article 74, celui-là même qui fait pousser des cris d'orfraie à une opposition qui ne semble exister qu'en théorie et ponctuellement, ne soit perçu autrement que par le fait que le président de la République donne l'impression de s'en servir à la limite de l'abus de pouvoir pour perpétuer un règne. Or, si bien du monde s'empresse de dénoncer, arbitrairement par ailleurs, son intention de briguer un troisième mandat, nul ne se démarque pour jurer jusqu'à se damner, la disponibilité, en les circonstances actuelles, d'un alter ego à même de mener à bon terme les réformes engagées et, surtout, celles à venir, parce qu'il y a nécessité de souligner que les plus grands chantiers restent à être engagés et c'est au regard de ces derniers que le chef de l'Etat a besoin d'une honnête marge de manœuvre pour ne pas dire avoir les mains moins liées pour leur concrétisation. La révision de l'article 74 ne sera alors que le prélude à une réforme profonde de la première loi qui reste avant tout la propriété exclusive du peuple. A. L.