Photo : Riad Par Smaïl Boughazi Le secteur industriel algérien a fait un long parcours depuis l'indépendance du pays. De l'industrie industrialisante au protectionnisme économique, en passant par les privatisations et les ajustements structurels, l'industrie algérienne aura connu une évolution perturbée, longue et complexe. Mais cela est en partie dû à la situation politique du pays qui a grandement contribué dans les différents desseins : industriel, économique et stratégique. Après quelques années consacrées particulièrement à la reconstruction des infrastructures du pays, l'Algérie a choisi son camp et décidé d'opter pour le socialisme. Ce qui va déterminer pour de longues années ses choix économiques et ses options industrielles. Le socialisme avait contribué aussi à l'apparition de ce qui est appelé, jusqu'au jour d'aujourd'hui, l'industrie industrialisante. Une option qui a démontré ses limites, bien que ses résultats restent une fierté pour le pays. Les exemples sont innombrables. Les grandes sociétés nationales actuelles sont le fruit de ce choix économique des années 1970. Gérard Destanne de Bernis résume dans son livre «Les industries industrialisantes et les options algériennes» la situation du pays durant les premières années de l'indépendance. Pour lui, «L'investissement annuel de l'Algérie représentait 5 % de son produit intérieur brut (PIB) en 1963 et 29 % en 1969. L'investissement industriel passait aux mêmes dates de 23 à 51 % de l'investissement total. En 1969, plus de 45 % de cet investissement total (13 % du PIB) vont aux seuls secteurs des hydrocarbures, de la pétrochimie, de la sidérurgie et de la mécanique». Durant les années 1970, l'action économique s'intensifie. «Le Plan quadriennal (1970-1973) prévoit un investissement total de 27,7 milliards de dinars, soit plus de 35 % du produit intérieur brut de la période, dont 45 % pour l'industrie. De cet investissement industriel de 12,4 milliards de dinars, les hydrocarbures, la métallurgie, la mécanique et la chimie recevront 66 % auxquels s'ajoutent encore 12 % pour les mines et l'électricité. L'essentiel du reste, consacré aux industries de transformation (22 %), ira aux matériaux de construction (8 %), compte tenu du retard accumulé dans ce domaine, et aux textiles (5 %)», ajoute Destanne de Bernis. Il rappelle, cependant, que lors de son indépendance, «l'Algérie se caractérise essentiellement par son extraversion (Aussi bien agricole qu'industrielle) et par sa désarticulation interne : les régions sont mal reliées, chaque secteur est, surtout, dépendant de l'extérieur par ses inputs importés ou son output exporté. Ceci a été maintes fois analysé. La seule réponse efficace tenait dans la mise en place d'une structure industrielle cohérente».Mais malgré les efforts des années 1970, l'Algérie avait perdu dès le début des années 1980 ce rythme industriel en se tournant vers une consommation à outrance grâce à la mise en place de structures dédiées à «l'importation». En d'autres termes, les programmes anti-pénuries sont mis en branle. Et les recettes pétrolières sont mises à rude épreuve non pas pour les investissements, mais l'importation. Une situation qui s'est accentuée au fil des années avant de connaître la grande et dure chute de 1986. Les prix du pétrole étaient en baisse, révélant aux Algériens tout le mal de la rente et ses risques. La désindustrialisation du pays a commencé à peser sur la situation politique du pays et même sociale. Ce qui n'a pas tardé à se transformer en une crise multidimensionnelle qui a mis le pays à genoux durant plus de dix ans. Ces transformations politiques et économiques poussèrent le pays à opérer des réformes structurelles et industrielles qui avaient coûté au pays le diktat du puissant FMI, des bailleurs de fonds mais aussi une orientation économique irréfléchie. L'économie de marché arrive et la privatisation des entreprises commence. L'Algérie a maintenu ses choix imposés par une conjoncture internationale et une situation financière, jusqu'au jour où la crise financière mondiale révèle au monde entier que la souveraineté des pays est menacée par cette mondialisation anarchique et sauvage. L'Algérie décide ainsi de récupérer son pouvoir économique en prenant en main la gestion de la sphère économique, particulièrement de l'industrie. Cinquante ans après l'indépendance, l'industrie algérienne a traversé plusieurs zones de turbulences et doit faire face aujourd'hui à l'émergence de nouveaux pays puissants, une évolution technologique effrénée et un marché mondial interconnecté et sans merci.