L'Assemblée du peuple égyptienne, dissoute à la mi-juin par le Conseil suprême des forces armées (Csfa), s'est réunie hier matin. Une réunion qui intervient trois jours après le décret du président Mohamed Morsi ordonnant son rétablissement. L'armée, qui a tenu une réunion d'urgence après le décret présidentiel, a appelé lundi soir au respect de «la loi et de la Constitution», en se disant «confiante que toutes les institutions de l'Etat respecteront ce qui a été dit dans les déclarations constitutionnelles». Ces derniers développements illustrent le bras de fer entre le nouveau président et le Conseil suprême des forces armées (Csfa), surtout après l'adoption par les militaires d'une «Déclaration constitutionnelle complémentaire», qui a considérablement affaibli la fonction présidentielle.A l'ouverture de la session, le président de la Chambre basse, Saad al-Katatni, a déclaré que le sujet de discussion des députés était le «le mécanisme d'application» du jugement de la Haute cour constitutionnelle (HCC). «Le Parlement connaît très bien ses droits et ses devoirs, n'intervient pas dans les affaires du pouvoir judiciaire et ne commente pas les jugements de la justice», a-t-il ajouté, en assurant que les élus respectaient la justice et la loi. Il précisera qu'ils n'étaient pas «en contradiction avec le jugement» de la HCC avant la levée de la séance. Cette déclaration de M. Katatni est similaire à celle de la présidence égyptienne. Cette dernière estime que le décret de M. Morsi «ne contredit ni ne contrevient au jugement de la Cour constitutionnelle» car ce dernier peut ne pas être appliqué dans «l'immédiat». La Cour, qui avait jugé, le 14 juin, l'Assemblée invalide en raison d'un vice juridique dans la loi électorale, a rejeté le décret présidentiel, en affirmant dans un communiqué que ses jugements étaient «définitifs et contraignants pour toutes les institutions de l'Etat». La HCC a assuré, dans ce sillage, qu'elle «n'était partie prenante dans aucune lutte politique» et que sa mission était de «protéger le texte de la Constitution». Elle est néanmoins accusée par plusieurs groupes et hommes politiques d'être biaisée. Le nouveau président égyptien a ordonné, dimanche dernier, par décret, le rétablissement du Parlement, en invitant l'Assemblée à se réunir de nouveau et à exercer ses prérogatives. L'Assemblée a annoncé lundi qu'elle tenait une réunion le lendemain. Les députés des Frères musulmans et des fondamentalistes salafistes, qui dominent l'Assemblée, étaient présents, mais les élus d'autres partis, notamment libéraux, ont boycotté la session, certains qualifiant le décret de M. Morsi de «coup d'Etat constitutionnel». Cette même accusation était portée par les Frères musulmans à l'encontre des militaires, lorsque ces derniers ont décidé de dissoudre le Parlement la veille du second tour de la présidentielle. Ils ont dénoncé le Csfa qui a commis «ce coup d'Etat constitutionnel» pour s'adjuger le pouvoir législatif. Pour eux, l'Assemblée du peuple restait valide et gardait ses prérogatives. Après la dissolution de l'Assemblée, les militaires, au pouvoir depuis la chute de Moubarek en février 2011, ont récupéré le pouvoir législatif, provoquant la colère de ceux qui voulaient les voir sortir de la politique. Les Etats-Unis, qui observent la scène politique égyptienne avec un grand intérêt, ont appelé les dirigeants égyptiens au «respect des principes démocratiques» pour sortir de cette confrontation, et la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a réclamé, hier, un «dialogue intensif entre tous les protagonistes». «Les Egyptiens devraient obtenir ce pour quoi ils se sont battus et ceux pour qui ils ont voté, à savoir un gouvernement élu qui prend des décisions pour que le pays avance», a déclaré Mme Clinton, qui doit rencontrer M. Morsi ce week-end. Les Frères musulmans, rivaux historiques des militaires qui dominent le système politique depuis la chute de la monarchie en 1952, ont annoncé qu'ils manifesteraient dans la journée «pour soutenir les décisions du président et le rétablissement du Parlement». G. H./Agences