«Notre but est d'aller vers une professionnalisation du salon et nous sommes déterminés à le faire.» C'est en ces termes que le président du comité d'organisation du Salon international du livre d'Alger (SILA), Ahmed Boucenna, a exprimé la volonté du comité de sortir le Salon du livre de l'anarchie qui l'a toujours caractérisé et l'a transformé en souk. Les organisateurs entendent «développer un partenariat d'échanges entre les éditeurs et rapprocher les différentes cultures pour promouvoir l'industrie du livre», ajoutera-t-il. Aussi l'édition 2008 du SILA a-t-elle été «réservée uniquement aux éditeurs dont le nombre s'élève à 400 représentants de 23 pays. Il n'y aura que trois acteurs sur la plate-forme : l'auteur, l'éditeur et le lecteur», avait assuré M. Boucenna en soulignant que ces mesures visent à «mettre fin à l'anarchie dans le domaine du livre». «Il n'y aura plus de soldeurs au sein des stands», a-t-il promis. Pour ce faire, les maisons d'édition qui ont participé au SILA ont été informées qu'elles ne pouvaient exposer que 100 exemplaires de leurs nouvelles publications, 50 exemplaires pour les œuvres parues au cours des cinq dernières années et seulement 5 exemplaires pour les anciennes publications. Ainsi, les exposants ne pourront plus utiliser le SILA comme comptoir commercial pour déstocker et écouler leurs invendus, comme ils l'avaient toujours fait. Les importateurs et les libraires, n'étant pas des «producteurs de livres» mais juste des vendeurs, sont eux aussi exclus. Evidemment, ces nouvelles mesures et les restrictions et interdictions qu'elles énonçaient ne pouvaient faire l'unanimité et agréer à tout le monde, surtout pas les concernés par l'exclusion qui seront les premiers às'inscrire contre cette décision. «Sincèrement, je ne comprends pas la démarche. Je concède l e qualificatif de “commerçant” dont on nous affuble, soit, mais un commerçant cherche à vendre. Or, pour vendre, il faut connaître la demande, les goûts du lectorat et y répondre», dira un importateur. A quelques nuances près, ce sera l'avis d'autres importateurs et libraires qui ont vu d'un mauvais œil leur exclusion du SILA 2008. De leur côté, certains éditeurs ont, eux, dénoncé la limitation du nombre d'exemplaires de livres à exposer. «Je ne comprends pas pourquoi on nous a imposé cette limitation. Notre maison d'édition n'est pas concernée car toutes nos publications se vendent durant l'année.» Pour d'autres maisons d'édition moins importantes, une telle limitation équivaut à une disqualification, nous expliquera un éditeur algérien. Ce ne sera pas l'avis du responsable d'une maison d'édition étrangère qui, lui, saluera la décision de professionnaliser le SILA qui est «intervenue au moment opportun pour faire de ce salon un véritable rendez-vous professionnel. Il est vrai que c'est un coup dur pour les éditeurs qui ne sont pas habitués à participer à de véritables salons du livre, mais je pense que c'est le seul moyen de rétablir l'ordre», dira-t-il. Il est vrai qu'il fallait bien commencer un jour à mettre de l'ordre dans l'organisation du SILA mais, même si on n'en est qu'aux premiers pas vers la professionnalisation, on pouvait s'éviter des trébuchements qui ont donné à la démarche une allure désordonnée. La censure injustifiée de livres, la déprogrammation de rencontres, le bricolage et l'improvisation dans la conception des stands et de l'exposition doivent être bannis si on veut avoir un véritable salon du livre, dans la forme. Quant au fond, il faut tout simplement faire du SILA le rendez-vous des professionnels du livre qu'il doit être, et non de commerciaux les représentant. Evidemment, un salon qui contribuerait à la promotion du livre et de la lecture est aussi le produit d'une politique du livre digne de ce nom. H. G.