De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi
A la faveur des décrets introduits par le ministère de la Culture qui a opté pour l'institutionnalisation des manifestations culturelles notamment internationales, Constantine a vu son programme événementiel, puisqu'elle accueille plusieurs rendez-vous artistiques dont les festivals internationaux les plus connus qui sont ceux du malouf, du jazz et d'El inched qui a brillé lors de sa troisième édition, organisée en novembre dernier, avec la production de plusieurs formations étrangères qui ont donné à ce genre de chant, souvent enserré dans son contexte religieux, une dimension artistique. S'ajoute à ces festivals les rencontres thématiques sur la poésie féminine et les colloques sur Reda Houhou, qui se tiendra cette année du 29 au 31 janvier, et sur Malek Haddad, sans oublier le théâtre pour enfant et maghrébin, tandis que la troisième édition de Yennayar ouvrira ses portes du 10 au 13 du mois en cours, avec la participation de 10 wilayas pour mettre la lumière sur la culture amazigh. Ces manifestations se tiennent à des intervalles qui permettent de couvrir l'année. A titre d'exemple, le festival du jazz est organisé au printemps alors que le malouf est programmé en automne. Il faut souligner que cette programmation alternée n'est pas seulement due à un sens aigu de l'organisation, mais elle est aussi imposée par l'indisponibilité des scènes. Les productions artistiques sont programmées soit au niveau du théâtre régional soit au palais de la culture Malek-Haddad, les deux seuls espaces pouvant accueillir des spectacles dans des conditions acceptables, en attendant la réalisation de la grande salle de spectacles promise, projet inscrit au programme des autorités locales. Mais devant le peu d'avancées enregistrées, certaines voix demeurent sceptiques quant à la réalisation d'une structure qui pourrait faire honneur à une ville qu'on dit d'art et de culture. «Un travail en amont est impératif pour inculquer aux citoyens la valeur des spectacles et leur impact», note un gestionnaire de la culture à Constantine. La ville millénaire alterne ses festivals et autres rendez-vous culturels. Mais entre ces manifestations se trouve un vide dont le «remplissage» demeure aléatoire et souvent incohérent, au point de plonger la population dans une période «d'acculturation». Il y a bien des activités qui tentent de casser l'ennui en élargissant le spectre notamment au patrimoine local et national. Nous citerons les semaines culturelles inter wilaya, initiées par le ministère de la Culture, et les quelques initiatives des associations locales versées dans les expressions culturelles Constantinoises (chant, art culinaire et artisanat). Toutefois, ces productions n'enregistrent que peu d'intérêt en matière d'audience. Les citoyens les voient comme des actions de remplissage souvent vouées à l'échec. «Toutes les semaines culturelles se ressemblent en matière d'audience. L'idée de vulgariser le patrimoine sous toutes ses formes est bonne, mais le public ne s'y intéresse pas pour autant. Il est nécessaire de recadrer cette initiative pour qu'elle atteigne son but», commente un citoyen lors de la tenue de la Semaine culturelle de la wilaya de Béjaïa, au centre Mohamed El Aïd- El Khalifa. Ainsi, ces «interludes» intéressent peu la population, car les programmes proposés sont quasi identiques avec peu d'innovations. «Parfois, on refuse les projets similaires afin d'éviter des ‘‘redites'' sur scène. Une situation délicate pour le secteur de la culture, dans la mesure où certaines parties voient dans ce tri une sorte d'exclusion», avouera le directeur de wilaya de la culture. Maintenir un équilibre culturel et artistique à longueur d'année tout en drainant la foule reste le défi pour les animateurs et les détenteurs de projets. La scène locale, et même nationale, est souvent vide. Et c'est là le défi : alimenter les vides entres les pics événementiels institutionnalisés et budgétisés.