La dernière sortie du président syrien, Bachar Al Assad, bat en brèche le discours propagandiste des médias occidentaux et des pays du Golfe selon lesquels le régime vivait ses dernières heures. Le président syrien s'est permis de proposer un plan politique, une solution bien évidemment rejetée par l'opposition, exigeant son départ comme préalable à toute solution au conflit sanglant qui déchire le pays depuis 21 mois. Dans sa première allocution après sept mois, Assad a assuré encore une fois que le conflit qui déchire son pays n'opposait pas le pouvoir et l'opposition mais «la patrie et ses ennemis» qui souhaitent sa partition. L'intervention de Bachar Al-Assad ne semble pas avoir provoqué d'acquiescement au sein de la nébuleuse constituant l'opposition politique et armée. Le préalable du départ du président Assad est toujours brandi pour justifier un refus de dialogue avec le régime en place. Ce dernier arrive à résister grâce à une adhésion d'une partie de la population pour qui la chute du régime signifierait une déflagration généralisée qui n'épargneraient aucunes des communautés qui constituent le tissu social de la Syrie. Assad a appelé à un dialogue pour lequel il a affirmé ne pas avoir trouvé jusqu'à présent de partenaire. Depuis qu'a éclaté en mars 2011 une révolte populaire devenue guerre civile, dans le sillage du printemps arabe qui a ébranlé un certains nombre de pays, le régime syrien s'est refusé de dialoguer avec ses contradicteurs. Aujourd'hui, Assad propose un plan en trois étapes qui commencera par un engagement des pays finançant l'opposition armée à contenir leur action. Après s'ouvrira «une conférence de dialogue national» qui devrait rédiger une «Charte nationale» soumise à référendum, tandis qu'un nouveau Parlement et un nouveau gouvernement émergeront des urnes. L'opposition a aussitôt rejeté ce plan accusant le chef d'Etat de vouloir choisir ses interlocuteurs et de chercher à se maintenir au pouvoir.
Logique de survie L'opposition reste accrochée au préalable de voir Assad quitter le pouvoir dans une configuration difficile à imaginer dans l'état actuel des événements. Assad avait prononcé son dernier discours le 3 juin devant le Parlement, et s'était depuis exprimé dans des médias turc puis russe, martelant à chaque fois que son pays faisait face à une véritable guerre menée de l'étranger. En effet l'interventionnisme des pays occidentaux de la Syrie, de l'Arabie saoudite, du Qatar a plutôt décrédibilisé l'opposition constituée de tendances diverses. Les propositions du président Assad interviennent alors que l'émissaire de l'ONU, Lakhdar Brahimi, tente tant bien que mal de trouver un début de solution dans un maelstrom indescriptible. C'est le langage des armes qui, pour l'heure, étouffe de son bruit toute tentative de solution pour sauver la Syrie. Selon des observateurs de la question syrienne, le président Bachar Al-Assad s'estime assez fort militairement pour se montrer intraitable avec une opposition qui s'est particulièrement fourvoyée avec des forces externes. Après 21 mois de guerre interne ayant fait plus de 60 000 morts selon l'ONU, et des destructions incalculables, la situation reste toujours au point du statu quo sur le plan politique. Le régime syrien, dans une logique de survie, ne gagnera pas la guerre mais il sait qu'elle sera encore longue et coûteuse. Assad est inflexible mais pourrait accepter l'idée d'un véritable processus de transition politique. L'émissaire international, Lakhdar Brahimi, qui a appelé fin décembre à Damas à la formation d'un gouvernement de transition aux pleins pouvoirs avant des élections, croit encore à une esquisse de début de sortie de crise. L'opposition syrienne de son côté gagnerait à dépasser le préalable de départ de Bachar Al-Assad et rentrer en négociation avec un régime syrien fortement affaibli. Mais il faudrait d'abord que les parrains de l'opposition politique et armée acceptent cette option qui, pour l'heure, ne cadre pas avec des desseins futurs. La guerre qui détruit la Syrie reste indécise malgré les tentatives de trouver une issue à une tragédie qui pourrait, in fine, emporter bien des acteurs régionaux dans son sillage. Les deux parties en conflit, le régime et l'opposition, sont figées dans leur position tandis que la machine de guerre et de la destruction ruine le pays et l'enfonce davantage dans le chaos. M. B.