Photo : M. Hacène Par Amirouche Yazid Au centre des débats depuis son éclatement au grand jour dans les médias, l'affaire Sonatrach 2 est appelée à connaître «une cadence accélérée», selon le procureur général de la Cour d'Alger, Belkacem Zeghmati. Cette accélération dans le traitement judicaire de l'affaire, qui a éclaboussé des figures du pouvoir comme elle a choqué des pans entiers de citoyens, dépend des résultats auxquels parviendront les commissions rogatoires internationales lancées par la justice algérienne. Pour le procureur général, «l'information judiciaire connaîtra, sans nul doute, une cadence accélérée dès réception des résultats des commissions rogatoires internationales par le juge d'instruction et la convocation ou l'émission de mandats de justice à l'encontre de toute personne impliquée sera requise». Il a ajouté que «l'affaire Sonatrach 2 est le prolongement de celle de Sonatrach 1, dont l'information judiciaire vient d'être achevée avec le renvoi des prévenus devant le tribunal criminel selon l'arrêt rendu par la chambre d'accusation de la Cour d'Alger, en date du 30 janvier 2013». Pour ce qui est du dossier, le procureur Belkacem Zeghmati a indiqué que «les faits dont est saisi le juge d'instruction consistent en les délits de corruption, trafic d'influence, abus de la fonction et blanchiment d'argent conformément aux dispositions de la loi 06/01 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption et celles du Code pénal». Le procureur général tiendra à souligner que l'action publique a été enclenchée en Algérie «à la suite d'informations de diverses commissions rogatoires internationales parvenues aux autorités judiciaires algériennes de la part de ses homologues étrangères». Raison prudentielle pour lui de mettre en évidence l'impératif de passer par une vérification minutieuse des informations. «Le juge d'instruction en charge du dossier devait, en premier lieu, s'assurer du bien fondé de ces informations, de leur exactitude et de leur crédibilité», soutient le magistrat. Le juge d'instruction aura ainsi à vérifier les informations, dont celle citant Chakib Khelil, ancien ministre de l'Energie, dans une affaire de pots-de-vin versé par Saipem, une filiale du Groupe italien ENI. En plus de l'ex-ministre, c'est le nom de Farid Bedjaoui, un intermédiaire par ailleurs présent dans des contrats signés en Algérie par le Canadien SNC Lavalin, qui est cité. M. Zeghmati explique, à ce propos, que «si, certes, l'identité des personnalités algériennes, ministre ou cadres de la Sonatrach, visées dans cette affaire, a été clairement portée à la connaissance de l'opinion publique par les organes d'information nationaux et étrangers, la loi algérienne n'autorise pas l'autorité judiciaire à le faire avant leur inculpation officielle». On apprend à présent que «le juge d'instruction a sollicité l'accord des autorités judiciaires italiennes en vue de se déplacer personnellement à Milan (Italie) dans le but de rencontrer ses collègues italiens en charge du dossier ouvert à leur niveau pour des faits similaires». Le procureur général a révélé, à ce propos, que «le juge en charge du dossier a accompli toute une série d'actes au niveau national avec le concours de la police judiciaire saisie par commissions rogatoires, dont certaines furent exécutées et d'autres en phase de l'être». Ces détails peuvent vraisemblablement conforter l'idée du procureur général, selon laquelle l'affaire va connaître «une cadence accélérée». Cette cadence va-t-elle pour autant déboucher sur des verdicts justes ou se contentera-t-elle de désigner des lampistes comme c'était le cas dans le procès Khalifa sans Khalifa ? Pour l'heure, il semble que la justice algérienne est devant une partie cruciale. D'autant plus qu'elle a à traiter une affaire «internationalisée» de fait avec ses implications sans frontières. Il convient de rappeler que le même Chakib Khelil avait échappé à une mise en cause judiciaire dans l'affaire Sonatrach 1. Les révélations italiennes vont-elles jusqu'à changer les mœurs de la justice algérienne qui n'inspire pas confiance aux yeux des justiciables ? La réactivation du procès Khalifa, bâclée en 2007 en protégeant des responsables de l'escroquerie du siècle, annonce-t-elle un nouvel âge du pouvoir judiciaire en Algérie ? Tant d'interrogations que peut légitimer l'évolution actuelle de l'affaire et les soupçons qui vont avec. En attendant la suite du feuilleton, on peut noter ce retour à la communication chez nos autorités. Peut être que des révélations à Milan libèrent la communication à Alger…