L'initiation aux arts et à la culture de manière générale est réduite à sa portion congrue dans le système scolaire algérien. Peu d'intérêt est accordé à cette matière dans les programmes officiels. Les enseignants de l'animation culturelle, quand ce poste est doté, se plaignent du manque de moyens didactiques, de la réduction de la plage horaire, se résumant généralement à une petite séance hebdomadaire, et de l'indifférence de l'administration. Dans l'école primaire d'autrefois, le dessin, par exemple, avait autant d'importance que la lecture, le calcul, la dictée ou la dissertation. Le manuel scolaire d'alors regorge de beaux textes littéraires. On y trouve des extraits soigneusement choisis dans les classiques de la littérature universelle et dans les œuvres des grands écrivains algériens. Dans le système pédagogique de cette même époque, on avait quotidiennement des cours de conversation où les élèves animaient de petites représentations afin d'apprendre à bien prononcer et à parler correctement. Ce n'était pas la grande immersion dans le monde si vaste de l'art, mais un élève studieux ne manquera pas de s'y laisser séduire. Tout cela a été abandonné. Les réformes successives des programmes se caractérisent, toutes, par une espèce de «déculturation» au nom d'une thèse qui prône l'épanouissement des facultés intrinsèques de chaque apprenant. Depuis la nuit des temps, l'homme se perfectionne constamment à partir de l'héritage qui lui est légué par ses prédécesseurs. L'avantage de l'humain sur l'animal se résume justement à cette capacité de transmission des expériences et des idées à ses descendants. Substrat qui permet à ces derniers d'aller encore plus loin et d'accroître encore ce précieux legs. L'histoire des sciences et techniques nous enseigne que le développement des valeurs innées est indissociable d'une bonne connaissance des idées antérieures. On ne peut écrire bien, si on ne fait pas de bonnes lectures. Un bon livre inspire toujours de nouvelles idées. Tout cela pour louer les vertus du système scolaire classique qui n'a, malheureusement, plus cours. En dehors de l'école, les établissements culturels, qu'ils soient sous la tutelle des communes, du ministère de la Culture ou celle de la Jeunesse et des sports, n'accordent pas, non plus, d'attention particulière à la formation ou à l'initiation des enfants. Même quand une louable initiative est lancée, elle est souvent de courte durée faute de budget conséquent et de suivi adéquat. Les Maisons de culture, les centres culturels et les Maisons de jeunes n'arrivent même pas à garantir une programmation régulière pour fidéliser le public. Les ateliers de peinture, de musique ou de théâtre, lancés conjoncturellement, peinent à s'inscrire dans la durée.Quant aux initiatives du mouvement associatif, censées être complémentaires, elles ne couvrent pas l'énorme déficit en la matière. On trouve, en effet, des collectifs culturels qui offrent de petites formations et des initiations diverses pour encourager les vocations des amateurs. Ciné-clubs, ateliers du film documentaire, troupes autonomes de théâtre, concours de chant et de musique, encadrement de petites divisions de dessins et de peinture, à chaque association son concept propre. Mais faute d'appui conséquent, ces entreprises sont toutes aussi limitées et exclusivement réservées à des candidats qui ont déjà un certain bagage dans un domaine donné. L'enfance n'y trouve pas souvent sa place.On doit absolument réfléchir à tout cela, car l'avenir, qui arrive toujours trop vite, se conjugue, désormais, au présent. C'est aujourd'hui que se conçoivent les réalisations de demain. La génération montante est déjà là, et on ne saurait attendre pour la préparer aux défis qui sont les siens. Cette «hantise» se pose avec d'autant plus d'acuité lorsqu'il s'agit d'art et de culture. K. A.