Alors que l'Iran a fait de ses menaces vaseuses contre Israël un leitmotiv sans lendemain, Barack Obama a promis à Israël de «faire ce qu'il (fallait)» pour empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire et l'a exhorté à choisir la paix avec les Palestiniens, lors d'un discours plus académique que politique devant des centaines de jeunes israéliens à Jérusalem. «L'Iran ne peut pas obtenir d'arme nucléaire. C'est un danger qui ne peut pas être endigué», a estimé M. Obama, dans une adresse directe au «peuple d'Israël». «Toutes les options sont sur la table pour atteindre nos objectifs, l'Amérique fera ce qu'il faut pour empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire», a-t-il ajouté, fréquemment interrompu par des applaudissements nourris mais aussi par un jeune protestataire arabe israélien qui a été expulsé. «Etes-vous ici pour la paix ou pour donner à Israël davantage d'armes pour tuer les Palestiniens ?», a lancé le jeune homme, selon des témoins. «Les Palestiniens doivent reconnaître qu'Israël sera un Etat juif, et que les Israéliens ont le droit d'insister sur leur sécurité», a affirmé M. Obama, estimant que la paix était «la seule voie vers la vraie sécurité». «Les Israéliens doivent, eux, reconnaître que la poursuite de la colonisation est contre-productive pour la cause de la paix et qu'une Palestine indépendante doit être viable», a-t-il dit. «Le droit du peuple palestinien à l'autodétermination et à la justice doit être reconnu», a insisté M. Obama, qui a rencontré jeudi des jeunes Palestiniennes à Al-Bireh, localité jumelle de Ramallah (Cisjordanie). «A parler avec elles, elles n'étaient pas si différentes que mes filles», a-t-il dit en s'écartant de son discours. «Mettez-vous à leur place», a-t-il repris en s'adressant aux jeunes Israéliens dans la salle. «Il n'est pas juste qu'un enfant palestinien ne puisse grandir dans son propre Etat, qu'il ait à vivre avec en présence d'une armée étrangère qui contrôle les mouvements de ses parents à chaque instant». «Il n'est pas juste que la violence des colons contre les Palestiniens reste impunie», a-t-il ajouté. «Il y aura beaucoup de voix pour dire que ce changement n'est pas possible. Mais souvenez-vous qu'Israël est le pays le plus puissant de la région. Israël a le soutien inébranlable du pays le plus puissant au monde», a fait valoir le président américain. En s'adressant aux Israéliens, Obama ne parle pas en tant que président des Etats-Unis qui «exige» la paix, mais comme un conseiller qui donne son avis sur une alternative de paix que seuls les Israéliens décident ou refusent. Pourtant, dans les faits, les Etats-Unis financent Israël, le dote de technologies et de moyens pour réprimer les Palestiniens, mais ne font rien en échange pour qu'Israël accepte enfin d'engager un réel processus de paix avec les autorités palestiniennes. Le coup de gueule du jeune arabe d'Israël se justifie et s'explique par la nature même du discours d'Obama. D'ailleurs, Benjamin Netanyahu, dans un bref message, a remercié M. Obama pour son «soutien sans réserve à l'Etat d'Israël» et a dit partager sa vision «sur la nécessité de faire avancer une paix qui garantisse la sécurité des citoyens d'Israël». Et qui va garantir la sécurité des Palestiniens qui n'ont ni Etat, ni une armée pour faire face aux agressions quotidiennes d'une puissance militaire régionale qui dispose d'armes de destruction massive ? En dépit de ces réponses diplomatiques et hypocrites de Netanyahu, Naftali Bennett, chef de file de la droite nationaliste religieuse, très proche des colons et désormais ministre du Commerce et de l'Industrie, trouve qu'un Etat palestinien n'était «pas le bon chemin», arguant qu'«un peuple (juif) ne saurait être un occupant dans son propre pays».
La paix, que des mots Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a insisté, samedi dernier, auprès du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et du président palestinien Mahmoud Abbas sur la «nécessité» de faire la paix entre Israéliens et Palestiniens, a indiqué un diplomate américain. Kerry, qui accompagnait cette semaine le président américain Barack Obama en Israël, dans les Territoires palestiniens et en Jordanie, est resté seul samedi dernier à Amman pour y voir le président Abbas, avant de retourner dans la soirée à Jérusalem pour s'entretenir avec M. Netanyahu. Les deux rencontres ont été qualifiées d'«utiles» par un responsable du département d'Etat, qui s'adressait dans la nuit de samedi à dimanche derniers à Amman aux journalistes accompagnant le chef de la diplomatie américaine. «Lors des deux entretiens, le ministre Kerry a répété que la paix n'était pas seulement possible, mais également nécessaire pour l'avenir des peuples israélien et palestinien», a expliqué le diplomate américain. Selon la radio publique israélienne, MM. Netanyahu et Kerry ont eu un tête-à-tête, suivi par une rencontre élargie aux équipes de négociateurs des deux pays et à laquelle devait assister la nouvelle ministre israélienne de la Justice, Tzipi Livni, chargée des pourparlers de paix avec les Palestiniens. Avant d'arriver à Jérusalem, M. Kerry s'était entretenu pendant près d'une heure avec M. Abbas, au domicile de ce dernier dans la capitale jordanienne, avait indiqué l'ambassadeur palestinien en Jordanie, Atallah Khaïri. D'après ce diplomate, l'entretien a porté sur les moyens de relancer les négociations de paix entre Israël et les Palestiniens, suspendues depuis septembre 2010. M. Abbas a réaffirmé devant le secrétaire d'Etat américain «le danger que représente la colonisation israélienne pour le processus de paix» et souligné «la nécessité de libérer les prisonniers palestiniens» détenus par Israël, a ajouté l'ambassadeur palestinien. Au cours de sa première tournée en Israël et dans les Territoires palestiniens, qui s'est achevée samedi dernier à Amman, le président Obama a exhorté Israël et les Palestiniens à choisir la paix, sans toutefois tracer de voie pour parvenir à une solution à deux Etats. Il a appelé «les Palestiniens à reconnaître qu'Israël (serait) un Etat juif» et, s'adressant aux Israéliens, il dira qu'«une Palestine indépendante (devait) être viable». Mais s'il a critiqué la colonisation juive, le président américain a toutefois estimé que la question devrait être réglée lors de pourparlers de paix et non par un gel au préalable de la construction, comme l'exigent les Palestiniens. Ce préalable est catégoriquement rejeté par Abbas, qui a, jusqu'à présent, exclu une reprise des négociations sans un arrêt de la colonisation sous toutes ses formes. Obama impose des préalables aux Palestriniens et cède aux chantages des Israéliens, faisant de l'agresseur une victime entourée de pays belliqueux. C'est pour cette raison qu'une réconciliation entre la Turquie et Israël était importante. A ce propos, John Kerry a estimé, samedi dernier, que le règlement du contentieux israélo-turc scellé vendredi dernier, sous les auspices du président Barack Obama, au sujet de la flottille pour Ghaza en 2010, contribuerait à la paix au Proche-Orient. «La réconciliation entre Israël et la Turquie est un développement très important qui permettra de faire avancer la cause de la paix et de la stabilité dans la région. Le Premier ministre (israélien Benjamin) Netanyahu et le Premier ministre (turc Recep Tayyip) Erdogan ont beaucoup de mérite d'avoir rendu cela possible», s'est félicité M. Kerry dans un communiqué transmis à la presse qui l'accompagne à Amman. «Nous comptons sur une mise en œuvre rapide de l'accord (entre Israël et la Turquie) et sur la normalisation complète de leurs relations afin qu'ils puissent œuvrer tous deux à faire progresser leurs intérêts communs», a encore plaidé le chef de la diplomatie américaine. Le chef du gouvernement israélien a présenté vendredi dernier ses excuses à son homologue turc pour la mort de neuf Turcs lors d'un assaut d'Israël, le 31 mai 2010, contre une flottille qui tentait de briser le blocus israélien de Ghaza gouverné par le Hamas. Le règlement de ce contentieux, qui empoisonne les relations israélo-turques depuis près de trois ans, est l'ultime succès diplomatique arraché par le président Obama lors de sa visite en Israël. Après avoir accepté les excuses d'Israël, M. Erdogan a annoncé qu'il envisageait d'ici à la fin du mois d'avril de se rendre à Ghaza et en Cisjordanie. «Tout cela, ce serait bien sûr pour aider le processus» de levée du blocus israélien de la bande de Ghaza, un des engagements pris par M. Netanyahu, a indiqué M. Erdogan.
L'apartheid israélien Au-delà de la courtoisie des responsables palestiniens, les populations et la société civile palestiniennes ont été déçues de la visite d'Obama et de son discours essentiellement axé sur le soutien inconditionnel à Israël. Alors qu'en Israël, Obama a visité les symboles de l'Etat hébreu, en Cisjordanie, il a ignoré les symboles palestiniens. Le député indépendant, Moustapha Barghouthi, s'est déclaré «navré que le président Obama ne visite pas la tombe du président Arafat» à Ramallah, lors de sa rencontre avec le dirigeant palestinien Mahmoud Abbas. «Qu'il soit d'accord ou non avec le président Arafat, c'était le symbole et le président du peuple palestinien», a affirmé M. Barghouthi, regrettant «un geste négatif, d'autant plus que le président Obama se rendra sur la tombe de Yitzhak Rabin», signataire des accords d'Oslo avec Yasser Arafat. Le programme du président américain égrène les sites incontournables de l'histoire israélienne : musée d'Israël, les tombes de Theodor Herzl, fondateur du sionisme, et du Premier ministre assassiné Rabin, puis au mémorial de la Shoah. M. Barghouthi a critiqué «cette visite au musée d'Israël, parce qu'il contient des pièces volées dans les Territoires palestiniens, comme les manuscrits de la mer Morte», ce que dément l'établissement. Il a également déploré que le président américain ait décliné des demandes de rencontrer les familles de Palestiniens détenus par Israël. «Plusieurs familles de prisonniers ont demandé au consulat américain d'organiser une rencontre avec le président Obama, mais il a refusé semble-t-il pour des raisons protocolaires», a confirmé le ministre des Prisonniers, Issa Qaraqaë. Le négociateur palestinien Nabil Chaath a regretté dans un article que «malheureusement le président Obama ne soit pas en mesure de visiter la Palestine plus de quelques heures», citant Ramallah, où il a passé cinq heures, puis la basilique de la Nativité à Bethléem (Cisjordanie). «Cela aurait été une excellente occasion pour lui de voir la réalité vingt ans après le début du processus de paix», souligne M. Chaath, rappelant la fermeture des institutions palestiniennes à Jérusalem-Est occupé et annexé. «Il pourrait aussi voir des routes séparées, un exemple de l'une des pires combinaisons possibles : l'apartheid sous une occupation belliqueuse», précise-t-il, en référence aux routes réservées aux colons juifs. «La ségrégation raciale, y compris dans les transports publics, a été une période sombre de l'histoire des Etats-Unis. Cela se passe aujourd'hui en Palestine», accuse Nabil Chaath. Dans un article publié par le New York Times, Moustapha Barghouthi rappelle qu'il y a une vingtaine d'années, quand lui-même s'engageait dans le processus de paix avec Israël, «un jeune avocat des droits civiques mobilisait la communauté afro-américaine à Chicago au début de sa carrière politique», qui le conduirait à la Maison-Blanche. Lors d'une manifestation pour la réouverture d'une rue fermée à la circulation des Palestiniens, mercredi dernier à Hébron, en Cisjordanie, plusieurs dizaines de personnes arboraient des masques à l'effigie de Barack Obama et des photos de Martin Luther King, brandissant une banderole «Arrêtez l'apartheid». Les médias officiels palestiniens consacraient de longues heures d'antenne en récriminant également le menu des réceptions en l'honneur du président américain en Israël, où figurent des spécialités régionales présentées comme de la cuisine israélienne. «Ils lui servent du hoummous, notre plat traditionnel», maugrée Achraf al-Najjar, 30 ans, venu défiler à Ramallah contre la visite du président américain, «Israël nous a tout volé, même la nourriture». Manifestement, ce qui intéresse les Etats-Unis, c'est la sécurité d'Israël et sa puissance et non une paix juste au Moyen-Orient. La visite d'Obama en Israël aura été, à tous les points de vue, au profit d'Israël. Quant aux Palestiniens, ils sont condamnés à la réclusion solitaire à perpétuité face à des arabes plus intéressés par le renversement du régime de Bachar Al Assad que par les malheurs de la Palestine. Quant à Al-Qaïda, elle proclame le jihad partout sauf en Palestine. N'est-ce pas étrange ! A. G.