Hassiba Boulmerka, Nouria Bénida Merrah ou encore Soraya Haddad font partie de ces femmes qui ont marqué l'histoire du sport national. Elles se sont transcendées et ont, surtout, bravé tellement d'obstacles pour honorer l'Algérie lors des plus grandes manifestations sportives. Les performances ne se résument, heureusement, pas seulement qu'à ces trois athlètes puisque d'autres femmes ont brillé collectivement à l'image de notre équipe nationale de volley-ball, seule sélection digne de ce nom ayant arraché l'honneur de représenter le pays lors des derniers Jeux Olympiques de Londres-2012 dans les sports collectifs. Pour en arriver là, ces dames ont dù consentir beaucoup de sacrifices dans un univers où la gent féminin n'a pas une réelle place, une place concrète dans la pratique du sport. Peu valorisée, quand elle n'est pas marginalisée, la femme doit passer plusieurs écueils pour réaliser des rêves qui ne sont pas à portée de main et des succès qui ont une saveur particulière une fois réalisés. La femme algérienne se surpasse pour s'imposer et se faire une place dans un sport algérien à part et pas toujours tendre mais qui a toujours, souvent, pu compter sur ses «rebelles» qui l'ont porté haut dans divers manifestations depuis la réforme sportive en 1977 qui a permis au sport féminin, chez nous, de prendre son vrai départ. Une véritable impulsion qui a vu par la suite, émerger du lot, les premières championnes qui ont montré la voie aux femmes sportives d'aujourd'hui. Seulement, la pratique du sport féminin connaît toujours autant de difficultés à être acceptée dans certaines régions malgré cette poussée enregistrée après le sacre historique de Hassiba Boulmekra lors des JO-1992 à Barcelone (Espagne). La médaille d'or olympique de celle qui deviendra par la suite championne du monde à deux reprises, une fois à Londres, en 1994, puis une seconde fois à Goteborg (Suède), un an plus tard, a beau changé la conception de la société envers la pratique du sport féminin mais cette «acceptation» se limite toujours à la capitale et à quelques autres grandes villes du pays.
Les moyens et les mentalités comme barrières Ces femmes sont généralement issues des grandes villes dans lesquelles elles trouvent des infrastructures sportives plus ou moins adéquates mais surtout issues d'un milieu favorable où les parents sont sensibles à l'émancipation de la femme. Les «chanceuses» ont bénéficié d'une véritable socialisation sportive dans un pays où la fille qui ne peut pas aller faire du sport à côté de chez elle, n'aura pas de carrière sportive et donc aucune chance de briller un jour. Un véritable problème de mentalités ou de traditions, limite une discrimination sociale qui s'étale fort logiquement au poste de direction et de hautes responsabilité. En effet, on ne trouve quasiment pas de femmes à la tête d'une direction technique nationale ou des noms au féminin entrainant dans le de haut niveau, même pour les équipes de filles. Ainsi, les femmes ne représentent que 12% de la promotion de cadres du sport sortant chaque année de l'Institut supérieur de la technologie du sport (Ists). Un pourcentage qui reste considérablement faible comparé à d'autres pays où la compétence est la seule jauge pour accéder à l'élite. L'écart est flagrant donc entre l'homme et la femme comme le démontre cette statistique. Beaucoup de facteurs rentrent en considération et pèsent de tout leur poids dans cette conception fermée de la société. Tout d'abord, c'est une question de tradition lorsqu'on sait que cette dernière confine la femme dans le modèle du dedans, dans l'espace domestique tandis que les hommes ont accès aux espaces extérieurs, ceux du sport notamment, au modèle de modernité. Ce confinement pèsera par la suite dans la formation voire le choix du sport. La femme se retrouve à s'entraîner dans des milieux stables et dépourvus de danger. On la retrouve logiquement, ou presque, dans des espaces délimités, protégés tels les bassins de natation ou les terrains d'athlétisme mais aussi à pratiquer les sports collectifs où elles peuvent se fondre et rester anonymes. Au milieu d'une socialisation sportive «poussive», certaines réussissent malgré tout à s'émanciper et accaparent une place parmi l'élite. A l'image de Soraya Haddad qui s'est faite un nom dans un sport de combat. Loin de la grâce attitude, la finesse, c'est les muscles et la force de la native de la Béjaouie qui lui ont permis d'écrire l'une des plus belles pages de l'Algérie du sport. En 2008, elle entrera dans la légende en décrochant la médaille de bronze en judo à Pékin lors des olympiades. Dans un sport considéré comme «viril», la native d'El-Kseur s'est faite une belle réputation et un nom. Pour cause, cette connotation empêche le «sexe faible» d'émerger dans certains sports. Les judokates, l'Algérie en a connu comme Salima Soukari qui a, elle aussi, marqué le judo de son empreinte ou la toute jeune Sonia Asselah qui était parvenue à participer aux derniers JO. Même si cette dernière n'a pas vraiment brillé, le fait de percer et de s'imposer dans une activité dite masculine constitue déjà un exploit. Etonnamment, dans des statistiques communiquées par le MJS en 2010, La «dominante» des données fait apparaître que la gent féminine a tendance à s'orienter vers les sports de «combats». En effet, près de 11 000 femmes, sur les 55 000 licenciées, pratiquent une discipline liée à la «self défense», par souci «sécuritaire», comparativement à un passé récent où la femme algérienne était plus présente dans les sports collectifs, ou individuels. Selon les données du MJS, le karaté arrive en tête du hit parade des sports de combat pratiqué par les femmes algériennes (5 816 licenciées) suivi des arts martiaux (Vovinam viet vodao, le Kung fu ....) qui compte 1.946 licenciées, du judo (1 392), du taekwondo (793) et de la lutte (712). Environ 10 000 autres femmes pratiquaient les sports-co tels que le football, basket-ball, handball et le volley-ball. Au milieu de tous ces éléments, l'éducation constitue un vecteur primordial pour accélérer l'évolution de cette société qui discrimine sans qu'elle s'en rende compte. Au commun des mortels, dans les sociétés méditerranéennes, maghrébines, on n'éduque pas de la même façon la fille et le garçon.
L'éducation, pour changer les choses On prépare la fille aux tâches ménagères, à être une future mère, on lui achète une poupée, alors qu'on achète un ballon ou une voiture au garçon et on le pousse à sortir à jouer dehors. Mais le changement est un long processus qui passe aussi par les médias. Vous savez, la presse couvre rarement un match de foot féminin, même une finale de coupe. Même des exploits passent parfois inaperçus et ne bénéficient pas de l'intérêt médiatique dont ils doivent naturellement profiter. On citera les hégémoniques Relizanaises de l'Affak Relizane en football féminin, l'équipe de l'Ouest algérien qui a remporté les 3 dernières éditions de la coupe d'Algérie féminine n'a, pour rappel, bénéficier de la couverture qu'impose, en principe, son fabuleux parcours. Avant elles, il y avait, comme un symbole, l'équipe de la capitale, l'ASE Alger-Centre en l'occurrence, qui avait régné 10 ans durant sur la balle ronde féminin en remportant toutes les éditions entre 2000 et 2009. Une «passation de pouvoir» encourageante qui montre que le sport féminin gagne des galons géographiquement parlant même si ça reste insuffisant. On doit aussi saluer la superbe performance des filles du Groupe sportif pétrolier (GSP) qui ont remporté la Coupe Arabe des clubs de handball, il y a une semaine, en s'imposant au Maroc face à l'A. Mégrine (Tunisie) 32 à 15 dans sa première édition. La femme algérienne continue donc de gagner quelques matchs dans sa quête de reconnaissance en venant enrichir le palmarès du sport algérien au niveau continental et international. En attendant d'autres exploits et une meilleure reconnaissance, elle doit être encouragée, valorisée et bénéficier de l'égalité avec le sexe opposé parce que, et même si ce n'est pas souvent elle qui est consacrée à l'arrivée d'un véritable chemin de croix et tant d'obstacles, elle a toujours mis au monde des champions. A défaut ne pas en être une en sport, elle l'est dans la vie. La plus belle des victoires M.T.