Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Constantine A. Lemili Dans l'harmonisation, ce qui au demeurant est une hérésie, du concept associant culture et commerce, ce nouveau installé partout et qui n'est pas le seul apanage heureusement de notre pays mais qui est allègrement dévoyé plus qu'ailleurs, ces derniers jours dans la ville des Ponts, c'est toutefois le commerce qui a pris le pas sur la culture au cours du Festival culturel de la wilaya de Annaba à Constantine dans le cadre de ces étranges échanges entre elles par certaines mégapoles nationales. Au-delà du fait qu'elles soient organisées au cours du dernier trimestre de l'année, du moins pour celles auxquelles nous avons eu l'heur d'assister ou d'en connaître les échos régulièrement dans une émission matinale télévisée (cette émission permet d'ailleurs d'entretenir l'illusion et finalement ne gruge que la femme au foyer), celles-ci donnent la nette impression qu'elles répondent à un pressant besoin de consommer un budget et en même temps de justifier dans le bilan de fin d'année une activité. Souvent pour des dotations conséquentes qui auront «dormi» les neuf autres mois de l'année. La manifestation annabie à Constantine n'a rien apporté de nouveau sauf une pesante impression de déprime qui gagne tout visiteur face à l'indigence du plateau offert dans le hall du palais de la culture Malek Haddad. A ce stade, un échange inter-villes est censé transporter la culture identitaire d'une région à une autre. Ainsi, la robe kabyle ne ressemble en rien à celle constantinoise, comme un burnous fait main à Khenchela ne ressemble en rien à un panier tressé de Collo ou un gadget en bois de liège de Jijel. Or, les produits proposés par les exposants annabis ne dérogent en rien à tout ce qui se trouve aujourd'hui un peu partout : arsenal de poterie quelconque et impersonnelle, gandouras, répliques à s'y tromper de celles faites chez les «grands» couturiers traditionnels constantinois, des bijoux de pacotille sertis, de la pâtisserie traditionnelle, des articles de dinanderie. En somme, un Salon typiquement constantinois à Constantine mais sous habillage officiel… annabi. Les exposants et exposantes concèdent à qui leur fait la remarque de «déjà-vu» qu'effectivement «la manifestation est tout sauf exaltante», ajoutant qu'il «aurait fallu venir le jour de l'ouverture» et que cela pouvait se rattraper «si la visite a lieu le dernier jour parce qu'il y aura une véritable… fête». Tout est dit dans ces propos spontanés, deux jours sur cinq, c'est-à-dire le premier et le dernier jour, l'effervescence y est au lieu et place de la déprime. Il est vrai que, durant ces deux jours, il y a les caméras sans lesquelles les officiels ne se déplacent pas pour servir leurs encouragements et surtout faire étalage de leur «immense» culture et connaissance des us, coutumes et art de vivre des autres régions. Ils ne manqueront pas non plus d'annoncer la réciprocité de la manifestation. Sinon, sur le plan de l'activité culturelle, Constantine aura confirmé son ronronnement habituel, une hibernation que ne suspend qu'une débauche effrénée et tout aussi anarchique durant le mois de Ramadhan et pour des activités répétitives rébarbatives. Avec le Festival de jazz printanier organisé par l'association Dimajazz et quelques activités ponctuelles de Miracle des Arts, la ville sort un peu de sa torpeur mais sans plus. Ces deux associations étant vraiment les seules à contribuer à plus de culture et moins, sinon pas de commerce du tout. La vraie difficulté réside malheureusement ailleurs avec l'information faisant état de l'annulation de la réalisation d'un multiplexe par un grand consortium arabe et surtout le transfert du projet à Sétif. Selon ce que nous avons su d'une personne proche des milieux concernés, le choix de la ville de Constantine a été annulé après une très sérieuse étude du marché. La ville des Ponts ne serait pas porteuse sur tous les plans. Le multiplexe devait être accompagné d'un centre commercial de la valeur de près de 10 millions de dollars et était appelé à créer de l'emploi et une méga-activité culturelle et commerciale à l'intérieur de la cité.