Par Hasna Yacoub Le procès lié au trafic d'enfants en Algérie qui s'est ouvert devant le tribunal criminel près la cour d'Alger, s'est poursuivi jusqu'à une heure tardive dans la soirée d'hier. Après la lecture de l'arrêt de renvoi, le magistrat a commencé l'audition des sept accusés présents parmi les treize personnes dont des franco-algériens mises en cause dans cette affaire. Selon l'arrêt de renvoi, il s'agit d'un dangereux réseau de trafic d'enfants qui a réussi depuis les années 90 à déplacer un nombre «indéterminé» d'enfants vers l'Europe, notamment la France, à Saint-Etienne, où ils ont été adoptés moyennant finances. L'affaire a éclatée en 2009 après le démantèlement de ce réseau par les services de sécurité, à la suite de l'ouverture d'une enquête après le décès d'une jeune fille lors d'un avortement dans une clinique sise à Ain Taya. Cette clinique appartient au principal accusé dans cette affaire, un médecin portant les initiales H. K. Les investigations ont révélé que ce médecin, qui avait la formation de médecin généraliste, se faisait passer pour un obstétricien et, avec l'aide de sa sœur, prenait en charge gratuitement des femmes célibataires enceintes jusqu'à l'accouchement. Il réussissait ensuite et à l'aide de deux autres accusés, des notaires, à établir des documents de désistement auprès des mères célibataires et des certificats d'adoption (kafala), rédigés par les notaires. Grâce à ces documents, le médecin parvenait à faire quitter aux enfants le territoire national vers l'Europe pour les remettre à des familles adoptives, contre de l'argent. En attendant leur transfert et leur adoption, le médecin confiait les bébés à une puéricultrice, qui prenait également en charge les femmes enceintes sur le point d'accoucher. L'enquête des services de sécurité a permis de récupérer trois enfants au domicile de la puéricultrice, qui exerçait dans une pouponnière à El Biar. Elle a permis également de découvrir 12 certificats d'adoption rédigés entre 2005 et 2006, dans lesquels figurent 9 enfants déjà expatriés de manière illégale et dont la kafala a été confiée à d'autres personnes moyennant une somme d'argent. Grâce à la complicité du médecin, un ressortissant français d'origine algérienne a pu expatrier en France deux mineurs de parents inconnus, les faisant passer pour ses enfants légitimes, selon la fiche de débarquement. Selon l'instruction, les mères célibataires impliquées dans cette affaire ont déclaré avoir été victimes de menaces et contraintes d'abandonner leurs enfants après leur accouchement. Il est également établi, selon l'arrêt de renvoi, que le médecin exploitait les foetus avortés qu'il conservait dans un produit spécial et exportait vers l'étranger. Ce dangereux réseau qui est à l'origine, depuis 1990, de la disparition d'un grand nombre d'enfants et leur déplacement vers l'étranger, est constitué d'Algériens et de Français. L'enquête n'a cependant pas réussi à déterminer le nombre exact des enfants déplacés. A préciser enfin que les mis en cause dans ce dossier sont poursuivis notamment pour association de malfaiteurs, séquestration, transfert d'enfants avec préméditation, usage de faux, faux en écriture, et usurpation d'identité. H. Y.