Le football occupe une place importante dans notre société. Une place démesurée, estiment certains. Il monopolise tous les écrans. Médiatiquement, les autres sports ont du mal à exister. Le sport à onze semble installer une concurrence déloyale. Le football écrase la concurrence. Pourtant, ce sport n'exige rien : il est le reflet du marché. Ce sont les médias, le public et les sponsors qui décident au final qu'il faut investir dans le football, qu'il faut montrer du football parce que cela attire le public. On sait que la médiatisation des sports, en Algérie, ne répond pas aux règles que les professionnels ont définies. On sait, également, que les médias focalisent sur le football. Mais la question qui se pose, aujourd'hui, est de savoir pourquoi des disciplines, aussi bien dans le registre des sports collectifs qu'individuels, n'arrivent pas à ravir la vedette au sport à onze même quand celui-ci est médiocre. Dans le cas de l'Algérie et nonobstant deux décennies d'échecs et de déboires, la discipline continue à mobiliser la jeunesse et les médias. Parallèlement à cette fidélité, il y a lieu de remarquer que d'autres disciplines, qui, naturellement, ne manquent pas d'engouement, ont été réduites médiatiquement au registre de disciplines de peu d'importance. C'est le cas, visiblement, du handball. Ce sport ne bénéficie plus de la place qu'on lui a accordée tout récemment. Il est vrai que la sélection nationale ne domine pas le continent. Ce n'est pas un argument solide pour que cette discipline devienne marginalisée comme c'est le cas maintenant. Le volume de présence du handball dans le programme télé et dans les pages des journaux a beaucoup reculé. Aujourd'hui, un tour avancé de la coupe d'Algérie de handball ou de basket-ball peut passer inaperçu devant une journée de championnat de football de deuxième division. Pour les amoureux du handball ou du volley-ball, il faudrait attendre la finale de la coupe d'Algérie pour pouvoir suivre un direct de l'ENTV. Pour les sorties de l'équipe nationale ou du MCA, les téléspectateurs doivent se contenter du résultat généralement annoncé en retard par l'«unique». Cette dernière aurait beaucoup à gagner en posant ses caméras du côté des salles omnisports pour un programme télé. Cela protégerait les fonctionnaires de l'entreprise des insultes et des comportements de violence des spectateurs. Une telle évolution épargnerait aussi à l'ENTV la pression des présidents de club au sujet des droits de retransmission. Il est manifestement absurde de voir des présidents de club réclamer de l'ENTV de l'argent en contrepartie du spectacle honteux qu'on sert hebdomadairement aux téléspectateurs. Le foot algérien n'est pas en position de renforcer les recettes de l'entreprise comme ce fut le cas, à titre d'exemple, de la chaîne allemande Première, qui a fait des pieds et des mains pour s'approprier l'exclusivité de la transmission de la Bundesliga. Dans ce pays où la discipline n'est pas un vain mot, la Ligue nationale a mené une rude bataille pendant plusieurs mois pour arracher les droits télévisés du championnat. Première a eu à verser davantage qu'elle ne le faisait auparavant. Les recettes annuelles sont passées de 409 à 412 millions d'euros par saison en moyenne. «Nous nous sommes assuré les droits les plus importants pour nos clients pour les années à venir», a déclaré le patron de la chaîne, Mark Williams, qui reconnaît les difficultés rencontrées par la chaîne quand qu'elle n'avait pas assuré l'exclusivité. Les oubliés de l'«unique» Pour notre unique chaîne de télévision, il ne sert à rien de s'accrocher à une discipline qui vit ses moments de disgrâce. Le volume médiatique généralement excessif réservé au football fait également d'autres lésés parmi la même famille de ce sport. Il s'agit des petites catégories qui animent un championnat dans une indifférence médiatique très gênante. La fin de saison offre des arguments supplémentaires pour comprendre que les caméras de l'«unique» ne sont pas installées là où elles devraient l'être. Les services des sports de l'ENTV, qui mobilisent toute une équipe de journalistes et de techniciens pour le match de la finale des seniors, n'ont jamais daigné retransmettre une finale des juniors ou celle des cadets. Là aussi, on se contente d'informer le téléspectateur du lauréat. Si la Fédération algérienne de football et l'ENTV devaient négocier quelque chose qui serait utile pour la discipline, elles sont tenues d'aborder la question de la retransmission des matches des petites catégories. Leur médiatisation renforcera naturellement toute initiative de formation. Car, les jeunes joueurs sont plus motivés quand ils savent que la compétition à laquelle ils participent est médiatisée par la télévision. Nous n'en sommes pas encore là et ces jeunes continuent d'évoluer dans l'indifférence totale. Soulignons que dans d'autres pays, les choses sont vues différemment. Chez notre voisin tunisien, les matches des petites catégories sont retransmis par la télévision nationale. Quand une sélection nationale tunisienne des juniors ou des cadets est engagée dans une joute, même amicale, la sortie est présentée comme un événement. Chez nous, les gens ne retiennent pas un nom de joueur qui compose la sélection nationale à l'exception de celle des seniors. Dans les journaux spécialisés, des titres s'intéressaient aux championnats des jeunes en annonçant de façon régulière les résultats. Ces titres mobilisaient des journalistes pour aller couvrir les matches des juniors. Ce qui est en vérité une bonne initiative. Mais cet intérêt ne semble pas durer dans un environnement qui exige des résultats sans fournir d'efforts. Ces publications sont visiblement amenées à abandonner ce créneau pour suivre celui de la tension avec son lot de médiocrité, de violence et de haine. Il n'y a pas de raison de penser que ces publications aient laissé avec gaieté ces jeunes jouer loin des médias. Il doit y avoir des motifs qui ont conduit ces journaux à un tel recul. En face d'une fédération qui ne sait pas communiquer, il est difficile d'assurer un exercice de médiatisation. Responsable de la promotion de la discipline et du bon déroulement des compétitions nationales, la Fédération algérienne de football doit se rappeler qu'il est de son devoir de réunir toutes les conditions pour une distribution large de ce qui se passe dans le monde du football national. Aujourd'hui, nous sommes bien devant une situation inédite où des amoureux du foot n'hésitent pas à émettre des critiques sur son impact. Finalité : rétablir le rôle social de ce sport et les valeurs qu'il doit naturellement véhiculer. Un observateur du football, dans toutes ses dimensions, estime que «cet acharnement en dit plus sur la médiocre qualité des nombreux débats médiatiques, où l'émotion l'emporte sur la réflexion, l'à-peu-près sur la précision, que sur le football lui-même. En regardant bien les choses, on voit que très souvent on fait d'un os un dinosaure ; que l'on juge le football sans le conceptualiser ; que l'on systématise des faits isolés ; que d'un précédent on fait une coutume». A. Y.