La crise syrienne a décidemment provoqué un chamboulement des positions et une redistribution des alliances dans une région du monde où la complexité n'est pas le moindre des qualifiants. Le mouvement palestinien Hamas semble de plus en plus embarrassé par le choix pris par sa direction de rompre avec ses anciens alliés pour suivre l'autre bord qui lui fait désormais les yeux doux. Récemment, le Hamas a fustigé le Hezbollah à propos de son intervention dans le champ syrien l'accusant de susciter les tensions confessionnelles. Etranges accusations alors que l'Iran et le Hezbollah, les «chiites» avaient soutenus, politiquement et logistiquement le Hamas «sunnite» jusqu'à risquer leurs relations avec l'Autorité de Mahmoud Abbas et avec l'Egypte de Moubarak. La dernière sortie du Hamas palestinien a étrangement coïncidé avec la décision du président égyptien Morsi de rompre les relations avec Damas, et les fetwas pour le «djihad» en Syrie énoncées au Caire par certains religieux sunnites. Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, qui avait longtemps trouvé refuge à Damas, lorsque rares étaient les capitales arabes à le recevoir, décide de changer de tablier et s'installe à Doha. La guerre civile syrienne, qui dure maintenant depuis plus de deux ans, avec ses démembrements géopolitiques, impose le choix. Le mouvement palestinien faisait partie de l'axe de la résistance et tenait son aura et sa popularité de cette posture inconfortable mais honorable. Aujourd'hui il succombe à la tentation de l'alignement. Le Hamas semble avoir choisi son camp et rejoint le bloc des «modérés» arabes, c'est-à-dire sous l'influence américaine. Extraordinaire retournement de situation pour un mouvement qui se voulait celui de la résistance contre l'occupant israélien et qui se positionnait en porte-à-faux avec les négociateurs du Fatah accusés de jouer une partition adoubée par la Maison-Blanche. Les dirigeants du Hamas avaient probablement mal calculé leurs positions, croyant que le régime syrien allait tomber aussi rapidement que le Libyen et l'Egyptien. Un calcul qui pourrait être fatal à ce mouvement d'obédience Frère musulman qui semble aujourd'hui surfer sur la prise de pouvoir de ces «frères» dans plusieurs pays arabes. La décision d'opter pour «l'axe sunnite», menée par l'Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie a finalement mis à mal ses relations avec l'axe Syrie-Iran qui a soutenu le mouvement depuis une vingtaine d'années. L'Autorité palestinienne a longtemps été taxée de subir l'influence de Washington. Aujourd'hui le Hamas, depuis Ghaza ou Doha, aura du mal à convaincre de sa différence. M. B.