La rébellion syrienne semble de plus en plus avoir des difficultés à parler d'une seule voix dans la crise qui secoue la Syrie depuis plus de deux années. Et les discordes s'affichent désormais au grand jour. La Coalition de l'opposition syrienne a accusé un groupe de djihadistes lié à Al Qaïda de privilégier leur projet d'instauration d'un Etat islamique au «combat contre le régime». Deux jours après la conquête d'une ville du nord du pays tenue par les rebelles la tension est palpable. Azaz, ville frontalière de la Turquie, dans le nord-ouest de la Syrie, est tombée mercredi aux mains du groupe l'Etat islamique d'Irak et du Levant (Eiil). La ville n'était pas sous le contrôle de l'Armée gouvernementale mais de l'Armée syrienne libre, officiellement bras armé de la Coalition nationale syrienne. La cohabitation des différents groupes en opposition contre le pouvoir en place semble sérieusement mise à mal. La Coalition de l'opposition n'a pas manqué de «condamner les agressions de l'Eiil» C'est la première fois que cette coalition, qui regroupe un large éventail de tendances, s'élève aussi fortement contre un groupe djihadiste. Elle a dénoncé le fait que l'Eiil «serve des projets extérieurs et appelle à instaurer un Etat islamique dans les contours de l'Etat syrien, en violation de la souveraineté nationale syrienne». La Coalition, sous influence occidentale, s'est également indignée du recours de ce groupe «à la force contre les civils et du bellicisme à l'égard de l'ASL» et l'accuse d'avoir «renoncé à combattre le régime dans différentes zones et de s'employer à renforcer son emprise sur des zones libérées». La coalition affiche désormais ses divergences avec l'idéologie de l'Eiil en soulignant que «le peuple syrien est enclin à la modération et au respect des religions et du pluralisme politique et rejette la pensée extrémiste et l'exclusion qui se traduisent par des actes criminels contre les musulmans et les non musulmans». Ce nouveau discours semble aussi rentrer dans une opération de marketing médiatique pour se démarquer des groupes djihadistes particulièrement menaçants. Pour Damas la rébellion est sous l'emprise quasi-totale des djihadistes liés à Al Qaïda. Sur le front diplomatique le secrétaire d'Etat américain John Kerry maintient la pression sur Damas. Il voudrait que le Conseil de sécurité de l'ONU vote une résolution contraignante. De l'autre bord Moscou estime que l'attitude de la Syrie sur le démantèlement des armes chimiques inspire confiance. L'Iran, sur une posture plus constructive, propose de faciliter le dialogue entre Damas et la rébellion, pour favoriser une solution politique du conflit. La tragédie syrienne dure depuis trente mois, a causé plus de 110 000 morts et fait six millions de réfugiés syriens, dont deux millions se retrouvent dans les pays voisins. Le vice-Premier ministre syrien, Qadri Jamil, a affirmé au quotidien britannique The Guardian que Damas demanderait un cessez-le-feu en cas de nouvelle conférence internationale de paix. Pour rappel l'initiative Genève-2 a toujours du mal à voir le jour faute d'un consensus entre les principaux acteurs de la crise.