Par Algérie presse service La vente des moutons de l'Aïd El Adha semble se faire de manière moins anarchique cette année à Alger. Néanmoins, elle demeure souvent non soumise à une autorisation ou un contrôle de la part des autorités locales. Habitués depuis quelques années à une vente anarchique des moutons à l'occasion de l'Aïd El Adha avec la prolifération des revendeurs qui squattent de manière hasardeuse les espaces, de nombreux habitants de la capitale ont relevé cette année, une réduction de ce phénomène à la veille de cette fête. «D'habitude, nous rencontrons plus fréquemment les maquignons avec leurs troupeaux qui pâturent un peu partout, donnant un aspect encore plus sale à la capitale !», fulmine une mère de famille qui se félicite de la quasi disparition de ce comportement «passager» mais non sans «désagréments». Le constat est cependant différemment apprécié par d'autres citoyens dans certains quartiers à l'instar d'El Harrach, Bab Ezzouar, Ain Benian et Kouba où une présence tout aussi «désordonnée» des ovins que durant les annéesprécédentes est constatée. Mais le plus «inquiétant» est que cette activité improvisée se fait sans «la moindre autorisation» ou «contrôle», relèvent certains qui ne manquent d'imputer précisément la hausse des prix pratiqués à cet état de fait. Entouré d'un troupeau d'environ une vingtaine de moutons, un vieux maquignon inspecte les potentiels clients en quête d'une «bonne affaire» qui leur permettraient d'accomplir, sans se ruiner, le rite du sacrifice qui caractérise l'Aïd El Adha. Le sexagénaire, de «Kéchabia» vêtu, et, visiblement, originaire de l'intérieur du pays, a choisi comme lieu de pâturage une parcelle de terrain au bord d'un des axes du «Ravin de la femme sauvage» (les Sources), de sorte à être visible par les automobilistes qui l'empruntent. Lorsqu'il est interrogé sur son activité, il refuse fermement de coopérer. Il en sera autrement avec un jeune vendeur ayant «installé» son troupeau dans une discrète ruelle au quartier d'El Madania (ex-Salembier), lequel se montre plus coopératif et plus prolixe. «Je revends des moutons depuis cinq ans pour arrondir mes fins de mois. Avec la cherté de la vie, il faut savoir saisir les occasions pour mieux s'en sortir», tente d'argumenter Mohamed. B., vendeur de légumes et fruits au marché du même quartier. Il loue pour ce faire, un garage appartenant à un particulier monnayant la somme de 50 000 dinars pour une période de 15 jours et reconnaît que cette activité occasionnelle n'est soumise à aucun contrôle. «Je suis ici depuis une semaine et personne n'est passé pour vérifier quoi que ce soit. Tout le monde vend n'importe où et n'importe comment!», déclare-t-il, non sans avouer que ce «laisser-aller» arrange bien ses affaires. A ses côtés, se tient Abdelkader, le fournisseur du cheptel originaire de Messaâd à Djelfa (300 km d'Alger), une des wilayas les plus pourvoyeuses en ovins et réputées pour la qualité de ses viandes rouges. Les prix proposés oscillent entre 34 000 DA et 60 000 DA, selon qu'il s'agisse d'un agneau ou d'un mouton. Lorsqu'un acheteur potentiel marchande pour tenter de baisser l'offre, l'éleveur et le revendeur joignent leurs voix pour justifier leur tarif en évoquant notamment le coût du transport et les «dangers» qui peuvent parfois survenir durant le trajet. «Il arrive que nous ne gagnions pas grand chose dans l'affaire, parfois pas plus que la modique somme de 1 000 ou 1 500 DA. Dans le meilleur des cas, on s'en sort avec 10 000 DA de gains. Si j'ai encore des bêtes une fois l'Aïd passé, je serais contraint de les revendre pour la moitié de leur prix», intervient le propriétaire des ovins. Depuis une semaine, il a réussi à «liquider» une dizaine de moutons et d'agneaux et espère écouler la vingtaine qui lui reste sous huitaine pour «ne pas être perdant». Inutile de chercher à connaître le montant du gain engrangé de la transaction, la question relevant quasiment du «tabou» et de «l'intime». A Diar El Mahçoul, la cité réputée populaire d'El Madania, l'entrée d'un carré d'immeubles a été reconvertie en un vaste pâturage où gambadent allégrement des moutons que des bambins ne semblent pas vouloir quitter d'une foulée tant ils font leur joie et distraction. Les familles ayant acquis les plus grosses bêtes ont l'air de les exhiber plus fièrement et s'amusent, pour certains, à les parer de teinture ou de henné. Dans un espace emménagé pour le foin, trois bêtes font des allers-retours comme pour se «dégourdir» les pattes. Il ne s'agit point du bien familial destiné au sacrifice mais de l'objet d'une vente qui sera appelée à nouveau à être marchandée par l'intermédiaire d'une «2e main». Deux frères accompagnés de deux autres voisins ont effectué le déplacement jusqu'à M'Sila à bord d'une camionnette qui sera chargée des bêtes au retour, lesquelles seront revendues dans leur quartier. Le «meneur» de la bande, Mourad, la trentaine et chômeur de son état, précise que ce travail occasionnel lui permet de faire un peu d'argent, ce qui est de loin «préférable» à la «tentation du vol», juge-t-il. Comme tous les autres revendeurs, il tente de s'en sortir avec un bon chiffre d'affaires, l'occasion de l'Aïd «ne se renouvelant qu'une fois l'an» et propose des prix qu'il justifie par plusieurs paramètres, dont les frais de transport, de foin, etc. Dans ce quartier, le voisinage a adopté la pratique des combats de moutons mais nos interlocuteurs se défendent de s'adonner à ce qu'ils considèrent comme une «passion» pour de l'argent. L'un des «dresseurs» nous montre bigrement un bélier «rôdé» à la lutte et proposé à 120 000 DA, comme si cette prouesse supplémentaire, et pour le moins accessoire, était de nature à justifier que la barre soit si haute. Quels que soient les prix soumis par les vendeurs et autres revendeurs, le dernier mot revient au final aux éventuels acheteurs. APS