Le boom du pétrole de schiste dans le Dakota du Nord, Etats-Unis, menace de prendre fin dès 2015, relève la Banque Goldman Sachs citée dans les colonnes du journal le Monde. La production de pétrole de schiste du Dakota du Nord devrait poursuivre sa croissance jusqu'en 2023, se réjouit Goldman Sachs, avant d'amorcer une chute presque aussi rapide. Dès 2015 toutefois, les puits qui fournissent pour l'instant la quasi totalité de la production, forés au centre de la formation géologique de Bakken, devraient entrer en déclin, d'après le détail d'une analyse diffusée fin septembre dernier auprès d'investisseurs par la banque d'affaires américaine. En très fort développement depuis 2010, la formation de Bakken a permis d'extraire en juillet 874 000 barils par jour, grâce aux techniques de fracturation hydraulique et de forage horizontal. Le pétrole de schiste du Dakota du Nord constitue 11,6% de la production totale d'or noir des Etats-Unis. Cette production américaine atteint aujourd'hui7,5 millions de barils par jour (Mb/j) ; elle est en croissance rapide depuis 2011, avant tout grâce au boom en cours du pétrole de schiste. Les analystes de Goldman Sachs promettent que le Dakota du Nord va continuer à «surprendre les investisseurs». Ils tablent sur un pic de production de 2 Mb/j en 2023. Pour y parvenir, il faudra qu'à cette date, près des deux-tiers de la production du Bakken soient extraits de puits qui, pour l'heure, n'existent pas. Le Dakota du Nord pourrait dans ce cas maintenir jusqu'en 2040 sa production d'or noir au-delà de l'impressionnant niveau déjà atteint. Ce qui ne ferait pas un avenir si court que cela. Afin que le développement du Dakota du Nord puisse se poursuivre, Goldman Sachs compte sur l'extension des forages dans une formation géologique nommée Three Forks, plus étendue mais également plus profonde (et donc plus coûteuse à forer) que le Bakken. Cette formation de Three Forks reste aujourd'hui quasiment inexploitée. En avril, elle a cependant permis de justifier le doublement du montant estimé par Washington des réserves de brut exploitables dans la région. Avec des forages aujourd'hui délimités par zones de 320 acres (130 hectares), la formation de Bakken est en train de «parvenir à maturité», prévient la banque d'affaires. Autrement dit, sans accroissement radical du nombre de puits, la principale source de pétrole de schiste des Etats-Unis serait à la veille d'amorcer son déclin. Pour empêcher que le Bakken ne commence bientôt à se tarir, les experts de Goldman Sachs jugent nécessaire de doubler l'intensité de l'exploitation, en passant dès que possible à des zones de forage de 160 acres (65 hectares), au lieu de 320 acres. L'idée de base, c'est qu'avec la fracturation, les puits horizontaux drainent tout compte fait des zones plus petites qu'on le pensait à l'origine : on peut les rapprocher les uns des autres sans interférence. Si c'est vrai, les coûts de forage pourraient chuter de façon spectaculaire (des forages plus proches sont moins onéreux et plus efficaces), et beaucoup plus de pétrole pourrait au final être récupéré. Forer des puits trop près les uns des autres et ils interféreront les uns avec les autres, drainant le pétrole et le gaz dans les mêmes zones. Depuis les années trente aux Etats-Unis, le recours aux «forages déviés» puis horizontaux- l'une des techniques qui a rendu possible le boom du gaz et du pétrole de schiste- a souvent permis aux pétroliers de se voler l'or noir entre eux, comme on plante à son insu une paille dans le verre du voisin. Au Texas, dans l'Oklahoma ou en Californie, ces pillages réciproques ont régulièrement eu pour conséquence des chutes aussi imprévues que spectaculaires des débits d'extraction, suivies de près par le déclin prématuré de champs parvenus à maturité. Y. S.