Les universitaires sont en colère. Livrés à eux-mêmes face à la violence qui a investi d'une manière inquiétante, ces dernières années, les campus, ils montent aujourd'hui au créneau pour appeler à un véritable plan d'action à même d'endiguer ce phénomène qui touche de plein fouet nos universités. Ainsi, à la veille d'une cérémonie qui aura lieu le 16 décembre prochain, durant laquelle l'auditorium sera baptisé du nom du professeur assassiné Benchehida Mohammed, mort tragiquement dans l'exercice de ses fonctions le 18 octobre dernier, la communauté universitaire de Mostaganem a interpellé les pouvoirs publics sur la nécessité d'«une prise en charge immédiate, urgente et sérieuse de ce problème avant qu'il ne gangrène complètement l'université algérienne». Rédigée par un groupe d'enseignants et d'étudiants, la déclaration de Mostaganem se veut être, en réalité, à la base de l'élaboration d'une charte prônant la non-violence entre toutes les composantes de l'université algérienne. Dans ce cadre, condamnant fermement la violence «sous toutes ses formes» au sein et en dehors des établissements universitaires, le corps universitaire a souligné que l'éradication de ce phénomène est «l'affaire de tous et de chacun d'entre nous». Cependant, des mesures sérieuses s'imposent pour empêcher l'expansion de ce fléau sur les bancs de nos facultés. Et pour cela, la communauté universitaire exige en premier lieu que «soit institué, auprès du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, un fichier national pour répertorier tous les actes de violence physique commis au sein des campus universitaires». Cette mesure permettra, selon les signataires de cette déclaration, de sanctionner immédiatement les auteurs des agressions sans préjuger des motifs et circonstances. Leurs actes seront dès lors versés dans leur dossier administratif sans possibilité d'effacement. A ce propos, les auteurs de la déclaration de Mostaganem préconisent également la réactivation, au sein des établissements universitaires, des commissions paritaires et conseils de discipline et ce, afin de traiter «avec célérité» tous les cas de violence. Sur un autre volet, les universitaires plaident pour la création d'un audit social de l'université algérienne, de ses composantes humaines, culturelles et sociologiques, puisque «la compréhension de la ‘‘sociologie universitaire'' algérienne permet, en effet, d'apporter un traitement fondamental du phénomène», indique-t-on dans les colonnes de la déclaration de Mostaganem. D'autre part, les universitaires ont fortement recommandé l'institution, au niveau de chaque université, de cellules de médiation et de communication chargées de gérer et d'aplanir les situations conflictuelles qui surgiraient des relations entre l'administration, les enseignants et les étudiants. Dans ce sillage, la déclaration de Mostaganem presse la tutelle de mettre en place le système de «coaching» des jeunes enseignants nouvellement recrutés ou ayant moins de 5 ans d'exercice du métier, ainsi que de certaines catégories du personnel du «Front Office» en contact avec les étudiants et les enseignants. Il en est de même pour le système du tutorat des étudiants prévu dans les filières LMD. Pour les universitaires, ce système a en soi de quoi améliorer la communication et le dialogue «enseignants-étudiants» qui fait cruellement défaut aujourd'hui. En guise de conclusion, les auteurs de la déclaration de Mostaganem soulignent que «la sacralité des campus universitaires n'est légitime que dans la mesure où elle assure la confrontation des idées dans un climat de liberté et de respect mutuels». C'est pour cela qu'il est urgent que l'université algérienne assume enfin sa mission sociale en devenant par excellence le «lieu d'éclosion des idées modèles de société qui fondent les civilisations humaines». C'est en tout cas le souhait sincère des auteurs de la déclaration de Mostaganem. Alors espérons en dernier lieu que cet appel sera entendu… A. S.