Les projets de Sonatrach, notamment son redéploiement sur le marché international, seront-ils réalisés en ces moments de crise financière conjuguée à une forte baisse des prix de l'or noir ? Et les objectifs inscrits dans l'agenda des dirigeants de ce groupe seront-ils maintenus ? Ces questions méritent, en cette période d'incertitude, d'être posées. Les recettes générées par la vente de gaz et de pétrole, cette année, sont, selon les estimations de l'état-major de ce groupe légèrement revues à la baisse. En cause, le prix du pétrole a perdu environ 75 % de sa valeur depuis quelques mois. De ce fait, Sonatrach, qui avait tablé sur des recettes de 80 milliards de dollars, n'aura finalement, et pour le compte de l'exercice 2008, que près de 76 milliards de dollars dans son compte. En plus de ces nouvelles donnes, l'activité économique mondiale connaît un net ralentissement en ce sens qu'un recul significatif dans les secteur de l'industrie dans plusieurs pays a été enregistré. La résultante de ces nombreux facteurs laisse libre cours à la spéculation sur le maintien ou non de bon nombre de projets de l'entreprise algérienne au point que Mohamed Meziane, P-DG du deuxième fournisseur de gaz de l'Europe après la Russie, a tenu à lever toute équivoque en mettant à nu les ambitions de son groupe, mais également pour affirmer que la mise à l'arrêt des projets lancés n'est pas du tout à l'ordre du jour. Objectif principal : devenir le 10e groupe au niveau mondial En dépit des facteurs susmentionnés, le groupe public algérien, premier producteur de gaz en l'Afrique, confirme ses ambitions : consolider sa place de deuxième fournisseur européen de gaz, se développer sur le marché prometteur du gaz naturel liquéfié (GNL) et sortir du précarré algérien en opérant à l'étranger, cherchant ainsi à se frotter aux «majors» privées. Le premier responsable de Sonatrach l'a affirmé la semaine dernière de façon on ne peut plus claire. «Notre objectif est d'être la dixième compagnie au classement international des producteurs d'hydrocarbures», a ainsi assuré M. Meziane dans une récente déclaration à la presse. L'entreprise algérienne compte même évoluer en fonction des marchés et investir l'équivalent de 1,5 milliard de dollars. Cet optimisme trouve son essence, selon la même source, par le fait que le maintien de tous les autres projets de son entreprise «ont été étudiés, maturés et financés sur les fonds propres de Sonatrach ainsi qu'à travers le système bancaire». Pour appuyer ses propos, le premier responsable du groupe pétrolier a affirmé que l'entreprise qu'il dirige a maintenu ses investissements de 45 milliards de dollars, entre 2008 et 2012. «Le programme d'investissement 2008-2012, d'un montant de 45 milliards de dollars, sera consacré à 66% à l'amont pour développer de nouveaux champs pétroliers et gaziers», a également expliqué M. Meziane à la Chaîne III de la radio nationale. Le reste du programme est destiné aux activités aval du groupe, et, dans certains cas, seront en association avec des compagnies étrangères, ajoute-il plus loin. «Les projets pétrochimiques initiés par Sonatrach [transport des hydrocarbures, exploration, etc.] ne sont pas à l'arrêt et ne risquent pas de subir les conséquences de la baisse des prix de pétrole» a-t-il noté. Et d'ajouter pour ceux qui sont lents à la détente : «Il n'a jamais été question de geler, dans l'immédiat, ces projets.» Les projets pétrochimiques non encore attribués «pourraient être gelés» Si une volonté de fer pour continuer la réalisation des projets lancés est visiblement affichée par les responsables de ce groupe, il n'en demeure pas moins que ces derniers peuvent revoir leurs copies dans certains cas. Il s'agit, en effet, des projets pétrochimiques qui ne sont pas encore attribués. «Les projets qui ne sont pas encore attribués pourraient être gelés si les prix du pétrole continuent de baisser», a précisé plus loin la même source, soulignant au passage que l'annulation des projets se fera, bien sûr, «en concertation avec les autres partenaires». Parmi ces projets, figure la réalisation en partenariat avec le consortium émirati Dubaï-Moubadala d'une usine d'aluminium d'une capacité de 700 000 tonnes à Beni Saf (extrême ouest), a dit M. Meziane. Evoquant les différents projets inscrits, les dirigeants de Sonatrach, ont laissé entendre qu'ils veulent, non seulement leur réalisation à terme, mais augmenter les parts du marché dans d'autres secteurs. Sur le Vieux Continent, par exemple, considéré à juste titre comme «un marché naturel», le développement passe par l'expansion du réseau de gazoducs. Pour augmenter ses parts de marché en Italie, la Sonatrach portera, souligne la même source, de 26 à 33 milliards de m3 la capacité du Transmed passant par la Tunisie, auquel s'ajoutera, en 2012, le Galsi, transitant par la Sardaigne. Du côté ibérique, le deuxième tuyau vers cette péninsule, d'une capacité de 8 milliards de m3 par an, est bien avancé. «Il est bien avancé ; il sera prêt vers le mois de septembre ou octobre de l'année prochaine», précise le patron de la Sonatrach. Quant au Transsaharien (le NigAl), une canalisation de 4 000 km devant relier le Nigeria à l'Algérie, ce mégaprojet est «en plein phase de montage pour l'horizon 2015-2017», ajoute M. Meziane. En plus de la société de commercialisation du gaz en Espagne et en Italie, un projet, pour rappel inscrit dans le sillage de la réalisation de 30% de son chiffre d'affaires à travers l'international, le groupe algérien créera une autre société de commercialisation en France. «La prochaine sera la création d'une société de commercialisation en France», a indiqué M. Meziane. Son but est de profiter de la libéralisation des marchés de l'énergie européens, auparavant quasi monopolisés par les grandes compagnies nationales, telle GDF. Au niveau national, en plus des découvertes de nouveaux gisements, la première entreprise nationale a attribué la semaine dernière quatre périmètres, à l'italien ENI, au russe Gazprom, au britannique BG Group et à l'allemand EON Rhurghas. S. B.