Les internautes ont sans doute entendu parler de ce milieu défensif algérien, qui évolue en équipe fanion de l'AS Saint-Etienne. Les internautes ont sans doute entendu parler de ce milieu défensif algérien, qui évolue en équipe fanion de l'AS Saint-Etienne. Lui, c'est Amine Linganzi Koumba, né en Algérie, de parents congolais. Nous nous sommes mis à la recherche de toute information susceptible de nous éclairer à son sujet. Une partie de la vérité nous a été envoyée par les lecteurs du Buteur, qui nous ont mis sur les traces de son frère, puis de sa sœur. C'est ainsi qu'on a appris, par son frère, qu'«Amine peut intégrer n'importe qu'elle équipe nationale entre l'Algérie, le Congo et la France. Une chose est sûre, c'est qu'on a passé 6 ans en Algérie, c'est un pays qu'Amine affectionne énormément, mais vu les infrastructures, les difficultés de la fédération, ça restera envisageable mais difficile qu'il joue pour l'Algérie». Ne pouvant nous contenter de cela, Le Buteur a décidé d'aller faire parler le premier concerné, à savoir Amine Linganzi en personne. Voilà ce qu'il en pense. * Racontez-vous la vraie version des rapports que vous avez avec l'Algérie ? En fait, mon père était ambassadeur du Congo en Algérie à la fin des années 80. Il est arrivé en Algérie en 1988. Mes frères et sœurs allaient tous à l'école française de Ben Aknoun, à Alger. Je suis né en 1989 à Alger et j'y suis resté jusqu'à l'âge de cinq ans.
* Vous gardez quelques souvenirs d'Alger ? Oui, bien sûr, mais ça reste assez vague car la mémoire d'un enfant de cinq ans ne peut pas aller au-delà. Mais je me rappelle de quelques amis, des voisins à nous, surtout, ou des camarades de classe qui venaient passer un moment chez nous. J'ai encore les images de quelques gamins, mais je ne peux pas vous dire leurs prénoms. Mon frère s'en souvient, lui, c'est sûr. Le problème, c'est que les troubles venaient tout juste de commencer en Algérie et cela avait inquiété tous les étrangers qui commençaient à fuir.
* Où êtes-vous allés par la suite ? Nous sommes venus ici en France, à Aix-en-Provence.
* Parlez-vous, aujourd'hui, en famille ou entre amis, de l'Algérie ? Oui, souvent avec ma famille ou mes amis. Il y a des potes à moi qui se vantent devant moi, en disant : «Ouais, je suis Algérien et fier de l'être… » Et là je les arrête net en leur disant : moi je suis plus Algérien que vous, parce que je suis né en Algérie ! (Il rigole franchement). Je leur dis : vous, vous êtes français, vous êtes nés ici, c'est moi l'Algérien, pas vous !
* Vous êtes chrétien dans la famille. Pourquoi ce prénom d'Amine ? En fait, à ma naissance, ma mère ne savait pas comment m'appeler. Elle avait déjà eu sept enfants et donc elle n'avait plus de prénom en stock. (Il se marre). Elle demande alors conseil à une infirmière qui lui propose le prénom de Mohamed. Là, ma mère a tiqué un peu, parce que c'était un peu abusé pour une chrétienne. Vous imaginez un chrétien s'appeler Mohamed ? Alors l'infirmière lui en a proposé un autre, celui d'Amine justement. Ma mère demande ce que cela signifie et l'infirmière lui a expliqué que ça voulait dire Amen, qui signifie que Dieu exauce.
* Que Dieu exauce aussi qu'Amine revienne en Algérie pour jouer avec l'équipe nationale algérienne. Vous dites Amen ? (Il se marre franchement, réfléchit une seconde…) Moi je dis Amen, pourquoi pas ? Franchement, je ne sais pas ce qui m'attend demain. Savez-vous au moins que cela est possible ? Est-ce que dans votre tête, vous avez déjà pensé à cette éventualité ? Franchement, on en a déjà discuté avec des potes à moi.
* Des Algériens ? Oui, surtout, parce que je reçois souvent des messages de la part des supporteurs algériens qui me disent : «Pourquoi tu ne vas pas jouer pour l'Algérie ? »
* Vous n'allez quand-même pas faire la queue derrière tous ces joueurs qui espèrent être sélectionnés en équipe de France un jour et qui tournent le dos aux sélections africaines, pour se retrouver, quelques années plus tard, sur le carreau. Vous ne pensez pas que l'équipe de France a déjà assez de joueurs africains comme ça ? C'est vrai ce que vous dites. C'est un peu malheureux d'en arriver là. Moi-même j'ai failli jouer pour la France en jeunes, mais ma situation administrative n'était pas encore claire, car je suis né à Alger de parents congolais.
* Vous avez le choix entre la France, l'Algérie et le Congo. On vous a déjà sollicité ? Le Congo oui, ils savent que j'existe. Ils m'ont appelé par l'intermédiaire d'un ami, mais ce n'était pas très clair.
* Peut-on interpréter le fait de vous voir prendre la nationalité française comme un appel du pied pour l'équipe de France ? Non, ça n'a rien à voir. C'est juste que je trouve cela pratique dans la vie courante, administrativement parlant. Je ne fais d'appel pour personne. Je vis en Europe et des papiers européens, c'est plus pratique pour moi afin de voyager et prétendre évoluer dans ma carrière professionnelle.
* Dites-nous franchement, peut-on espérer vous voir un jour jouer pour l'Algérie ? Vous y trouverez des joueurs connus en France comme Ziani, Saïfi, Yahia, Bougherra… Vous seriez le premier joueur d'origine étrangère à opter pour l'Algérie. Vous y pensez ? C'est sûr que j'y pense de plus en plus. Je me dis que le fait d'être né en Algérie n'est pas le fruit du hasard.
* C'est peut-être le destin qui vous a lié à ce pays. Vous y croyez ? Je ne sais pas, c'est peut-être vrai ce que vous dites, mais franchement, je ne sais pas trop pour l'instant.
* Supposons que vous optiez pour le Congo. Vous seriez un joueur comme les autres, sans histoire particulière. En équipe de France, ce serait pire, car vous allez tomber dans le panneau comme les autres et vous risquez d'attendre longtemps avant de vous imposer. Non, non, c'est vrai ce que vous dites. Moi aussi j'y ai pensé.
* Maintenant, si vous choisissez l'Algérie, ce sera une histoire merveilleuse que vous écrirez. Une sorte de conte de fées, d'un enfant né à Alger et qui a quitté son pays natal pendant des années, avant de revenir par la grande porte. Vous y croyez ? C'est vrai que ça peut-être une belle histoire car ça aura au moins un sens. J'y crois un peu oui.
* De plus, de nos jours, il y a des joueurs comme Drogba, Touré, Kanouté et d'autres qui ont prouvé qu'on pouvait être africain et réussir dans les plus grands clubs d'Europe, sans passer par l'équipe de France. J'en ai souvent parlé avec des amis algériens et ils ne m'ont dit que du bien de la sélection. Mais vous comprenez que je ne peux pas dire : oui, je veux jouer pour l'Algérie ! alors que je ne sais pas du tout comment ça se passe au sein de la sélection algérienne. Il me faut au moins voir comment ça se passe là-bas, avant de donner ma réponse. J'espère qu'on va me comprendre.
* Bien sûr qu'on vous comprendra. Donc, si on a bien saisi, si le sélectionneur algérien vous invite dans les semaines prochaines pour voir l'ambiance qui y règne, vous répondrez présent, c'est ça ? Oui, que ce soit en France ou en Algérie, je suis prêt à venir au prochain stage. Je sais qu'ils jouent souvent en France.
* Vous nous scotchez avec cette déclaration. Vous vous rendez compte de ce que vous venez de dire au moins ? J'en suis très conscient et je vous le répète, je suis prêt à venir lors du prochain stage si l'entraîneur… comment il s'appelle déjà ?
* M. Saâdane. Et bien, si M. Saâdane me convoque, je suis prêt à venir voir comment ça se passe en sélection d'Algérie.
* Un petit mot aux supporteurs algériens ? Je voudrais leur dire que si j'ai fait un pas vers mon pays natal, c'est parce que j'ai toujours gardé l'Algérie dans mon cœur. J'ai aussi beaucoup d'amis algériens qui me poussent vers la sélection algérienne. J'espère que toutes ces marques de sympathie que je reçois vont se traduire en belle histoire entre nous. On a souvent parlé du football marocain et tunisien, le temps est venu aujourd'hui pour qu'on parle plus du beau football algérien.
* Un dernier mot ? Je voudrais saluer, par le biais de votre journal, tous mes amis, notamment Bounouar Bouhennaf, il est de Tlemcen. Je connais un peu les grandes villes d'Algérie, comme Oran, Alger, Tlemcen. J'espère en connaître d'autres si tout va bien. Entretien réalisé à l'Etrat (Saint-Etienne) par Nacym Djender