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Halliche : «Je retournerai au Benfica à la fin de la saison»
Publié dans Le Buteur le 26 - 12 - 2009

«Je grandis un peu plus chaque jour» «On fera de la CAN un nouveau défi»
«Le judo, c'est une sorte d'héritage, le foot par contre, c'est une vraie passion»
Mercredi 23 décembre. La nuit accule le jour dans ses derniers retranchements, s'allongeant de toutes ses forces. Il est six heures passé. A Bachdjarah, les derniers fidèles reviennent de la mosquée. La vie reprend timidement son cours. Les premiers craquements de rideaux rompent avec le silence des lieux. Une gracile lumière d'un lampadaire éclaire les parages. Dda L'mouloud Halliche était déjà au bas de l'immeuble. Vêtu d'un costard cravate, il était tiré à quatre épingles. Deux boutons décoraient les manches de son chemisier. Il a du goût, le patriarche. Assurément ! Le portable collé à l'oreille, il exhortait Rafik à faire vite. «Ne tarde pas, il faut qu'on y aille !» lui dit-il d'un ton mi autoritaire mi amical. Il s'excuse de prendre congé de nous pour un petit moment. «Je vais aller ramener la voiture. Je ne serai pas long» promet-il. Entre-temps, Rafik, le défenseur international, pointe le bout du nez. Vêtu d'une chemise blanche avec une cravate noire à peine perceptible sous un léger pull noir à col en V, il est fagoté léger, mais avec goût tout de même. Une première impression se dégage. Le joueur est affable. De bonne humeur surtout. La discussion s'engage presque instantanément. Sans protocole. Avant de mettre les voiles, il part chercher un cache-nez noir qu'il enroule négligemment autour du cou. A ce moment-là, le défenseur du Nacional de Madera était loin de se douter de ce qui l'attendait là-bas à Ighil Imoula. Le petit et non moins prometteur défenseur du NAHD a pris du poids. Sur une balance, il pèse lourd, très lourd aujourd'hui. Effet Coupe du monde aidant, Rafik Halliche allait avoir droit à un accueil qui n'a rien à envier à celui réservé à la sélection à Alger le 19 novembre dernier. Du moins en matière de passion et d'adulation. Ce n'était pas dix, vingt, trente ou cent personnes, mais toute une région qui était venue à l'accueil. Le P/APC de Tizi N'Tlatha aux premières loges, Rafik Halliche a eu droit à un accueil enthousiaste aux attraits officiels ! Pour décrocher ce tête-à- tête avec l'international, il aura fallu attendre patiemment. D'un clin d'œil, il nous le fera savoir. Il était 14h30 lorsque le joueur nous demanda de le rejoindre dans le salon de l'un de ses oncles paternels. Halliche avait attendu que ça se calme. Que le gros de la foule se disperse. On s'est sentis privilégiés. Débute alors un long entretien qui aura duré plus d'une demi-heure. Le libéro avait reporté à plus tard le déjeuner déjà servi sur les trois tables qui remplissaient la pièce décorée avec un certain goût folklorique. Rafik Halliche se lâche sous les yeux bienveillants du patriarche qui décortiquait chacune de ses réponses. Acquiesçant, souriant, hochant des épaules, ainsi son ton rythmait au gré de l'entretien. Intime… très même.
Rafik, t'attendais-tu un tel accueil en quittant ce matin Alger ?
Du tout ! Je me suis dit, il y aura quelques proches, la famille en gros, mais de là à voir venir autant de monde, alors là… du tout ! Là, je m'aperçois qu'ils sont venus de partout. Pas seulement du village. C'est très touchant. Ça me va droit au cœur, walah !
C'était carrément l'hystérie, il fallait jouer des coudes pour t'atteindre, comment as-tu vécu ça ?
Ça m'a fait plaisir. Je me suis laissé emporter par la foule. Il fallait jouer des coudes, tacler même ! (rires). C'est comme ça. Je suis content d'avoir apporté un peu de gaieté à tout le monde. Content qu'ils aient apprécié ma venue. Je sais que je n'aurai peut-être pas la chance de venir très souvent ici avec mon emploi du temps, donc j'en ai profité à fond.
Il fallait quand même s'armer d'une grande patience, n'as-tu pas eu envie de dire stop !
Non, aucunement. Comme je te disais, ce n'est pas tous les jours que je viens ici. Je me suis déplacé spécialement pour eux. J'ai aimé chaque instant. Il y a eu de la bousculade et tout, mais c'est comme ça. On ne peut pas contrôler la foule. Seulement, j'avoue que ça m'a fait chaud au cœur. J'ai aimé toutes ces marques de sympathie. Je n'oublierai pas. Je pense que je grandis un peu plus chaque jour.
On dirait que tu commences à t'habituer à la vie de star…
Oui. Du moins, j'essaye (rires). J'apprends surtout de la vie. Les expériences me marquent. Je me forge un caractère. Je n'oublie pas, mais je regarde toujours devant moi.
On dirait que le match Egypte-Algérie t'as marqué ?
Oui. Je n'oublierai pas. Je ne pardonnerai pas.
T'as une cicatrice sur le front, c'est…
(Il coupe), c'est un souvenir que j'ai ramené du Caire (rires).
Ighil Imoula est un nom intimement lié à la Révolution, ça représente quoi pour toi ?
Une fierté. Ce village fait partie de l'Histoire de l'Algérie. C'est quand même une fierté d'être d'ici.
Sais-tu que la Déclaration du 1er-Novembre a été rédigée ici ?
Bien sûr. Ça, je l'ai su tout petit. On me l'a appris à la maison. Mes grands-parents m'ont raconté la bravoure de mes ancêtres. Leur amour du pays. J'en suis fier.
T'es bien au chaud dans ton burnous, élégant aussi ; que représente pour toi cet habit ?
Une fierté aussi. C'est le symbole de tamourthiw (ma région, ndlr). Les gens d'ici l'ont confectionné spécialement pour moi, avec mon nom dessus. J'en suis tout ému.
Est-ce l'effet Coupe du monde, tout ça ?
Oui, certainement.
Du tac au tac, essaye de répondre vite et précis, OK !
OK, j'essayerai.
Ton principal trait de caractère ?
Ouvert, très même. Je me fais des amis facilement. Sociable, quoi.
Affable, aussi ?
On me le dit.
La faute qui t'inspire le plus d'indulgence ?
Une faute involontaire. Ça, je pardonne facilement. On se trompe tous un jour ou l'autre, donc voilà, quoi.
Ton défaut majeur ?
Quand je m'énerve, ça part souvent en cocotte ! (Rires).
Tant que ça !
Oui.
T'étais prêt à en découdre alors au Caire, le 12 novembre dernier ?
Oui, grave. J'avais une de ces rages …
Ta devise dans la vie ?
Li yekhdam inal. C'est comme ça, quand tu travailles dur, tu en récolteras les fruits un jour ou l'autre. Je ne crois qu'au travail. Je l'ai appris de mon père tout petit.
Ta plus grande peur ?
Perdre ma famille.
En qui aimerais-tu être réincarné ?
Mon père.
T'es bien le fils de ton père, dis donc…
Absolument. Ceux qui nous connaissent nous trouvent beaucoup de points en commun. On a presque le même tempérament, le même caractère. Je lui ressemble beaucoup, en effet.
Il représente quoi pour toi ?
Il est tout pour moi. Je pense que le mot père résume tout. C'est mon exemple, mon idole, mon ami, ma fierté…tout, quoi.
Combien d'amis véritables ?
Ils sont plusieurs. Je te l'ai dit tout à l'heure, je me fais facilement des amis.
Il y a déjà deux ici …
Oui, Khaled et Mustapha. On a grandi ensemble. J'ai tenu à partager ce petit moment avec eux.
Avec qui ne partirais-tu jamais en vacances ?
Un Egyptien !
La qualité chez un homme ?
Le courage !
Chez une femme ?
La tendresse !
Ton footballeur préféré ?
Zizou !
Ton match référence ?
Face à l'Egypte !
Lequel ?
Celui du Caire !
Ton plus beau but ?
Contre le Mouloudia à Zioui. C'était mon premier but avec le NAHD en seniors. Corner de Si-Kadour que j'ai repris de la tête aux prix d'une belle détente. Un beau but, quoi…
Ton autre sport favori ?
Le judo.
Tu le pratiques ?
Cela va de soi.
Ton père était judoka professionnel, tu n'as pas pensé un jour à faire comme lui ?
Si ! Si ! J'avais débuté le judo à l'âge de quatre- cinq ans. Je suis resté presque quatre ans. Après pour des raisons de disponibilité, j'ai dû abandonner. L'Ecole du Mouloudia a été déplacée. J'ai été contraint du coup d'abandonner.
C'est là que la passion pour le foot est née ?
Oui. Je me suis mis à jouer au ballon avec des copains de quartier. Petit à petit, la passion grandissait.
A quel âge t'as su que t'allais faire du football ton métier ?
Un peu plus tard. Car j'avais les études à côté. Mon père était à cheval. Il tenait à ce que je réussisse dans mes études. J'ai donc fait en sorte de concilier les deux jusqu'à l'âge de 17 ans. Après quoi, j'ai tout quitté pour le foot.
T'étais bon élève au moins ?
Oui, très bon même.
T'as arrêté les études à quel niveau ?
Troisième année secondaire. J'avais du mal à suivre. J'étais capitaine et sélectionné en Espoirs. Je me souviens que j'avais joué un match de championnat la veille et je suis allé passer le bac le lendemain. A ce moment-là, le choix a été fait. Du coup, je ne m'attendais donc vraiment pas à ce que je casse la baraque à l'examen.
Le personnage historique ?
Mes deux grands-pères.
Ton occupation préférée ?
L'Internet.
Livre, film, chanson ?
Je ne suis pas très livre. Je ne lis pas du tout, pour dire vrai. Pour le cinéma, j'aime bien tout ce qui est action et science-fiction. En ce qui concerne la musique, j'entends de tout. Chaâbi, kabyle, rap.
Amar Ezzahi ou Guerrouabi ?
Amar, Guerrouabi, Aït Menguelet, Matoub…Kamel Messaoudi… Ce sont-là mes chanteurs préférés.
T'es du genre costume-cravate, ou jean-basket ?
Jean-basket. Une chemise et un pull léger. En gros, c'est ça.
L'objet indispensable ?
Mon portable.
Ta plus grosse folie ?
Walou ! Je n'en n'ai pas encore fait pour le moment. Seulement, je compte bien offrir une maison à mes parents. Et pour ça, je suis prêt à mettre le paquet.
La dernière dispute ?
Ça remonte à très loin. Je ne m'en souviens plus.
Le cadeau rêvé ?
Ce que je suis devenu !
Le pays où tu iras vivre à la fin de ta carrière ?
L'Algérie. Je suis attaché à mon pays. Je pense y revenir m'installer plus tard.
Le joueur avec qui tu aurais aimé joué ?
Bilel Dziri.
Pourquoi lui spécialement ?
Je l'adore, voilà. En plus du fait que c'est un ami, dans le milieu il reste le numéro 1. T'as vu les matches qu'il nous sort à son âge ! Il est inusable, le mec !
Ton plat préféré ?
Rechta.
Ça doit te manquer ça au Portugal ?
Bezzaf !
Combien de frères et sœurs ?
Pas de frère, mais six sœurs. L'équilibre n'a pas été respecté. (Rires).
Si tu n'étais pas footballeur, t'aurai fait quoi dans la vie ?
J'aurais continué les études. J'aurais fait quelque chose dans ma vie, c'est certain.
S'il ne te restait qu'une heure à vivre, tu ferais quoi ?
Je ferais la prière aux côtés de mes parents.
Blonde ou brune ?
Oups ! Allez, je me mouille… brune !
Adriana Karembeu ou Victoria Beckham ?
Victoria Beckham.
Hamoud ou Coca ?
Hamoud.
La ville ou la campagne ?
La ville.
La montagne ou la mer ?
La mer. Madera ! (Rires).
Un chien ou un chat ?
Un chat. J'en ai déjà un.
Film ou série ?
Série. Prison Break, surtout.
4x4 ou Ferrari ?
Ferrari.
Tchaker ou 5-Juillet ?
5-Juillet.
Premier League ou Liga ?
Premier League.
Christiano Ronaldo ou Messi ?
Messi. Da koulechi ! (Il a tout raflé)
Tu resteras au Nacional ou tu comptes retourner au Benfica ?
Je veux retourner au Benfica. Je pense qu'il est temps pour moi de passer un autre cap. Je me sens capable de m'imposer là-bas.
Y a-t-il eu des propositions dans ce sens ?
Non, pas pour l'instant, mais je sais que d'ici à l'été prochain, il y aura quelque chose.
Comment le Nacional vit-il ton départ à la CAN pour un mois ?
Ils n'ont pas trop le choix. Ils aimeraient me garder, même s'ils ne disent rien. (Rires). Les règlements sont clairs, ils n'y peuvent rien.
Tu replonges dans l'ambiance de la sélection le 26 de ce mois, à l'occasion du stage du Castellet ; tu comptes l'aborder avec quel état d'esprit ?
Ce ne sera que du bonheur. Ça commençait à me manquer. Je serai super content de retrouver les copains. On va encore embarquer pour une autre aventure. J'espère qu'elle sera couronnée de succès.
Il y aura la CAN dans pas longtemps, sincèrement, fais-tu de cette compétition un objectif ?
Bien sûr. On ira là-bas jouer nos chances à fond. Nous avons une réputation à défendre. On sait qu'on nous attend de pied ferme. On tâchera de gérer match par match.
Comment allez-vous faire sans l'effet surprise ?
On fera sans ça. Je pense que nous avons acquis de l'expérience avec le temps. Là, il y a un bon groupe qui a du caractère et de la personnalité. On cherche à grandir, à progresser. Nous avons nos atouts. On se battra avec le cœur, c'est certain.
Vous avez placé la barre très haut après la qualification à la Coupe du monde, avez-vous conscience que le peuple sera plus exigeant avec vous lors de cette CAN ?
C'est son droit. On sait tout ça. Personnellement, on me le fait rappeler au quotidien. Du coup, je ne risque pas de m'endormir sur mes lauriers ! (Rires). Non, on ira pour faire honneur à l'Algérie. Personnellement, j'ai envie de remporter un titre avec la sélection. C'est le rêve de tous les joueurs. Après, il va falloir être patients. Il faut se mettre dans la tête que la concurrence sera rude.
De la pression ?
Oui, énormément. Seulement, j'essaye d'en faire fi. L'Algérie était quand même absente lors des deux dernières éditions et puis voilà qu'on met la barre très haut pour cette fois. Ceci va nous motiver encore plus. L'ambition est un bon stimulant.
Entretien réalisé par Achour Aït Ali


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