«Certains ont tenté de me renverser comme en 82 et 86» Le Buteur et El Heddaf ne sont pas visés par les récentes déclarations du sélectionneur national où il avait déversé sa colère sur certains organes de presse, les accusant d'avoir tenté de le renverser au détriment de l'intérêt de l'équipe nationale. Ceux qui avaient pensé ou tenté parfois d'insinuer que Le Buteur et El Heddaf étaient les premiers visés par Saâdane se trompent lourdement. La preuve, le cheikh nous a invités à son hôtel, là où est basée son équipe, pour nous accorder en exclusivité cette longue interview. Entretien. * Nous tenons, avant tout, à vous remercier d'avoir accepté de nous recevoir à l'hôtel des Verts et de nous accorder cet entretien… C'est mon devoir et si je ne voulais pas vous recevoir, je ne serais pas ici avec vous dans la réception de l'hôtel. Allez-y, posez les questions que vous voulez, je suis là pour vous répondre en toute franchise, d'autant que ce n'est pas la première fois que vous m'interviewiez. * Dites-nous, d'abord, si vous tenez encore rancune aux journalistes algériens ou si votre colère s'est dissipée après la victoire contre le Mali… Pour être franc avec vous, je ne suis pas en colère contre tous les journalistes. J'ai visé quelques-uns de vos collègues seulement, et ceux-là se reconnaîtront d'eux-mêmes. Ils savent très bien que je parlais d'eux et seulement d'eux. Bien au contraire, je ne suis pas en colère contre les journalistes professionnels qui ont fait convenablement leur boulot, après la défaite contre le Malawi et qui nous ont soutenus dans les moments difficiles, particulièrement après la défaite contre l'Egypte. Non, moi, je n'oublie pas, je ne suis pas un ingrat, je sais que la presse a beaucoup contribué à la réussite de cette équipe. * Selon vous, la défaite contre le Malawi était une occasion pour eux de vous tomber dessus, c'est cela ? Je vais vous expliquer les choses. Ceux qui m'ont tombé dessus se sont trompés lourdement, car ils se sont trompés de cible. En m'attaquant, ils ont atteint l'Equipe nationale qui doit être au-dessus de toute considération et qui doit être protégée, quelles que soient les conséquences. Je ne suis pas là pour me faire apprécier et je ne demande pas aux journalistes de dire que du bien de ma personne. Je leur demande seulement d'être objectifs dans leurs critiques et professionnels dans leur travail, et de ne pas verser dans des considérations qui ne font que nuire à l'Equipe nationale. Des critiques destructives dans le but de nuire et uniquement de nuire. * Qu'est-ce qui vous rend aussi convaincu de leurs intentions ? Je ne suis pas né de la dernière pluie, j'analyse bien les choses et j'observe bien. Ceux qui ont essayé de me descendre en flammes après la défaite du Malawi n'ont pas attendu ce match pour le faire. Ils nous ont déjà visés, l'Equipe nationale et moi, avant même qu'on rentre en stage au Castellet, lorsqu'ils ont voulu profiter de mes déclarations sur mes appréhensions, en prévision de cette CAN. C'est quand je faisais remarquer que la CAN est mal tombée, que nous n'avons pas assez de temps pour bien la préparer, que ça allait être compliqué pour nous et que les conditions climatiques allaient être difficiles. Ils ont alors entamé leur campagne de casse et leurs intentions étaient claires comme l'eau de roche. * Selon vous, qu'est-ce qu'ils y gagnent ? Leur but, c'est de nous obliger, mon staff et moi, à démissionner avant la CAN ou pendant la compétition. C'est un complot qui s'est tissé contre moi dans les coulisses pour me pousser à la porte, comme cela a été fait en 82 et en 86, afin de réaliser leurs intérêts personnels. C'est cela leur but. * Vous voulez dire qu'il y a des gens dans l'ombre qui mènent cette campagne ? Ecoutez, moi, je suis quelqu'un qui croit en Dieu et au destin et je ne peux, en aucun cas, rentrer dans ces détails. Je suis là pour une mission précise et je remercie Dieu de m'avoir aidé dans tous mes pas, car jusqu'à présent, j'ai tout réussi. Sans prétention aucune, ce que j'ai pu réaliser, aucun autre entraîneur ne l'a fait avant moi, puisque j'ai réussi à qualifier l'EN en Coupe d'Afrique des nations, après une absence aux deux dernières éditions et en Coupe du monde après une absence de 24 ans, tout cela sans que je ne touche à la réputation ou à la dignité des entraîneurs qui m'ont précédé. Je le redis, aucun entraîneur n'a réalisé ce que j'ai réalisé et, de ce fait, ma conscience est tranquille, quoi qu'ils puissent dire à l'avenir. Que je reste à mon poste ou non, tout ce qu'ils pourront dire ne m'intéresserait guère et ne pourra en aucun cas m'atteindre, car, comme je viens de vous le dire, ma conscience est tranquille. Et, croyez-moi, ça ne m'intéresse plus de savoir qui sont les gens qui sont derrière cette campagne. * Vous ne pensez pas que vous êtes trop sensible à la critique au point de n'accepter aucun reproche ? Par exemple, après la défaite contre le Malawi, toute l'opinion sportive en Algérie avait remis en question, et même en cause, vos choix tactiques, chose que vous n'avez pas acceptée, contrairement à la majorité des techniciens dans le monde entier qui acceptent sportivement les critiques des différents médias… Ecoutez, j'avais dit dès le départ que les choses allaient être difficiles pour nous et que nous risquerions de perdre n'importe quel match, pas uniquement celui du Malawi. Et ceux qui nous ont sévèrement critiqués sont allés jusqu'à faire douter du nationalisme des joueurs. S'ils étaient réalistes et professionnels, ils n'auraient pas fait cela. Parce qu'ils savent que les conditions climatiques dans lesquelles nous avons joué étaient impossibles. Je demande à tous ceux qui ont ciblé leurs attaques contre nous de venir se tenir debout quelques minutes seulement sur le terrain. Je ne leur demande pas de courir ou de jouer, mais de se tenir debout pendant quelques minutes sous cette chaleur, et on va voir quelle serait leur réaction. Nous avons joué dans une cocotte-minute sous un soleil brûlant. Il est impossible de rester cinq petites minutes sous ce soleil de plomb. Et je vais vous raconter ce qui s'est passé avec un des joueurs qui n'a pas pu tenir son rôle à cause de cela… * Allez-y… Prenez le cas de Chaouchi qui a fait un grand match à Khartoum qui lui valu l'admiration et le respect de tout le monde. Ils ont fait de lui un héros et ils sont allés jusqu'à le comparer aux meilleurs gardiens du monde. Il le mérite amplement, car personne ne peut minimiser son rôle pour la qualification de l'Equipe nationale. Mais dès qu'il a commis deux erreurs qui nous ont coûté deux buts face au Malawi, à cause, je le dis encore une fois, des conditions difficiles de la rencontre, ils ont curieusement oublié tout cela et l'ont descendu en flammes. C'est trop facile. Tout d'un coup, ils ont tout oublié et leur mauvaise foi les a poussés même à inventer des tas de choses, comme un accrochage avec Ousserir et je ne sais quoi d'autre. C'est tout le contraire qui s'est produit avec nous. Nous l'avons soutenu et nous lui avons fait comprendre qu'il n'est pas responsable de la défaite. Nous lui avons remonté le moral et vous avez vu le résultat face au Mali où il a sorti un grand match. * Apparemment, il n'y a pas que Chaouchi qui a été affecté, non ? Oui, c'est sûr, tous les joueurs ont été affectés. Je vous ai toujours dit, que ce soit en aparté ou à travers mes conférences de presse, de ne pas faire de nous de super héros et ne nous traitez pas comme moins que rien non plus. Je vous demande de nous mettre au rang qu'on mérite, c'est tout. C'est ce qui s'est passé avec Chaouchi quand on l'a hissé très, très haut après la victoire contre l'Egypte, mais on n'a pas hésité à le bousiller après la défaite contre le Malawi. C'est ce qui explique, en partie, son comportement avec un de vos confrères. Cela est inacceptable, Chaouchi a besoin de soutien et de réconfort, non qu'on le démolisse à la première occasion. * M. Saâdane, pour que les choses soient claires, est-ce que vous savez qu'il y a des organes de presse qui sont restés solidaires avec vous et avec l'équipe nationale, même après la défaite contre le Malawi, à l'image du Buteur et El Heddaf qui ont considéré cet échec comme un accident qui peut arriver à tout moment et à n'importe quelle sélection ? Je serai franc avec vous, je n'ai pas lu toute la presse au lendemain de cette défaite. Mais j'ai eu toutes les informations autour de tout ce qui a été écrit et dit, et à propos des journaux qui nous ont soutenus et de ceux qui nous ont abattus. Vous, par exemple, vous êtes sûrs que vous aviez fait votre travail de manière professionnelle, et je suppose que votre conscience est tranquille, comme la mienne. Et vous devez être soulagés maintenant de savoir que je ne vous ai pas visé. Je ne mets pas tout le monde dans le même sac, je répète, ceux que j'ai visés savaient très bien que je me suis adressé à eux. Ceux-là m'attendaient toujours au tournant puisque même après le Malawi, ils espéraient toujours un autre faux pas contre le Mali pour atteindre leurs objectifs. * Si vous le voulez, tournons la page sur ce conflit entre la presse nationale et la sélection, et parlons plutôt du match décisif qui attend les Verts contre l'Angola. Comment s'annonce-t-il ? Cela va être très difficile, dans la mesure où nous allons affronter le pays organisateur, sur son terrain et devant son public, et dans des conditions où lui aussi a besoin des points du match pour passer au deuxième tour et pour terminer premier du groupe également. Nous savons tout cela et nous allons nous battre jusqu'au bout pour arracher la qualification. Nous allons nous qualifier ce soir, et si nous sommes éliminés, j'aurais toujours la conscience tranquille. * L'Angola va vous affronter sans son buteur Flavio, cela change-t-il quelque chose aux données ? Il est vrai qu'il s'agit d'un redoutable attaquant qui est efficace de surcroît, comme il a pu le prouver durant les deux derniers matches, mais je ne pense pas que l'Angola va souffrir de son absence pour autant, car leur effectif est bien étoffé. Et puis, vous me parlez de l'absence de Flavio et vous avez oublié que nous aussi nous serons très amoindris. Par exemple, Saïfi, dont j'ai souhaité la participation, ne sera pas là à cause de sa blessure et de son état psychologique après ce que son club vient d'entreprendre contre lui. Il y a Bezzaz qui, dès qu'il a commencé à retrouver ses moyens, et dès qu'on a commencé à l'inclure dans nos calculs, s'est blessé à son tour, Lemmouchia et Antar Yahia dont nous n'avons pas bénéficié de leurs services depuis le début, sans oublier Gaouaoui qui est malade et Meghni qui vient de rechuter au moment où nous pensions qu'il allait se remettre de sa blessure. Vous ne voyez pas que beaucoup d'éléments clés vont nous manquer ? * Qu'en est-il de Matmour qui ne s'est pas entraîné avec le groupe ? Il n'y a pas de crainte, il sera présent contre l'Angola. Il souffre seulement de quelques douleurs et il va s'en remettre inch'Allah. * Tout le monde s'attend à ce que vous récupériez Anthar Yahia et Meghni pour cette rencontre, d'autant qu'ils s'entraînent avec le groupe, non ? Ecoutez-moi bien, quand vous me dites qu'un joueur s'est remis de sa blessure et qu'il est prêt à jouer, cela veut dire qu'on va l'utiliser comme titulaire. Or, ce n'est pas le cas. On ne peut pas incorporer un joueur dans le onze rentrant, alors qu'il revient je blessure. Concernant Anthar Yahia, il n'a pas joué depuis le match face à l'Egypte. Il est impossible de l'incorporer d'entrée dans un match pareil qui sera certainement caractérisé par un grand engagement physique. En l'alignant, ce serait faire preuve d'insouciance, et de son état de santé et de l'intérêt de l'équipe. Idem pour Meghni qui vient juste de s'en remettre. Ils ne seront jamais en possession de tous leurs moyens. De plus, il y a risque de les voir rechuter. Ils seront toutefois parmi les 18 et on verra après si on pourra les utiliser à un moment de la rencontre. * Dans ces conditions, il est probable que vous donniez la chance à Ziaya ou Abdoun, deux joueurs qui n'ont pas encore été incorporés d'entrée… Sachez que le seul changement que je vais opérer concerne un poste en attaque, celui qu'avait occupé Bezzaz. Car je compte reconduire le groupe qui a joué face au Mali. Il n'y a pas que Ziaya, il y a Abdoun et Bouazza aussi, même si ce dernier a eu quelques bobos. Je vais utiliser un de ces trois joueurs. Maintenant je dois dire que celui qui ne sera pas incorporé d'entrée devra se tenir prêt, au cas où…. Si quelques journalistes ont souhaité, comme vous dites, votre départ, ce n'est certainement pas le cas du peuple algérien qui vous témoigne toujours son soutien. * Qu'avez-vous à lui dire ? Le peuple algérien n'a pas perdu confiance en moi et me soutient toujours comme vous dites, parce qu'il sait que je travaille dans l'intérêt de l'Equipe nationale et du pays. Je l'en remercierai jamais assez, mais qu'il sache que je ne me soucie plus de rien à présent, car je suis tranquille. Entretien réalisé par Adlane C.