«Je convaincrai Tafer et Belfodil de jouer pour l'Algérie» On vous a vu à Al Jazeera dans l'émission consacrée à Madjer, quel était l'objet de votre présence à Doha exactement ? J'ai répondu à une invitation de la chaîne Al Jazeera qui voulait faire une surprise à Madjer pour la grosse émission qu'on lui a consacrée. On m'a sollicité en cachette pour me demander si je pouvais y assister en direct sur le plateau. Comme ça faisait longtemps que je n'avais pas vu Rabah, j'ai accepté volontiers. Il a beaucoup apprécié la surprise lorsque j'ai fait mon entrée sur le plateau. Madjer, c'est quelqu'un de très agréable et c'était avec un immense plaisir qu'on s'est revus à Doha. D'ailleurs, on est restés ensemble pendant tout mon séjour. On se voyait tous les jours avec un plaisir tout le temps renouvelé. Quels sont les faits qui vous ont marqué dans cette émission ? Eh bien, j'ai ressenti beaucoup de joie lorsqu'ils ont parlé de l'époque où on jouait tous les deux au Matra à Paris. Ensuite, lorsqu'on a parlé de sa carrière à Porto, là où il avait gagné la Ligue des Champions avec ce but sublime de la talonnade qui est devenue aujourd'hui une marque déposée dans le monde entier. Lorsqu'on parle d'un but du talon, on dit communément que c'est «une Madjer» ! Il est donc entré dans la légende grâce à ce but somptueux. Il y avait beaucoup d'émotion dans cette émission… Et comment ! Ça débordait d'émotion dans cette émission. On était tous émus avec lui. Notamment le passage où il est allé rendre visite à ce vieillard qui était malade à Porto, ou quand la soeur de Madjer est allée se recueillir sur la tombe de son père. C'était vraiment très touchant. C'est un très bel hommage qu'on lui a rendu. Et le fait qu'on lui ait fait la surprise avec Rachid Mekhloufi, je pense que ça lui a fait un grand plaisir. Vous avez parlé de la fameuse déclaration deMekhloufi au sujet du retour deMadjer à la tête des Verts après leMondial ? Là, Mekhloufi a surpris tout le monde, nous les premiers, parce que je peux vous assurer que personne ne s'attendait à une telle déclaration. Mais à la fois, je dis que ce qu'il a évoqué est tout à fait logique, du fait qu'un joueur de la trempe de Madjer a tout pour réussir en Equipe nationale. Vous n'avez qu'à revoir les noms des personnes qui sont passées par l'EN et vous verrez que Madjer est le plus représentatif de tous à ce poste. Il a largement les compétences et le charisme pour diriger l'EN. En Algérie, on a pris l'habitude d'aller chercher des étrangers à droite et à gauche, alors que chez nous, on a des hommes qui répondent parfaitement au profil recherché et qui peuvent très bien assumer ces responsabilités. Selon vous,Madjer est-il le mieux indiqué pour prendre l'Equipe nationale, après le Mondial ? Pourquoi pas ? En tout cas, pour moi oui. Madjer est le mieux indiqué pour succéder à Saâdane. Franchement, je n'en vois pas d'autre, sur le marché national. Je dirai même que Madjer est le seul entraîneur algérien à pouvoir prendre ce poste. Vous deviez présenter un projet de cellule de prospection des joueurs algériens en France à la FAF. Qu'en est-il au juste ? J'ai rencontré Raouraoua à Paris il y a deux mois de cela, et je lui ai soumis mon projet. Au départ, il m'a paru emballé par ce que je lui ai présenté. Par la suite, il y a eu des informations qui disaient que j'allais bientôt intégrer la fédération, alors que c'était totalement faux, puisque je n'ai jamais été sollicité par qui que ce soit dans ce sens. En quoi consistait votre projet au juste ? Mon projet se voulait un lien entre les joueurs évoluant en France ou en Europe, et les différentes sélections d'Algérie. Je voulais qu'on récupère tous les joueurs franco-algériens potentiellement sélectionnables et qui sont dans les centres de formations sérieux. Ceci, pour les récupérer avant qu'ils soient pris par l'équipe de France ou une autre sélection européenne. Je voulais servir de lien entre la FAF et ces joueurs, aller les voir, discuter surtout avec leurs parents, les suivre et faire un travail propre dans le temps pour les diriger en temps opportun vers la sélection d'Algérie. Et que vous a répondu Raouraoua ? Il m'a dit que ceci est possible pour les joueurs professionnels, mais pour les jeunes, il n'y a pas d'obligation d'aller jouer pour une sélection nationale. Ce qui est vrai, car les joueurs professionnels sont soumis de répondre à une convocation en sélection nationale, contrairement aux jeunes. Cela pose un sérieux problème en effet. Mais en parallèle, mo je dis que si on ne fait rien pour ces jeunes, il n'y aura rien qui avancera comme on le souhaite. Les choses vont rester comme elles le sont et l'on continuera de regretter que des joueurs comme Zidane, Nasri, Meriem ou Benzema n'aient pas joué pour l'Algérie. Je pense qu'il y a aujourd'hui une vraie nécessité d'aller voir ces jeunes, ne serait-ce que pour leur dire que l'Algérie les veut bien en sélection. C'est pour cela que j'ai été un peu déçu de la réponse de Raouraoua, en me disant qu'il n'y a pas d'obligation pour ces jeunes et tout. Je pense qu'il y a un vrai travail de fond à faire dans ce sens. Ce serait injuste de laisser cette situation perdurer. Pensez-vous être capable de récupérer des joueurs comme Tafer et Belfodil ? Bien sûr ! Mais bien sûr que je peux le faire. Je dirai même que c'est très facile pour moi de récupérer Tafer, Belfodil et bien d'autres joueurs talentueux de Lyon, puisque j'ai vécu toute ma vie dans cette ville. Je connais pratiquement tout le monde dans ce club. Je peux donc facilement activer ici pour sensibiliser ces jeunes talents. J'ai aussi des liens dans d'autres clubs, comme au PSG et ailleurs où des talents qui peuvent jouer pour les Verts sont nombreux. Mais ces joueurs vont aller naturellement en équipe de France, si l'Algérie ne fait rien pour les récupérer entretemps. Cela dit au passage, rien ne leur garantit une place en équipe de France. Mais si on n'arrive pas à faire un vrai travail de fond aujourd'hui, je pense qu'on va les perdre bêtement eux aussi. Que faut-il faire pour les convaincre d'opter pour l'Algérie ? Il faut les faire travailler comme on leur fait de l'autre côté. Leur montrer que l'Algérie les veut autant, sinon plus. On a beaucoup d'atouts pour les convaincre, mais il ne faut pas tout dévoiler. N'oubliez pas que l'Algérie est le pays de leurs parents. Ils ont donc forcément des attaches profondes avec leur famille et leur ville d'origine. La France leur promet une carrière comme celle de Zidane et l'Algérie ? Vous savez, il n'y a qu'un seul Zidane sur terre ! Ils vont peut-être avoir une sélection en équipe de France, mais qui leur garantirait autant de sélections que Zidane ? Personne. Tandis qu'avec l'Algérie, des joueurs de bon niveau seront sûrs de jouer toute leur carrière en équipe d'Algérie. Personne ne les lèsera. Il faudra qu'ils sachent que d'abord, ils vont choisir leur pays, celui de leurs parents et de leurs grands-parents. Il faut les sensibiliser de ce côté-là, leur parler de leurs racines, de leur famille et de tous les cousins qui seront fiers de les voir jouer pour les couleurs de l'Algérie. Ce n'est pas rien de jouer pour sa famille ! En plus, il y a l'effet Coupe du monde qui pourrait influer sur le choix de ces jeunes, non ? Bien évidemment ! Le fait de voir l'Algérie participer au Mondial avec toutes les grandes nations du monde aura sans doute un impact formidable sur les jeunes issus de l'émigration. Ils vont tous vouloir s'identifier aux joueurs que supportent leurs parents et leur famille. C'est une chance extraordinaire qui se présente devant nous, il ne faut donc pas la rater. C'est le moment de faire un travail profond pour profiter de cette situation positive autour de l'EN. A Doha, on a entendu dire qu'une place de consultant sur Al Jazeera Sports vous intéressait… C'est vrai, j'ai pris des contacts avec les responsables d'Al Jazeera Sports, mais je pense que ce ne sera pas pour tout de suite, car ils m'ont fait savoir qu'ils ont déjà bouclé l'effectif qui animera la Coupe du Monde. Je leur ai dit que j'étais disponible et cette expérience m'intéressait fortement, surtout qu'ils diffusent tous le championnats du monde. C'est quand même très intéressant. En tout cas, je me tiens prêt pour cette aventure… Quels sont les échos qui vous sont parvenus au sujet deMeghni à Doha ? J'ai eu de très bons échos au sujet de Meghni. Il est passé par les mains du docteur Chalabi qui est très apprécié dans le milieu du football, tant en Europe qu'ailleurs. Je suis sûr que Meghni sera prêt pour le Mondial. Ce que j'ai entendu dire à son sujet lors de mon séjour à Qatar est très positif. C'est rassurant. Vous avez aussi tenté de sceller vos relations avec Lakhdar Belloumi avec qui vous étiez en conflit depuis longtemps, non ? Oui, mais on s'est déjà rapprochés une fois lors du Ballon d'Or du Buteur/El Heddaf. Je croyais que l'histoire de 1986 était morte et enterrée, mais il a continué une ou deux fois à me critiquer dans la presse. Ceci dit, je ne lui tiens pas rancune. On s'est revus cette fois encore à Doha et on a même dîné ensemble. Vous vous êtes bien parlés tous les deux cette fois ? Non, on n'était pas seuls. Il y avait quelques amis avec nous et on avait échangé quelques mots sans rapport avec ce qui nous éloignait l'un de l'autre. On s'est revus le lendemain pour voir le match entre l'Inter et le Barça, mais on ne s'est rien dits de particulier à ce sujet… Vous voulez bien le revoir une bonne fois pour toutes pour tirer un trait définitif sur votre conflit ? Oui, pourquoi pas ? De mon côté en tout cas, ça ne posera aucun problème. J'ai parlé de cette histoire avec Madjer et il m'a dit que Lakhdar était quelqu'un de bien et que ce n'était pas un mauvais mec du tout. C'est vrai qu'il avait dépassé les bornes à l'époque en disant que j'étais un fils de harki et que j'avais déchiré mon passeport algérien, mais aujourd'hui, je suis persuadé que ça été dit ous l'effet de la colère. En tout cas, je veux bien croire ce que m'a dit Madjer à son sujet. Mais je suis prêt à en finir de manière définitive et régler ce vieux conflit une bonne fois pour toutes. Et pour cela, il n'y a pas mieux qu'une bonne discussion en tête à tête. Entretien réalisé par Nacym Djender
