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Hafid Derradji : «Ce sont les forces du mal qui m'ont poussé à quitter l'Algérie»
Publié dans Le Buteur le 26 - 08 - 2009

«Le jour où l'heure de mon retour en Algérie sonnera, je le ferai par la grande porte. »
* Pourquoi Al Jazeera et pas Art, est-ce pour plus d'argent ?
En fait, je n'ai pas choisi Al Jazeera pour plus d'argent. Je voulais surtout sortir de l'Algérie après toutes les pressions que j'avais subies au travail. Je voulais plutôt décompresser en dehors du pays. Je n'ai pas été au plus offrant. Il s'est juste trouvé que la proposition d'Art ne me permettait pas de sortir du pays. On m'avait demandé de diriger le bureau d'Art à Alger. Par contre, Al Jazeera m'offrait de vivre loin de ce milieu que je voulais fuir. J'ai donc choisi de partir à Doha. En même temps, le langage de M. Nacer Al Khelifi, le nouveau directeur d'Al Jazeera, m'avait séduit au plus haut point.
* Quelles sont les propositions que vous aviez eues de l'étranger lorsque vous étiez en Algérie ?
En 2003, j'avais déjà reçu une offre d'Al Jazeera. Il y avait aussi MBC, Abou Dhabi également, mais je n'avais pas l'intention de quitter mon pays. Par la suite, j'avais ressenti l'obligation de partir. Je n'en pouvais plus. J'étouffais même au point de décider de partir sans me retourner. Je ne voulais pas rester à Alger et répondre à la même question dehors. Tout le monde me demandait pourquoi j'avais quitté la télévision algérienne. Un break s'imposait inévitablement parce que ça devenait invivable pour moi.
* Quelle impression aviez-vous eue en arrivant à Doha ?
J'ai été très bien reçu en arrivant à Doha. Malheureusement, je n'ai pas pu apprécier la ville parce que je suis arrivé le 20 juillet, c'est-à-dire au moment des grandes chaleurs. J'avais commencé à Al Jazeera avec l'Euro, puis j'ai rejoint le Qatar juste après. Je ne vous raconte pas la chaleur sur place en été. En plus, je m'étais retrouvé d'un seul coup seul, sans ma famille. C'était vraiment très dur au début. Je n'étais pas habitué à un tel climat et à une telle situation. J'étais tellement mal dans ma peau que j'avais sérieusement pensé à retourner en Algérie. Franchement, je n'étais pas loin de rentrer à la maison. C'était difficile de perdre tous mes repères d'un seul coup. Mais Dieu merci, l'arrivée de ma petite famille m'a fait changer d'avis. Le soutien de ma femme a été salvateur, surtout que le mois de Ramadhan arrivait juste après. Malgré cela, il m'a fallu beaucoup de temps pour admettre que je ne travaillais pas pour la télévision algérienne.
* Vous avez démissionné au mois de mars et vous êtes parti en vacances. Comment aviez-vous vécu ces moments là ?
C'était très difficile à vivre. J'avais démissionné le 1er mars, puis je suis parti en vacances en Turquie, en compagnie de ma femme et de mes enfants. Je m'étais retrouvé avec 12 mois de congé. Il fallait impérativement décompresser. Mais le retour à Alger a été une fois de plus difficile.
* Comment avait réagi votre famille ?
Ils ne savaient pas grand-chose de ce que j'avais enduré. Même pas ma femme. A ce jour, je continue de lui épargner les détails de l'histoire. Il n'y avait que mon grand frère Nouredine qui était au courant de la situation. C'est lui qui m'a soutenu jusqu'au bout. Dieu sait ce que j'avais enduré.
* Quelle sorte de pression aviez-vous vécue ? Que pourriez-vous dévoiler à nos lecteurs ? Cela reste un peu flou, Hafid.
Les gens avaient posé la question à M. Belkhadem, en lui disant qu'il était derrière mon départ de la télévision. Franchement, ce n'est pas à cause de Belkhadem que j'ai quitté l'Algérie. Il était peut-être un élément d'un ensemble de faits qui ont abouti à mon départ, mais certainement pas à cause de lui personnellement.
* Que s'est-il passé au juste entre vous et l'ancien Chef du gouvernement ?
Il m'avait appelé un soir pour contester la couverture d'un événement auquel il avait participé. Il était dans son droit, vu que c'était lui le Premier ministre. Je lui avais donné raison. Le DG était absent, c'était donc moi qui devais assurer l'intérim et assumer cette responsabilité.
* Qu'est-ce qu'il vous a reproché au juste ?
D'avoir fait passer les images d'autres ministres plus que les siennes. La couverture d'un événement auquel prend part un premier ministre devrait naturellement se focaliser d'abord sur le Chef du gouvernement et non pas sur ses subordonnés. Ce qui est très compréhensible. Il n'y a aucun doute, l'équipe qui assurait la couverture avait bien failli à ses devoirs. Et j'en faisais partie bien évidemment en tant que premier responsable en l'absence du DG.
* Mais pourquoi ce problème a-t-il pris toute cette ampleur qui vous a coûté votre place par la suite ?
Il y a eu ces forces du mal que j'ai évoquées plus haut, qui se sont manifestées dans les coulisses pour aller sans doute dire des choses à M. Belkhadem. On a dû lui raconter que je n'étais pas pour lui comme Chef du gouvernement, ou que je n'étais pas du FLN ou une bêtise de ce genre.
* On vous a reproché vos anciennes affinités politiques ?
Je ne suis ni du FLN, ni du RND ni d'un quelconque parti politique. Le lendemain, M Belkhadem m'a envoyé une lettre pour me dire de ne plus passer ses images à la télévision. Le lendemain, j'ai été obligé de le passer à la télé de par son rang de Chef du gouvernement. Je ne pouvais pas faire autrement. Je n'étais pas en mesure de prendre une telle responsabilité. C'était lui le Premier ministre, tout de même !
* Il était vraiment vexé ?
A sa place, j'aurais fait pire. Je crois même qu'il a été conciliant. Quelqu'un d'autre aurait pris d'autres mesures et il aurait été dans son droit. C'est à partir de ce moment que j'avais commencé à m'inquiéter. Après tant de dévouement pour mon travail, je ne pouvais pas imaginer qu'un jour, j'allais recevoir un appel du Chef du gouvernement à 22h pour me faire tous ces reproches.
* C'est tout ce qu'il vous a dit ?
Il m'avait dit que je privilégiais mes amis au détriment des autres. Il m'a dit que la télévision algérienne était devenue celle de mes amis et que je n'avais plus à passer ses images désormais.
* Quels amis il visait au juste ?
Je n'en sais rien, moi ! Quels amis j'ai moi parmi les ministres ? Je ne peux pas vous le dire. Je suis sûr que ce sont des personnes mal intentionnées qui ont été lui raconter ces choses-là. Je n'avais que des relations de travail avec les gens. Même à la télévision je n'ai jamais eu d'amis. J'avais des collègues et c'est tout. Mes amis sont tous en dehors de la télévision.
* Tout avait donc changé à partir de ce coup de téléphone, non ?
Exactement. C'est à partir de ce moment-là que je commençais à me dire que ça allait changer pour moi. Je me disais que désormais, je pouvais avoir des problèmes à tout moment. Je me suis dit que je craignais même de perdre Hafid Derradji, le journaliste. Ma carrière était compromise. Je commençais alors à céder mes responsabilités en tant que DG adjoint. Je sentais que j'étais rentré dans une zone de turbulences. On pouvait m'atteindre à tout moment. Ça ne rigolait plus avec ces gens-là.
* Il y a sans doute eu d'autres pressions ?
Je dois être très clair dans ce que je dis. Que les gens sachent qu'à part ce que j'ai dit, je n'ai plus rien eu avec M. Belkhadem. Je dois le mettre en dehors des autres pressions dont j'ai été victime. Je veux qu'on soit très clair sur ce point.
* Qui d'autre alors ?
Je ne peux pas le dire. C'est impossible pour l'instant. Et n'allez pas penser que c'est le président de la République ou des généraux de l'armée. Loin de là.
* Qui alors, Bourourou ?
(Il sourit un moment.) Je dirai que ce sont des intermédiaires. Des gens qui gravitent autour du pouvoir. Là, la pression était devenue insoutenable.
* Quel a été le point de discorde avec ces «fantômes» ?
On a été dire que j'avais critiqué le président de la République et que je médisais à son sujet à la télévision. Je ne rappelle même pas si on a rapporté à M. Bouteflika ces mensonges. Comment puis-je moi, jeune et simple citoyen, m'attaquer à un des symboles de l'histoire de l'Algérie ? Il faut vraiment être un ingrat pour se mettre à dénigrer quelqu'un comme M. Bouteflika. Malheureusement, certaines personnes dans l'entourage du pouvoir ont cru à ces bêtises et ont décidé de me mettre la pression pour que je parte.
* Mais critiquer le président de la République de manière objective est un acquis dont l'Algérie peut s'enorgueillir, non ?
Le président de la République représente le peuple algérien. Si on l'insulte, on insulte tout le peuple. Qu'on soit avec lui ou contre lui, nous avons aussi le droit de critiquer ses actions. C'est un acquis comme vous dites. Mais il ne faut jamais verser dans la méchanceté gratuite et dans l'insulte. On a le droit d'émettre les critiques qu'on veut à l'endroit de ses enfants de son épouse et même de nos parents. Mais jamais les insultes. Le président de la République lui-même a critiqué son travail et celui de son gouvernement. C'est ce qui fait avancer les choses.
* Et Hamraoui dans tout cela, vous a-t-il soutenu ?
Hamraoui, c'est un f'hel. Il a été très courageux avec moi. Il ne voulait pas que je parte. Je lui en serai reconnaissant pour toujours. Il a été très déçu. Il m'a soutenu jusqu'au bout.
* Peut-on dire que votre départ est définitif de l'Algérie ?
Jamais ! Dans ma tête, ce n'est qu'un break obligé que je fais. Cela peut durer un an, cinq ans ou dix ans, ou deux mois. Tout ne dépend pas de moi. Je pourrais même surprendre et revenir dans les 48 heures qui viennent. J'attends le signal de mon destin pour revenir. Mais je ne me considère pas comme parti pour toujours. Je pourrais même quitter Al Jazeera pour une autre chaîne à tout instant. Tant que je serai désiré, je resterai à Al Jazeera et à Doha. Mais nul ne peut prédire pour combien de temps.
* Est-ce que vous redécouvrez la passion du journalisme ?
Vous ne pouvez pas imaginer comment je revis à Al Jazeera. Je redécouvre le métier que j'ai toujours aimé, celui de commentateur sportif.
En Algérie, je ne commentais que les matchs de l'EN et ceux de la Ligue des Champions d'Europe. J'avais perdu la main, comme on dit.
* C'est ce qui a fait que vos débuts avec Al Jazeera étaient quelque peu laborieux ?
C'est sûr ! Tout le monde a dû le remarquer. Même mes proches ne l'avaient pas compris. J'avais du mal à retrouver mes sensations. Je n'avais plus le souffle comme avant. Mais Al hamdoullah, aujourd'hui tout est rentré dans l'ordre. Je redécouvre le métier de journaliste et celui du commentaire sportif. Je m'étais beaucoup éloigné de ma passion. Depuis que je suis à Al Jazeera, j'ai commenté 150 matchs en une saison.
* Vous les comptez vos matchs désormais ?
Bien sûr, avec les dates et les détails des déplacements. A Doha, j'ai repris la peau de Hafid Derradji des débuts des années 90.
* Vous n'avez plus d'autres responsabilités que celles de vos matchs.
Exactement ! En Algérie, j'avais complètement délaissé ma famille. Je sortais de chez moi à six heures du matin pour ne rentrer qu'à 22 ou 23 heures. Je ne voyais pas mes enfants. Je ne déjeunais jamais avec ma petite famille. Par moments, je ne répondais même pas au téléphone à ma famille parce que j'avais des engagements professionnels. Mais tout cela, je ne le faisais pas pour plaire à x ou à y. Je le faisais par passion. J'aime trop mon travail et je me donne entièrement, parfois excessivement, au détriment de ma famille. Mais je ne regrette pas ce que j'ai fait.
* Et à Doha, vous vivez comment votre vie de famille ?
Ah, là c'est un changement radical. Figurez-vous que c'est souvent moi qui vais chercher mes enfants de l'école. Je les attends devant le portail avec tous les autres parents et j'accueille mes enfants les bras ouverts et avec un plaisir tous les jours. C'est drôle comme je découvre que je passais à côté de ces choses simples mais oh combien importantes !
* Que répondrez-vous à ceux qui disent qu'avant de vous hisser au poste de directeur général adjoint de la télévision, vous aviez écrasé beaucoup de personnes au passage ?
On ne choisit pas de devenir DG adjoint. Ce sont les responsables qui vous choisissent parce que je suppose qu'ils ont décelé en vous des qualités importantes qu'ils n'ont pas trouvées chez les autres employés. Ce n'est pas pour mes beaux yeux que Hamraoui ou d'autres personnes m'ont choisi à ces postes importants que j'ai occupés. Ils ne sont même pas de la même région que moi pour espérer gagner leurs faveurs par le biais du népotisme. De plus, mon père Allah yerrahmou n'était pas un haut responsable de l'Etat pour bénéficier d'un quelconque coup de pouce. C'était un simple manœuvre à la SEMPAC de Boumaâti. Il est mort en 1990, alors que je venais de démarrer ma carrière à la télé. Il ne connaissait pas ce qui se passait en Algérie au-delà d'Hussein-Dey.
* Il était comment votre père avec vous ?
Il ne nous laissait jamais regarder la télévision. Pour lui, c'était les révisions tout le temps. La seule chose qu'on pouvait regarder à la télé c'était le 20 heures pour qu'on soit informés de ce qui se passait dans le pays.
* Vous êtes combien d'enfants chez vous ?
Cinq sœurs et quatre frères. Je suis venu au milieu. On a vécu à El Harrach, aux HLM dans un F2. On y a vécu jusqu'au début des années 90 lorsque j'ai eu mon appartement CNEP à Beaulieu. On était à l'étroit mais on remerciait Dieu malgré tout.
* Comment viviez-vous dans ce F2 ?
Je me le demande encore aujourd'hui. Je vous emmène chez nous à El Harrach, dans ce F2 au rez-de-chaussée, je vous assure que vous ne trouverez pas la combinaison adéquate pour nous entasser la nuit à onze personnes. On en rigole aujourd'hui, mais je vous jure que ce n'était pas facile.
* Comment le viviez-vous dehors dans le quartier ?
Le plus normalement du monde, pour la simple raison qu'on n'était pas les seuls dans cette situation. Tous les voisins, tous les copains vivaient pratiquement dans la même exiguïté, alors, il n'y avait pas de quoi en faire un plat. C'était notre sort et notre vie, c'est tout. On ne ressent rien tant qu'on n'a pas vu mieux ailleurs. Ce n'est qu'une fois à l'Université qu'on avait vu comment les gens vivaient dans les autres quartiers.
* Comment vit-on une telle promiscuité ?
Nos parents avaient trouvé le moyen de nous occuper en nous incitant à réviser constamment. Ils savaient que dans leur situation financière, il n'y avait pas d'autres solutions pour aider leurs enfants à s'en sortir.
* Qui a réussi en premier à la maison ?
Mon grand frère Nouredine. C'est lui qui a eu son bac le premier. Après, on l'a suivi.
* Comment a-t-on vécu votre réussite à la télé?
Ils étaient déjà fiers de moi en tant que jeune joueur de football du Mouloudia d'Alger. C'était cela ma première réussite. Devenir footballeur dans l'un des plus grands clubs du pays était déjà un honneur pour moi et pour ma famille. Alors lorsque je leur ai dit que j'étais accepté pour devenir journaliste sportif à la télévision, c'était immense. J'étais footballeur au MCA et je poursuivais mes études en journalisme. Dans ma famille, ils savaient tous que je rêvais de devenir commentateur sportif à la radio.
* A la radio ?
Oui, mon rêve, c'était de rentrer à la radio. Issu d'un milieu très défavorisé, je ne pouvais pas rêver intégrer la télévision. Cela relevait de l'impossible dans ma tête. C'est pour cela que je désirais travailler à la radio. Depuis que j'étais en première année élémentaire, je jouais avec mes potes au commentateur sportif. On se donnait le micro mutuellement comme le font les journalistes. Ma mère m'a raconté que lorsque j'étais enfant, je ne dormais que si j'avais une radio à côté de moi. Sans cela, je n'arrêtais pas de dormir, d'après ce qu'elle m'a dit.
* Vous avez choisi tout de suite le journalisme après le bac ?
Ah oui, c'était très clair dans ma tête. Pourtant, j'avais passé avec succès les concours de l'ENA et celui des sciences politiques. Mais j'avais opté pour le journalisme, mon rêve de toujours.
* Le fait d'avoir joué au MCA vous a sans doute aidé dans votre futur métier, non ?
Et comment ! C'est en jouant au Mouloudia que j'ai découvert ce milieu. Je m'étais retrouvé entouré de très grands joueurs de l'époque, comme Bencheikh, Bouiche, Merzekane, Maïche, Sebbar et tant d'autres.
* Vous étiez arrière droit, c'est ça ?
Exactement. Je m'étais retrouvé avec des joueurs que je ne voyais d'habitude qu'à la télévision. Et là, ils étaient mes coéquipiers dans le vestiaire et sur le terrain. C'était incroyable, même si je ne suis resté que peu de temps en tant que joueur.
* Puis le malheur du joueur Derradji a fait le bonheur de Derradji le journaliste, non ?
C'est exactement ça qui s'est produit. J'étais malheureux de ne pas jouer souvent. Je ne supportais pas de rester sur le banc des remplaçants et je ne me suis pas gêné de le faire savoir à l'entraîneur de l'époque qui était Kaoua en compagnie de Zenir. Une fois même, je lui ai manqué de respect, que Dieu me pardonne. Je le regrette amèrement aujourd'hui. J'étais ambitieux et impulsif comme tous les jeunes de 20 ans.
* Puis, il y a eu le coup de pouce d'Abdelkader Drif. Pourriez-vous le rappeler
aux lecteurs ?
M. Drif qui avait eu vent de mon problème est venu me parler au restaurant Al Yamama, je me souviens. Il m'avait demandé ce qui n'allait pas et je lui ai expliqué que je voulais tout arrêter. Il m'a dit qu'il ne restait pas beaucoup de matchs de championnat et que je devais m'accrocher et me préparer pour la saison d'après. Il m'avait dit aussi que mon jeune âge m'offrait sans doute de meilleurs horizons dans l'avenir et qu'il allait même faire appel à un nouvel entraîneur et de nouveaux joueurs.
* Pourquoi avoir refusé de continuer votre carrière au Mouloudia ?
Mon destin m'appelait de l'autre côté de la barrière qui sépare les joueurs des journalistes. Comme je savais qu'il avait des connaissances un peu partout et qu'il était très respecté, je lui ai demandé un service : celui de me donner un coup de pouce pour intégrer le service sportif de la télévision. Ce qu'il a accepté en téléphonant au DG de l'époque qui était M. Abdelkader Brahimi pour lui dire de me faire une place au sein du service des sports.
* Vous aviez arrêté tout de suite votre carrière de footballeur ?
Non, j'ai continué à jouer au MCA. Le DG était un grand supporteur du Mouloudia. Il me demandait de lui raconter comment ça se passait à l'intérieur du club. Il me recevait toujours bien. Il a appelé par la suite Benyoucef Ouadia pour me faire des essais qui se sont avérés concluants. Ce n'est qu'en début de l'été que j'avais rejoint l'équipe de la télévision. C'est alors que j'avais décidé de mettre un terme à ma carrière de footballeur. Je suis resté pigiste à la télé pendant deux ans pour intégrer définitivement l'équipe en 1990.
* Comment vos parents avaient-ils vécu cela ?
Ils en étaient naturellement fiers. Dieu merci, mon père m'avait vu à la télé avant de mourir en 1991. Il a donc vu les fruits de ses sacrifices.
* Que vous disait votre défunt père à propos de votre manière de commenter ?
Il me disait : «Ya wlidi ma tâayat'ch bezzaf ! » (Mon fils, ne crie pas trop fort !) Allah yerrahmou. C'était un brave homme, mon père.
* Qui vous a aidé à progresser à la télévision ?
Contrairement à ce que vous pourriez penser, ce sont des gens du personnel technique qui m'ont aidé à progresser. C'était soit un monteur, soit un caméraman, soit un technicien. C'est eux qui me corrigeaient mes défauts et qui me faisaient découvrir le métier de commentateur sportif.
* Quelle est la meilleure période que vous avez vécue à la télévision algérienne ?
Je suis tenté de dire que c'est celle des années 90, mais cela reviendrait à occulter la période tragique que le pays a vécue en ces années. La perte de plusieurs collègues et confrères a été la période la plus dure que nous avons vécue dans notre métier aussi. Mais le fait de vivre l'ouverture médiatique de ces années a été sans doute un élément important pour toute la presse en Algérie. C'est là que les autres pays découvraient les Algériens à travers les paraboles. Même mes collègues marocains et tunisiens se souviennent de nos émissions comme «malaeb al âlam», parce que nous avions fait à cette époque un saut qualitatif à la télévision algérienne, avec des éléments nouveaux, venus essentiellement de l'école algérienne. J'étais à la fac avec Khadidja Benguenna et il y avait avec nous tant d'autres journalistes qui ont également apporté quelque chose de nouveau à la télé. La télé algérienne avait pris une allure jeune avec une génération nouvelle, comme Hamraoui, Chebine, Khoudri, Mayouf... La preuve, c'est qu'ils sont tous aujourd'hui dans les meilleures chaînes de télévision arabes.
* Comment vit-on de l'intérieur les départs de nos meilleurs journalistes ?
Au départ, on comprenait quand un journaliste quittait le pays. Tout le monde était menacé de mort par le terrorisme. Celui qui partait le faisait pour sauver sa peau. Il y avait des journalistes qui ont quitté leur métier pour faire autre chose. Ils étaient forcés de le faire les pauvres.
* Que seraient devenus les nouveaux journalistes s'il n'y avait pas eu tous ces départs vers l'étranger ?
Ils n'auraient peut-être jamais eu leur chance à la télé algérienne. D'un côté, cela a rendu service à beaucoup de personnes que les anciens cèdent leur place de cette manière. Car ils ont libéré les places aux autres. Mais les plus compétents auraient sans doute pu se faire une place, même en présence des anciens.
* Derradji est parti à son tour. Quel est le commentateur sportif le plus prometteur en Algérie ?
Moi, je dirai que c'est Karim Aït Athmane. Franchement, il a beaucoup de qualités. Mais cela ne veut pas dire que les autres sont mauvais, loin de là. Chacun a un style propre. Zidane ne joue pas comme Maradona, mais ils sont tous les deux bons, vous voyez ce que je veux dire ? Djamel, Messaoud, Salim ont tous des qualités pour réussir une grande carrière dans le métier. Mais quelque part, j'ai une petite préférence pour Karim Aït Athmane.
* Est-ce parce qu'il commente un peu à la manière de Derradji ?
Non, il commence à avoir son propre style. C'est vrai qu'au début, il voulait peut-être commenter comme moi. C'est un honneur qu'on veuille m'imiter, mais je lui ai dit à maintes reprises de chercher son propre style. Ça me gêne de voir quelqu'un m'imiter indéfiniment. Je souhaite toujours que quelqu'un ramène une manière que je ne connais pas, un style qui nous surprend. Cela dépend de la personnalité des gens. Mais je crois que Karim n'est pas loin de trouver son chemin.
* Sans fausse modestie Hafid, pensez-vous avoir ramené un style nouveau dans le métier ?
Je ne vais pas la jouer hypocrite. Allez, je vais même essayer d'être sincère. Franchement, je crois avoir ramené quelque chose de différent par rapport à ce qui se faisait à la télé algérienne. Je crois que j'ai donné une autre dimension au commentaire sportif algérien. Je ne dirai pas qu'il est le meilleur, mais ce que j'ai fait est différent de ce que les gens connaissaient auparavant. Mais ne croyez pas que j'ai pris la grosse tête pour autant, hacha lillah. Je veux juste dire ce qu'il y a au fond de moi.
* En quoi il est différent exactement ?
Si vous voulez, avant, il n'y avait qu'un seul canal, et les téléspectateurs pensaient que c'était ça le commentaire. Par la suite, il y a eu l'arrivée des antennes paraboliques et on a dès lors compris qu'il y a des pays qui font autre chose. J'ai essayé pour ma part de me positionner avec une manière très propre à moi. Je ne crois pas avoir entendu de style qui ressemble au mien auparavant. Le reste, c'est aux téléspectateurs de le décrire.
* Ne pensez-vous pas en revanche que vous avez enduit en erreur les jeunes qui vous imitent en usant et abusant des «ouuh, lalaaa !! » à tout bout de champ ?
C'est vrai que quand on en abuse, ça devient lassant. Pour ma part, j'essaie de vivre le match et de le faire vivre aux téléspectateurs comme je le ressens. Mais en parallèle, j'apporte des analyses que les gens trouvent intéressantes, d'après les échos que je reçois au quotidien. Il faut le faire au bon moment et pas à tout bout de champ. Sinon, ça devient un peu gaga, c'est vrai.
* Est-ce que vous avez eu des directives, des consignes pour adapter vos commentaires en arrivant à Al Jazzera Sports ?
Non, aucunement. Vous savez, la philosophie d'Al Jazzera est d'offrir une grande diversité dans la manière de commenter les événements sportifs. Il y a des commentateurs de tous les pays du monde arabe et chacun est recruté parce qu'il est justement différent des autres. On nous laisse une liberté totale dans ce qu'on fait. C'est ce qui fait la force d'Al Jazeera Sports, à mon avis. Les téléspectateurs suivent Al Jazeera Sports dans tous les pays et il faut bien répondre aux attentes de tout le monde.
* Cela se faisait aussi en Algérie avec toutes nos différentes régions, non ?
Exactement, un peu moins large qu'Al Jazeera, mais on l'a aussi chez nous. Nous n'avons pas qu'un seul public en Algérie, mais plusieurs, selon les régions. Et cela est très important à souligner. La difficulté de gérer la télévision algérienne est également dans cette diversité culturelle. Je défie ceux qui critiquent la télévision algérienne à longueur d'année, d'aller la gérer ne serait-ce que pour un seul mois. Qu'ils tentent surtout de trouver toute la masse salariale qu'il faut pour payer les employés. Figurez-vous que, par moments, Hamraoui Habib Chawki ne trouvait pas le sommeil à cause des salaires des employés qu'il fallait réunir chaque mois.
* Comment se fait-il qu'une chaîne publique d'un pays comme l'Algérie, avec toutes réserves de pétrole qu'il renferme et les annonces publicitaires au quotidien, qu'aucun autre canal télévisuel ne lui dispute, puisse se retrouver ainsi, sans argent pour payer ses employés ?
Mais c'est parce que lorsqu'il y a le Ramadhan, ce sont des sommes colossales qui sont dépensées par la direction générale pour répondre aux attentes des téléspectateurs pendant tout le mois. Pareil, lorsqu'il s'agit de la Coupe du monde, des jeux Olympiques, de la CAN ou d'événements mondiaux que les Algériens ne veulent pas rater. C'est ce qui réduit le budget à néant à chaque fois. Mais cela, les gens ne le calculent pas. Ce n'est pas leur souci. C'est pour cela que ça devient facile de critiquer. Il y a encore beaucoup d'autres événements qui bouffent le budget et les revenus que vous évoquiez.
* Par exemple ?
Les élections quelles qu'elles soient, législatives, municipales ou présidentielles, ça coutent en moyenne 45 à 50 milliards de centimes. Ce qui n'est pas rien, non ? Pour acheter des films, il faut débourser aussi de l'argent. TF1 achetait ses films à 1 ou 2 millions d'euros, alors que la télé algérienne avait les mêmes films à 2000 euros.
* Comment est-ce possible ?
On négociait à l'algérienne. Il nous arrivait même de pleurer pour avoir les prix les plus bas. Mais ceux qu'on avait en face ne sont pas dupes, parce qu'ils savent que le marché algérien leur assurait peut-être des miettes, mais à très long terme. C'est là que réside le secret des négociations en fait. Ils préfèrent vendre à 2000 euros que de ne pas vendre du tout. Mais ne vous inquiétez pas pour eux, parce qu'ils se rattrapent avec les autres pays. Il y a aussi le relationnel qui compte dans les négociations. Lorsque vous connaissez les décideurs, c'est plus facile de les faire plier et de s'en sortir avec les meilleurs prix du marché.
* Les pays avec lesquels vous traitiez croient pourtant que la télévision nationale algérienne est aussi riche que le pays, non ?
C'est sûr qu'ils le croient. Ils pensent que si nos réserves de pétrole atteignent les 150 milliards de dollars, la télé en bénéficie largement. Ils oublient juste que les 150 milliards de la télé sont en milliards de… centimes ! Le budget de l'Etat n'est pas celui de la télévision.
* Qu'est-ce que vous regrettez aujourd'hui en revoyant votre parcours à la télévision algérienne ?
Tout ce que je regrette aujourd'hui est de ne pas lui en avoir donné assez. Que ce soit en tant que gestionnaire ou en tant que journaliste, je suis sûr que je pouvais apporter beaucoup plus à la télé algérienne.
* Vous sentez qu'il y a un goût d'inachevé dans votre carrière en Algérie ? Parfaitement.
* Peut-on dire que votre passage à Al Jazeera Sports est une sorte de pause-citron, une mi-temps ?
Exactement ! Je suis à Al Jazeera comme à la mi-temps dans le vestiaire. Avec Hamraoui, on avait de grands rêves pour la télévision algérienne. Il envisageait de lancer plusieurs chaînes, mais on a été freinés avant la réalisation de ces projets.
* Mais pourquoi n'y a-t-il jamais eu de télévision sportive, alors que les pays voisins n'ont eu aucune difficulté à lancer la leur ? Est-ce si compliqué que cela ?
Déjà en 2000, Hamraoui en avait fait l'un de ses premiers objectifs. Il parlait de cette chaîne sportive avant même d'avoir évoqué celle de la jeunesse et de la musique. Par la suite, d'autres soucis se sont greffés pour faire capoter ce projet. Mais il existe bel et bien à la télévision algérienne un projet de chaîne sportive et ce n'est pas aussi compliqué de la lancer que ça peut paraître. Toutes les chaînes qui ont été lancées ces derniers temps, ont pour instigateurs Hamraoui et moi. Si on était restés en place, la chaîne sportive serait opérationnelle aujourd'hui. Surtout avec les résultats de l'EN dans ces éliminatoires combinées CAN/CM 2010. C'est ce que je regrette le plus.
* Regardez-vous aujourd'hui la télé algérienne ?
Oui, bien sûr ! Les journaux télévisés d'abord, mais aussi les matchs de championnats. Mais il y a une chose curieuse que j'ai notée à la télé algérienne. C'est que le jour où j'ai confié que je ne regardais plus l'émission «Malaeb al âlam », on a arrêté de la diffuser sur satellite.
* C'est dur de regarder votre bébé entre les mains d'un autre ?
Trop dur même. C'est comme si j'avais fait grandir ma fille, pour la marier à un étranger. Cette émission, je lui ai donné le biberon, je l'ai fait grandir, j'ai grandi avec. C'est l'une des rares émissions à avoir duré autant d'années. On la suivait au Maroc, en Tunisie et dans tous les coins du monde. Elle constituait une des plus belles vitrines de la télé algérienne. C'est l'une de mes plus grandes fiertés, à moi et à toute l'équipe qui travaillait dedans.
* Si un jour vous revenez à la télé algérienne, vous reprendrez votre émission ?
Jamais ! Lorsqu'on marie sa fille, on n'a plus envie de la voir divorcer et revenir à la maison chez ses parents. Pareil pour moi. Pour tout l'or du monde, je ne reprendrai pas «Malaîb al âalam». Pour moi, c'est fini à jamais ! Elle ne m'appartient plus.
* On sent de la nostalgie dans vos propos. On se trompe ?
C'est sûr que je la regretterai toute ma vie. Vous imaginez ? J'ai animé cette émission pendant 18 ans. De 1990 jusqu'à 2008. On a fait 743 émissions en tout. Ce n'est pas rien, non ? J'ai gardé toutes les dates et les invités que j'ai reçus.
* Comment se sépare-t-on d'une telle aventure ?
Croyez-moi ou non, mais deux mois avant d'arrêter l'émission, j'avais eu un pressentiment qui me disait que la fin n'était pas loin. J'avais préparé sur data show projecteur, tout le bilan de Hamraoui entre 200 et 2007, sans le lui avoir soumis. C'était pourtant sa propre gestion. Vous voyez la confiance qui existe entre nous. Il regardait tantôt vers l'écran, tantôt vers moi, l'air épaté. J'avais pourtant critiqué sa propre gestion quand il le fallait. Après cela, on s'est isolés tous les deux dans son bureau et je lui ai dit textuellement : «Il faut que tu quittes la télé afin de nous permettre de partir nous aussi.»
* Pourquoi cela ?
Parce que j'avais vu qu'il était arrivé au sommet de ce qu'il pouvait donner et nous aussi. Il paraissait extrêmement fatigué de se donner sans relâche à la télé. On l'était tous en vérité et je sentais que le moment était venu de laisser la place à d'autres…
* Comment avez-vous vécu votre expérience au sein de la FAF aux côtés de Mohamed Raouraoua ?
Avant d'y être, je ne fréquentais pas beaucoup les bureaux de la Fédération algérienne de football. Je crois que j'y avais mis les pieds auparavant à deux ou trois reprises seulement. J'avais connu Mohamed Raouraoua avant qu'il soit président de la FAF. Je l'ai connu juste après qu'il ait quitté l'ANEP et l'OREF. Je me rappelle avoir rencontré Raouraoua à Monaco. On était tous les deux invités par l'UEFA. Moi en tant que représentant de la télé algérienne, et lui je ne sais pas en tant que qui. On discutait après le dîner du football algérien et il m'avait dit qu'il avait été une fois membre du bureau fédéral au sein de la FAF. Je lui ai expliqué que Kezzal m'avait appris que des gens s'apprêtaient à lui jouer un mauvais tour pour le destituer. Puis me vint l'idée de lui proposer de se porter candidat à la présidence de la FAF. J'avais vu en lui un homme d'une culture exceptionnelle qui pouvait aisément gérer le football national. Après tout, El Hadj Raouraoua était un grand gestionnaire puisqu'il avait occupé de plus grandes responsabilités auparavant.
* Il a tout de suite accepté votre idée ?
Non, il l'a balayée d'un revers de la main dans un premier temps. Il m'avait dit qu'il était très bien comme il était. Il m'avait expliqué en fait que vu les problèmes qui existaient au sein de la FAF avec tous les coups bas qui se tramaient dans les coulisses, il était suicidaire de s'aventurer là-dedans avec tous ces loups autour. Mais le lendemain, j'ai continué à insister pour qu'il accepte de se porter candidat. Et une fois à Alger, il m'appelle après trois jours de réflexion pour me demander ce qu'il fallait faire pour déposer sa candidature à la tête de la FAF. Juste après, il a commencé sa campagne et m'avait proposé le poste de président de la commission médias et membre du bureau fédéral.
* Pourquoi l'avoir poussé vers la FAF ?
C'est parce que lors de nos discussions, il m'avait donné son avis sur la gestion réelle de la FAF et j'avais vu qu'ils avaient des idées formidables qui étaient bien supérieures à celles qu'on connaissait auparavant. Plus il me parlait, plus j'étais persuadé que c'était l'homme qu'il nous fallait à la tête de la FAF. C'est pour cela que j'avais insisté pour qu'il accepte de se porter candidat.
* Là, vous aviez découvert la FAF de l'intérieur. C'était comment ?
Ah oui, j'ai commencé à apprendre comment étaient gérés les différents organes du football national, entre la FAF, la Ligue, la programmation des arbitres et tout le reste. J'étais dedans comme on dit. J'étais au courant de tout se qui se passait autour de la FAF.
* Vous aviez aussi connu quelques problèmes avec la presse. Comment l'aviez-vous vécu ?
J'ai trouvé cela très normal en fait. On avait tenté de changer un peu les mauvaises habitudes. On voulait en fait réaliser le même travail que les grandes nations du football avaient essayé avec succès. Mais on s'était confrontés à quelques difficultés, je dirais d'ordre culturel. Les gens n'étaient pas assez prêts pour tout ce chamboulement.
* Où se situait votre erreur au juste ?
On n'avait pas fait d'erreur dans la gestion de la FAF. Mais si je dois nous trouver des erreurs, je dirai qu'El Hadj Raouraoua avait été désigné commissaire de l'Année de l'Algérie en France. Il ne pouvait pas faire deux choses à la fois. C'est sans doute cela qui l'avait un peu éloigné des affaires de notre football.
* Mais pourquoi avait-il accepté d'être à deux endroits différents, alors qu'il aurait pu laisser une des deux places à quelqu'un d'autre ?
C'était l'Etat qui lui avait confié cette mission. Il ne pouvait pas la refuser. C'était un devoir national. Il avait un vice-président qui pouvait assurer derrière lui.
* Certains disaient que c'était Derradji qui gérait la FAF à l'époque. Est-ce vrai ?
Jamais ! Avec Raouraoua, vous pouvez toujours donner votre avis, il vous écoutera attentivement. Mais personne ne peut lui imposer une idée. Il est trop strict pour que je puisse gérer à sa place. Vous ne pouvez même pas lui proposer une idée, s'il ne vous donne pas l'autorisation de le faire. Il faut d'abord le laisser vous demander votre avis. Avec le temps, j'ai fini par le comprendre du regard seulement.
* Ne pensez-vous pas que votre carrière a pris un grand tournant après vos rencontres avec Hamraoui et Raouraoua ?
C'est peut-être vrai ce que vous dites, parce que j'ai connu en Hamraoui et Raouraoua deux hommes très expérimentés dans la vie. Je parle d'abord de leur vécu, avant leurs grandes compétences. J'ai appris beaucoup à leur contact. Quand Raouraoua me parle de ce qu'il a connu dans sa carrière, ou quand Hamraoui me dévoilait un bout des affaires politiques du pays, je ne peux qu'ouvrir grandes mes oreilles et boire leurs paroles. J'ai plus appris à leur contact que l'inverse. C'est une évidence.
* Comment aviez-vous appris la nouvelle de votre nomination à la tête de la commission médias de la FAF ?
C'est El Hadj qui me l'a appris évidemment. Il m'avait fait, en fait, la surprise en m'appelant d'abord au téléphone pour me demander de lui faire rappeler mon numéro de fax. Quelques minutes plus tard, j'ai reçu le fax de ma désignation en tant que président de la commission médias de la FAF. Il m'avait mis devant le fait accompli, mais j'étais plutôt content d'avoir été choisi par un si grand homme. Il m'avait également confié le poste important de porte-parole de la FAF. J'étais vraiment très honoré par cette confiance. Raouraoua m'a beaucoup aidé dans mon métier au niveau des contacts, que ce soit à la FAF, la CAF ou au sein de la commission médias de l'Union arabe où j'étais membre. Non, Raouraoua a aidé beaucoup de gens de par ses connaissances et ses contacts.
* Comment vit-il de l'intérieur le travail de la presse ?
Il ne veut pas se mettre au-devant de la scène. Il se met toujours en retrait et préfère travailler que parler tout le temps à la presse. C'est vrai qu'il s'énerve lorsqu'il lit de fausses informations ou des articles sévères et non objectifs. Moi-même, j'avais eu des difficultés avec des confrères. C'est pour cela qu'on a créé le site de la FAF. Il voulait donner une information crédible pour tous et au quotidien. On a tenté de le faire pour mettre tout le monde sur un même pied d'égalité. Mais je ne pense pas avoir réussi dans ce domaine précis.
* Quel est le problème le plus épineux auquel vous aviez été confrontés avec les journalistes ?
Le problème était toujours lié aux déplacements de l'EN à l'étranger. Tout le monde voulait partir dans l'avion affrété à l'équipe nationale. Les journalistes croyaient que c'était un droit de partir dans l'avion avec l'EN. C'était assez délicat d'expliquer cela aux gens. Il y a des choses que Raouraoua ne veut pas dire à la presse.
* Comme quoi ?
Comme le fait que des joueurs de l'EN ne veulent pas voyager dans le même avion que les journalistes. Il y en a qui le réclament haut et fort parce qu'ils estiment qu'ils sont trop sollicités dans l'avion par les journalistes. C'est aussi leur droit d'être tranquilles pendant un vol qui dure 6 ou 7 heures. Figurez-vous que parfois, on se retrouvait avec 40 demandes de journalistes pour 25 joueurs seulement. On se serait retrouvés avec une délégation de journalistes et non pas de footballeurs. Les joueurs ne veulent pas être importunés pendant le vol et c'est leur droit. En plus, il y avait des journaux qui envoyaient des gens qui n'avaient rien à voir avec le monde des médias. Là, ça devenait carrément aberrant.
* Quelle est votre relation actuellement avec Mohamed Raouraoua ?
Il reste pour moi un très grand ami, je dirai même un frère. On s'appelle régulièrement et on est en contact permanent. Nous partageons beaucoup de points en commun. On s'appelle tout le temps et on essaie de ne pas parler football. Lui, surtout, parce que pour moi, c'est impossible. Alors je l'embête un peu avec mes questions ; mais il prend toujours cela du bon côté parce qu'il connaît ma passion pour le foot.
* Que pensez-vous de ceux qui disent que Raouraoua n'a jamais été footballeur et qu'il occupe un poste qui devrait revenir en principe, impérativement à un ancien footballeur qui connaît plus la réalité du terrain et les sensations des joueurs sur le terrain ?
Je ne suis pas d'accord avec cela. Le football d'aujourd'hui a besoin de gestionnaires chevronnés. Que peut faire un footballeur dans un bureau ? Va-t-il jouer au football ? Il n'est donc pas impératif d'être un ancien footballeur pour diriger la FAF.
* Et vous pensez que l'UEFA n'a rien compris en confiant la présidence à un ancien footballeur comme Michel Platini ? Tout le monde sait que Platini est plus crédible que Blatter, non ?
Oui, mais on n'a pas confié l'UEFA à Platini juste parce que c'est un ancien joueur. Platini s'est présenté avec un projet et une équipe de gestionnaires aguerris derrière lui. C'est pour cela qu'il a obtenu plus de voix que Johannsen.
* OK, mais supposons qu'un président de fédération commence à s'immiscer dans le volet technique, en forçant le sélectionneur à opter pour tel joueur ou telle tactique ?
Il y a des limites à tout et cela fait partie des limites que ne doit pas franchir un président de fédération. Un président de fédération ne choisit pas la tactique ni l'équipe qui doit jouer. Mais c'est lui qui est comptable devant le public. Raouraoua a payé pour l'absence des résultats de l'EN. Mais en parallèle, on ne pouvait rien lui reprocher dans sa gestion de la FAF, les ligues et le fonctionnement de nos différentes compétitions. En tant que gestionnaire, il n'avait pas failli à sa mission. Il avait donné une vraie sérénité à notre football et il continue aujourd'hui à le faire depuis son retour.
* Est-ce qu'il s'est remis un peu aujourd'hui de l'affaire Madjer ? Car il y a beaucoup de gens qui n'ont pas aimé la manière avec laquelle le plus grand footballeur algérien de tous les temps a été écarté de l'EN.
Non, comme je le connais, El Hadj n'est pas rancunier. Depuis la séparation avec Madjer, je vous assure qu'il n'en parlait plus du tout. Il n'en dit que du bien, au contraire. Souvent, je l'ai entendu vanter le talent du football algérien en citant fièrement la carrière de Rabah Madjer à l'étranger.
* Et votre relation avec Rabah Madjer ?
Très ordinaire. Je n'ai aucun problème avec Madjer. Au fond de moi, je n'ai jamais pensé que j'avais un problème avec Madjer. Que ce soit l'entraîneur ou l'homme en particulier. J'ai toujours considéré que Madjer avait eu des soucis avec la FAF, son bureau fédéral, son vice-président et son président. Jamais avec moi. Après, chacun est retourné à ses affaires personnelles.
* Est-ce que vous vous voyez à Doha au moins, puisque vous travaillez à Al Jazeera Sports tous les deux ?
Oui, on se voit parfois, mais pas souvent. On a fait des voyages ensemble et on travaille dans la même boîte en effet.
* Mais à ce qu'il paraît, vous n'êtes pas les meilleurs amis du monde, non ?
Non, on n'est pas les meilleurs amis du monde, mais en même temps, on n'est pas des ennemis non plus. Si vous voulez, même avant qu'il soit sélectionneur et moi membre de la FAF, Madjer et moi n'étions pas les meilleurs amis du monde. On se connaissait de loin et on se respectait, sans plus.
* Quelles sont vos relations avec les autres journalistes algériens qui résident à Doha ?
Non, je n'ai pas beaucoup de relations avec les Algériens d'ici. J'évite d'en avoir exprès et pas spécialement avec les Algériens. J'évite de fréquenter beaucoup de monde. Je suis à Doha pour travailler et surtout pour en profiter avec ma petite famille. On va dire que j'ai des relations très limitées avec trois ou quatre journalistes, pas plus.
* C'est voulu ?
Oui, c'est voulu. Je veux faire le vide autour de moi pour savourer cette «mi-temps» que je vis au Qatar. Comme ça, le jour où je déciderai de retourner en Algérie, je le ferai avec un mental retapé à neuf. Je suis venu recharger mes batteries avant de rentrer chez moi et reprendre le combat. Et Dieu merci, aujourd'hui, je peux dire que j'ai oublié pas mal de choses de tout ce que j'ai vécu en Algérie.
* Ne pensez-vous pas que le fait de répéter sans cesse que vous faites une «mi-temps» dans une chaîne aussi prestigieuse qu'Al Jazeera Sports est un peu réducteur par rapport à vos employeurs actuels qui vous ont considéré mieux que ceux de la télé algérienne ?
Non, je dois être clair dans cette histoire. Je voue un immense respect à Al Jazeera Sports et à tous ceux qui y travaillent. Ce que je veux dire par là est que je ne suis pas venu à Qatar avec l'intention de rester à vie. Mais cette «mi-temps» comme je l'ai appelée pourrait durer 5 ans, voire 10 ans, comme elle pourrait durer un an. Mais rien ne m'empêche de rester très professionnel dans mon travail et de me donner corps et âme pour Al Jazeera Sports. Je n'ai jamais triché dans ma vie et ce n'est pas aujourd'hui que je vais commencer à le faire. Mais si les conditions de travail restent comme elles sont aujourd'hui, il n'y a pas de raison pour je quitte Al jazeera Sports.
* En arrivant à Al Jazeera Sports, aviez-vous senti des réticences ou de la jalousie de la part des journalistes algériens qui vous ont devancé ?
Oui. Il y a même un journaliste algérien travaillant à Al Jazeera qui a téléphoné à un Cheikh hautement placé pour lui dire que vous avez embauché un type à problèmes en recrutant Hafid Derradji. Finalement, les grands responsables ont découvert qui je suis en vrai et démasqué la jalousie de cette personne. Hamdoullah, même le personnel qui avait été sans doute mis au parfum par la même personne a finalement compris qui était mauvais et qui ne l'était pas.
* Vous aviez senti cette levée de boucliers en arrivant à Al Jazeera ?
Ce n'est pas une levée de boucliers, mais j'ai senti que les gens étaient plutôt méfiants à mon égard. Le directeur général avait aussi été prévenu par cette personne pour qu'il prenne soi-disant ses précautions vis-à-vis de moi. Dieu merci, il a tout compris avec le temps et aujourd'hui, je ne reçois que des félicitations de la part du personnel et des responsables d'Al Jazeera.
* En fin de compte, vous ne laissez personne indifférent, où que vous travaillez, non ?
Lorsque j'étais à la télé algérienne, je dérangeais beaucoup de monde et même ceux qui travaillaient ailleurs. Ils disaient que Derradji est en train de percer et de gravir les échelons et peut-être même qu'un jour, on va le retrouver ministre. Aujourd'hui que j'ai quitté l'Algérie, les mêmes personnes continuent à me poursuivre avec leur méchanceté et leur jalousie. Que veulent-ils que je fasse ? Que je meurs ? Que je me jette à la mer ? Où que je me trouve, ça ne leur regarde pas. (Il s'énerve et s'adresse carrément à la personne qu'il visait). Et même en venant ici à Al Jazeera, je ne suis pas venu chez toi, non. Ça n'appartient pas à ta mère ! Et puis, je ne suis pas venu quémander. C'est eux qui m'ont ramené à Al Jazeera. Où est le problème ? Tout le monde peut travailler et gagner sa vie proprement, alors pourquoi vouloir empêcher Derradji ou quelqu'un d'autre de le faire dignement ?
* Mais y a-t-il au moins des journalistes algériens d'Al Jazeera qui disent un peu de bien de vous ?
Fort heureusement ! J'ai revu avec un immense plaisir Abdelkader Damiche qui m'a dit être très content d'entendre les responsables d'Al Jazeera louer mes compétences et ma correction. J'ai aussi retrouvé avec plaisir mon ancien collègue et ami Abdelkader Cheniouni, même si on ne se voit pas beaucoup ici, à cause des emplois du temps de chacun de nous deux. J'ai aussi retrouvé mes amis Mohamed Assoul et Boualem Benoumechiara qui ont travaillé avec moi à la télé algérienne.
* Et qu'en est-il de Boutamine qui vous a égratigné lors d'une interview accordée à un confrère, en disant que c'est Derradji qui a bloqué son évolution à la télé algérienne ?
Franchement, je n'ai pas compris pourquoi il s'en est pris à moi de la sorte. Je laisserai le soin à ses amis de lui répondre comme ils l'ont déjà fait. Mais ce que je ne comprends pas chez lui, c'est qu'il n'est jamais venu me voir pour me dire cela en face. On s'est retrouvés la veille de cette interview en famille, chez Boualem Benoumechiara et il me disait qu'il voulait rentrer au pays. J'ai essayé de l'encourager en lui disant qu'il pouvait compter sur moi s'il avait besoin de moi. J'ai essayé de lui remonter le moral comme on le fait à un ami lorsqu'on est pris de nostalgie à l'étranger. Et le lendemain matin, je découvre son interview avec toutes ces méchancetés à mon encontre. Franchement, je suis tombé des nues. Je ne m'y attendais pas du tout. Par la suite, il a essayé de faire un démenti et il a fait pire. Depuis, il m'évite et Allah issahel âlih, car il a quelque chose à se reprocher. Moi, j'ai la conscience tranquille vis-à-vis de lui ou de quelqu'un d'autre.
Si c'était à refaire, vous auriez fait la même chose avec lui ?
Absolument ! Car il s'agissait d'assumer mes responsabilités avant toute autre considération.
* Il vous reprochait de lui avoir fait de l'ombre injustement de peur de le voir percer.
C'est complètement faux, car c'est grâce à moi qu'il est passé à la télévision. Il dit que j'avais arrêté l'émission «Arqam wa taâliq ». Si je ne l'avais pas arrêtée, pour la scinder en deux autres émissions (Al marma et tous les Sports) il n'aurait jamais eu la chance de passer à la télé. C'est comme ça que je lui ai permis de la présenter. On ne peut pas la comparer avec Malaïb Al âlam qui avait été lancée en 1990. Il n'y avait aucune comparaison à faire entre ces deux émissions non concurrentes de surcroît. C'est aberrant de penser qu'un responsable veuille détruire une émission de son propre programme. Enfin, Allah yahdih, c'est tout.
* Que pouvez-vous dire aux supporteurs de l'USMH qui vous reprochent vos affinités envers le MCA ?
Les supporteurs ne comprennent pas lorsque je montre mon admiration pour un club. Il n'y a aucun doute que je suis heureux lorsque j'apprends que l'USMH a gagné un match. C'est le club de mon quartier. C'est là que j'ai grandi et c'est là où j'ai me repères et mes vrais amis. Mais en parallèle, le Mouloudia d'Alger est un club qui est aimé par tout un peuple. C'est une partie de notre identité à tous en tant qu'Algériens. Aujourd'hui, je ne suis plus supporteur comme avant. Je me retrouve dans le beau jeu de chaque équipe algérienne. Par exemple, lorsque je vois le CABBA ou l'ESS jouer de manière séduisante, je ne peux qu'applaudir, car cela me donne de l'espoir de voir notre football évoluer dans le bon sens et élever son niveau. Cela me fait plaisir, mais est-ce que ça fait de moi un supporteur du CABBA ou de l'Entente ?
* Mais on vous reprochait de montrer clairement votre penchant pour le MCA à l'antenne.
Mais non, c'est juste parce que je faisais des clins d'œil à mes collègues de la tété. Comme vous le savez, le MCA a des supporteurs partout. Et au sein de la télé, ils sont aussi nombreux. Je faisais donc en sorte de leur passer des messages pour qu'ils se sentent mieux le lendemain. Car lorsque le Mouloudia perdait, le personnel est sensiblement réduit le lendemain. Ils ne venaient pas au travail. C'est pour cela que je voulais leur remonter le moral. Mais les gens le comprenaient autrement.
* Les supporteurs de l'USMH croient que vous êtes plus pour le MCA, qu'avez-vous à leur dire ?
C'est peut-être parce que j'ai joué au Mouloudia et pas à l'USMH qu'ils le pensent. Mais j'ai joué aussi dans d'autres clubs ; cela ne fait pas de moi systématiquement un supporteur de ces petits clubs.
* Comment voyez-vous l'USMH de cette saison ?
Les Harrachis sont toujours lésés au cours de la saison. On a souvent été injuste avec l'USMH. C'est un club qui forme beaucoup de joueurs mais malheureusement, l'absence de moyens ne permet pas aux dirigeants harrachis de garder leurs jeunes talents. C'est un club qui n'est pas assez aidé et protégé.
* Si un jour vous deviendrez très riche, vous seriez président du MCA ou de l'USMH ?
Sans hésiter, je dirai l'USMH. Le MCA est trop compliqué à diriger, alors que l'USMH est un club où tout le monde me connaît et qui me parait plus intime. Je sais que je serais plus respecté à l'USMH car c'est un club de quartier, pas comme le Mouloudia qui a ses supporteurs aux quatre coins du pays. Mais ce ne sont que des suppositions car dans l'état actuel de choses, c'est impossible que je prenne la présidence d'un club. Peut-être un jour lorsque les statuts changeront et que nos clubs seront des gérés comme de vraies entreprises privées.
* Que feriez-vous en premier au sein de l'USMH ?
J'essaierai avant tout d'améliorer le stade du 1er Novembre car c'est le seul qui n'a pas été rénové depuis sa construction. Il est impératif que les pouvoirs publics se penchent un peu sur ce cas afin de renvoyer l'ascenseur à ce quartier qui a donné tant de noms au football national. Il est temps d'agrandir un peu le stade pour qu'il puisse accueillir au moins 20 000 spectateurs et puis construire un petit centre de formation digne de ce nom avec les commodités qui vont avec. Je crois que l'USMH vaut largement cela.
* Si on vous donne l'occasion de vous adresser à chaque supporteur de l'USMH. Qu'avez-vous à leur dire ?
J'aimerais leur dire d'essayer d'apprendre à accepter les défaites comme les victoires. Il faut que les supporteurs sachent que l'USMH n'est pas le Brésil. Ils peuvent perdre à El Harrach, comme ils peuvent aussi gagner à Sétif ou à Tizi-Ouzou. Que les supporteurs essayent d'accepter et ils verront qu'il suffit de se contrôler pour ne pas verser dans la violence. Ceci est aussi valable pour tous les supporteurs algériens.
* Passons un peu à votre vie de famille. Comment avez-vous rencontré votre épouse ?
Il n'y a pas longtemps de cela on en parlait justement ma femme et moi. On est partagé sur l'endroit de notre première rencontre. Je crois que c'était lors d'un mariage. J'allais ramener ma famille et c'est là que je l'ai aperçue pour la première fois. J'ai demandé des renseignements à son sujet puis, je lui ai envoyé ma sœur pour avoir plus de précisions. Au début, elle me boudait et refusait de faire le pas vers moi. Cela avait duré quelques mois. Elle était journaliste et dans sa tête il n'était pas question d'épouser un journaliste. Ce manège a duré quelques temps avant de l'avoir dans le filet. On s'est marié en 2000 et aujourd'hui on a deux enfants : Nour et Djamil.
* Comment votre épouse a-t-elle vécu toutes ces péripéties au sein de la télévision algérienne ?
Que Dieu me pardonne, car je sais que je l'ai fait souffrir avec moi pendant longtemps elle et les enfants. Je n'ai pas été assez présent à cause de la charge de travail et des responsabilités que j'assumais alors. Elle a vraiment souffert la pauvre. Surtout lors de ma dernière année à Alger. Elle écoutait les gens parler de moi, elle lisait les journaux et elle découvrait par d'autres voies les pressions que je subissais au travail. Mais jamais je ne lui avais parlé de ces choses là. J'ai tout fait pour la préserver en laissant toujours planer le doute. C'était ma manière de la protéger elle et les enfants.
* Vous ne les voyiez pas beaucoup ?
Non, je les avais complètement négligés, surtout les trois dernières années. Je ne voyais pas grandir mes enfants. Ce n'est qu'une fois à Doha que j'ai récupéré mon rôle de père à temps plein. Je n'avais pas de temps à leur consacrer. Je ne pouvais pas sortir manger avec eux, encore moins les emmener jouer comme le font tous les papas. C'est au Qatar que j'essaie de rattraper tout cela. Ils me manquaient tellement, mais je n'avais pas de temps pour aller les voir. A tel point que je les recevais des fois dans mon bureau pour les voir et passer un moment avec eux.
* Aujourd'hui, vous êtes beaucoup plus disponible pour votre petite famille à ce qu'on voit. On se trompe ?
Ah, là je me rattrape largement. Ma vie a complètement changé. C'est une totale métamorphose. J'ai énormément de temps libre pendant la semaine. J'en profite pleinement pour rester auprès de ma femme et de mes enfants. Par exemple, je me fais un plaisir fou à aller récupérer Nour et Djamil de l'école pour les ramener à la maison. Ce qui m'était impossible à faire à Alger. Je vais souvent avec eux à la piscine et je m'amuse comme un enfant avec eux.
* Votre fils Djamil, est-il un mordu de foot comme son papa ?
Alors là pas du tout ! Il est plutôt pour la gymnastique, la natation et peut-être l'athlétisme, car il aime beaucoup courir. J'ai cru soupçonner un petit signe tout récemment car il m'a demandé de lui acheter un ballon. Mais j'ai du déchanter vite fait.
* Quelle est la réaction de vos enfants lorsqu'ils vous voient à la télé ?
Ça e leur fait ni chaud ni froid. C'est quelque chose de très banale, de très ordinaire pour eux, car depuis qu'ils ont ouvert les yeux, ils me voyaient à l'écran. Dans leur tête, c'est quelque chose de naturel. Ils croient peut-être que tous les papas passent à la télé comme le leur.
* Vous reverra-t-on pour de vrai un jour à la télé algérienne ou vous dites cela sans conviction ?
Seul Allah peut prédire l'avenir. Mais tout ce que je peux vous dire, c'est que, à aucun je n'ai moment voulu quitter l'Algérie, s'il n'y avait pas tous ces problèmes que j'ai évoqués auparavant. Je sais que je ne vais pas m'éterniser à l'étranger comme je sais aussi que je n'ai pas rompu complètement le cordon ombilical avec la télévision algérienne. Le jour où l'heure de mon retour en Algérie sonnera, je le ferai par la grande porte.
Entretien réalisé à Doha par :
Nacym Djender.


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