«Brésil-Algérie de 86 : une référence sur le plan technique» Antônio de Oliveira Filho, plus connu sous le nom de Careca, a été l'un des meilleurs footballeurs de l'histoire du football brésilien. Il a réussi à briller dans la sélection de la Samba, pourtant truffée d'attaquants des plus doués. Lors du Mondial du Mexique en 1986, il a marqué son premier but contre l'Algérie, un match dont il se souvient encore. Il nous parle dans cet entretien de l'impression que lui a laissée cette équipe d'Algérie, de ce qu'il pense du prochain Mondial sud-africain et de son passage à Napoli, aux côtés de la légende Maradona. * Bonjour, et merci d'avoir accepté de répondre à nos questions… Y a pas de quoi, je suis ravi que vous m'ayez appelé. Cela prouve que j'ai réalisé quelque chose dans ma vie et que les gens se rappellent toujours de moi. * Avant de parler de vos exploits, permettez-nous de vous demander ce que devient Careca ? N'imaginez surtout pas que je suis à la retraite. Je m'occupe d'un centre de formation de centaines de jeunes de différentes catégories. Mon ami et ex-coéquipier Edmar s'occupe de la gestion et de l'organisation. Le but de notre centre ne se limite pas à la formation, à la découverte des talents pour ensuite les proposer aux clubs, mais nous travaillons aussi dans un cadre social pour aider nos jeunes sur le double plan culturel et éducatif. * L'un de vos ex-coéquipiers à Naples, Maradona, est l'entraîneur de la sélection d'Argentine. N'avez-vous pas songé à faire autant ? Je n'ai pas songé à prendre la sélection de mon ays ou une autre, car je suis beaucoup plus intéressé par des projets dans le cadre de la formation qui occupent la totalité de mon temps. Et même si je veux tenter ma chance au poste de sélectionneur, le moment n'est pas opportun, pour la simple raison que Dunga est en train de faire convenablement son travail. Cela dit, vous m'avez fait rappeler les plus belles années de ma carrière que j'ai passées avec Napoli durant lesquelles j'ai joué aux côtés de Maradona et d'autres joueurs qui sont devenus très importants, comme Fabio Cannavaro et bien d'autres qui ont réussi par la suite une carrière d'entraîneur, à l'instar des Ferrara, Zola et le Français Laurent Blanc. * Mais vous avez déjà exprimé votre souhait de seconder Maradona, s'il devait être désigné comme entraîneur de Napoli… Oui, je l'ai dit. Mais pas en tant qu'entraîneur, mais adjoint de Maradona. Et je n'ai pas encore changé d'avis. Je vous informe à l'occasion que je suis toujours en contact avec Maradona, même après sa désignation à la barre technique de la sélection de son pays. * Que vous rappelle l'Algérie ? Dès que vous m'avez appelé, je me suis rappelé bien évidemment le Mondial 1986, l'une des plus importantes étapes de ma carrière. Je me rappelle aussi de la rencontre qu'on a jouée face à l'Algérie que je ne pourrais oublier, surtout que j'ai été l'auteur de l'unique réalisation du match. C'était mon premier du tournoi. Lors de notre première confrontation, nous avions gagné par un but à zéro contre l'Espagne, grâce à une réalisation signée Socrates. * Vous rappelez-vous d'autres détails de la rencontre contre l'Algérie ? Ce n'est pas pour vous jeter des fleurs, mais on a été surpris par la production de l'équipe d'Algérie de par sa technicité et sa rapidité. Nous avons marqué notre unique but au milieu de la seconde période. L'Algérie a livré un grand match en résistant plus d'une heure. Et dire que notre équipe était composée d'une pléiade de stars conduites par Télé Santana, l'un des meilleurs entraîneurs de l'histoire du football brésilien. Il faut donc reconnaître que l'Algérie n'était pas un adversaire facile. Le plus étonnant, c'est qu'ils n'ont pas usé de jeu dur, mais en s'appuyant sur la vitesse et de belles facettes de jeu. * Certains entraîneurs ont qualifié cette confrontation entre «le maître et l'élève», car les Algériens avaient des joueurs techniques, à l'instar des Brésiliens ; qu'en pensez-vous ? C'est ce que j'étais en train de vous expliquer en répondant à vos questions précédentes. Nous avions presque la même manière de jouer. * Vous savez, l'on parle toujours en Algérie de ce but encaissé sur une mésentente entre le gardien de but et le défenseur. A votre avis, à qui incombe la responsabilité ? J'ai dit que l'équipe d'Algérie a bien joué contre nous, et que nous avons éprouvé beaucoup de difficultés pour marquer un seul but. Ce n'est donc pas raisonnable de revenir 24 ans en arrière pour endosser la responsabilité d'un but sur un joueur. Mais ce n'est pas nouveau en football, ce sont toujours les gardiens et les défenseurs qui sont incriminés. Mais on pardonne facilement aux attaquants qui échouent devant le but. * Certains experts et amateurs du beau jeu considèrent la sélection brésilienne des années 80 dont vous avez fait partie comme étant la meilleure équipe de l'histoire du football brésilien ; partagez-vous cet avis ? C'est ce que disent les experts et les observateurs, même si cette équipe n'a pas gagné la Coupe du monde, ni en Espagne en 1982 ni au Mexique en 1986. Mais si cette équipe s'est illustrée par son beau jeu, c'est pour deux raisons. Il y avait une génération de joueurs doués, comme Zico, Falcao, Junior, Soctares, Julio César et un très grand entraîneur, Télé Santana en l'occurrence. * On dit aussi que vous formiez le meilleur tandem avec Maradona lorsque vous étiez à Naples… J'en suis très fier. Et je suis aussi fier d'avoir joué avec la légende Maradona et d'autres stars, que ce soit à Napoli ou en sélection. C'était une belle période. * Après une absence de 24 ans, l'Algérie s'est qualifiée à la phase finale de la Coupe du monde. Avez-vous suivi son parcours lors des éliminatoires ? Malheureusement, je n'ai pas eu l'occasion de voir les éliminatoires de la zone Afrique. Mais j'ai pris connaissance de la qualification de l'Algérie par le biais de la presse, une qualification que je ne qualifierai pas de surprise. Vous savez, lorsqu'une sélection compte déjà des participations en Coupe du monde, il est normal qu'elle retrouve cette compétition, même après une longue période d'absence. Je me souviens aussi de la participation de l'Algérie en Espagne en 1982 que j'ai ratée pour cause de blessure. * L'Algérie jouera dans le groupe de l'Angleterre, des USA et de la Slovénie. Quelles sont, selon vous, ses chances de passer au deuxième tour ? Je crois que les chances de l'Algérie sont grandes, d'autant que le Mondial se déroulera en Afrique du Sud. Un paramètre qu'il ne faudrait pas négliger. Je ne dis pas ça juste pour faire des compliments au public algérien, mais c'est sur la base de la bonne impression que m'a laissée la sélection algérienne lors de la Coupe du monde 1986 au Mexique. Et si l'on considère que l'Angleterre occupera la première place, l'Algérie pourrait se classer devant la Slovénie et les USA. Au vu des progrès que la plupart des pays africains et asiatiques ont accomplis, il faudra s'attendre à des surprises au prochain Mondial. En plus de l'Algérie, je crois que la Côte d'Ivoire réussira de belles choses. * Le Brésil sera comme à l'accoutumée l'un des favoris pour gagner le titre ; quelles sont les autres équipes que vous voyez capables de brandir le trophée ? Je crois que le Brésil sera le favori numéro un pour brandir le trophée, quand on voit le grand nombre de bons joueurs qu'elle possède et l'excellent travail que réalise l'entraîneur Dunga. L'Espagne fait aussi partie des favoris, en plus de l'Angleterre et l'Italie. N'oublions pas aussi l'Argentine. * Le continent africain abritera pour la première fois une phase finale de Coupe du monde. Croyez-vous qu'une équipe africaine est capable de créer la surprise et gagner le trophée ? Je vous ai dit tout à l'heure qu'il faudra s'attendre à des surprises lors de ce Mondial, qui se disputera en Afrique. De grosses surprises ne sont pas à écarter. Mais dire qu'une équipe africaine atteindra la finale, je dois dire que ce sera impossible. * Un dernier mot… Mes salutations au public sportif en Algérie et bonne chance à votre pays au Mondial.