Après l'exploit réalisé en 2006, François Bracci est parvenu à marquer l'histoire du club avec ce sacre, onze après. Après l'exploit réalisé en 2006, François Bracci est parvenu à marquer l'histoire du club avec ce sacre, onze après. Avec sa générosité et son âme de gagneur, le Corse a de nouveau conquis le cœur des Chnaoua qui garderont son nom gravé à jamais dans leur mémoire. Bracci rime avec succès. Avant-hier, au cours de cette après-midi que nous avons passé avec l'ancien joueur de Marseille, nous avons abordé avec lui tous les sujets qui ont marqué le parcours des Vert et Rouge. Avant tout, on voudrait vous féliciter pour ce titre de champion que vous venez de décrocher… Je tiens à vous remercier pour cette invitation. A cette occasion, je voudrai dédier le titre à tous les Chnaoua et à tous les amoureux du Mouloudia qui résident à Marseille, car je peux vous assurer qu'ils sont très nombreux. C'est une grande fierté pour moi de succéder à un emblème du football algérien comme cheikh Kermali.
Vous semblez avoir décompressé après toute la pression qui a entouré cette course effrénée au titre… En effet, je savoure pleinement ce titre car depuis le début de la phase retour la pression ne cessait de monter au fil des matchs. On savait que notre objectif était de décrocher le titre même si l'Entente a toujours eu un léger avantage avec les nombreux matchs en retard. Cela vous a dépité de vivre une telle situation, avec cette programmation et ce calendrier qui favorisait quelque peu Sétif… Absolument. Il faut savoir que dans aucun pays au monde on ne trouve une équipe avec six matchs de retard. Cela nous a mis dans une situation très délicate. Et Sétif choisissait ses rencontres, ce qui n'arrangeait vraiment pas notre situation. Selon vous, quel a été le tournant du championnat ? C'est bien évidement la défaite concédée par Sétif à Tlemcen. Là, en reprenant les commandes du championnat, je savais que le titre n'allait plus nous échapper. Il y a aussi cette victoire de l'USMA aux dépens de l'ESS et le match nul de l'USMH obtenu à Sétif même, qui ont ralenti la marche de progression de cette grosse cylindrée qui est l'Entente. En parlant de l'Entente, vous semblez avoir beaucoup de respect pour cette équipe ? Bien sûr que j'ai du respect pour cette très grande équipe qui compte dans ses rangs des joueurs de talent. Tels que Hadj Aissa, Metref, Hemani, Laifaoui, Chaouchi et Raho. Cela dénote de la performance que nous avons réalisée avec un groupe de jeunes qui est parvenu à bousculer cette hiérarchie établie. Lors de la défaite concédée face à l'ESS, vous avez été très déçu par l'attitude de l'entraîneur ententiste. N'est-ce pas ? Effectivement. Lorsque Zekri gesticulait en mettant le point sur le cœur, j'ai dit une chose ‘un enfant on lui apprend pendant quelques années à parler, mais il nous faut toute une vie pour apprendre à se taire'. Zekri croyait qu'il avait achevé le Corse facilement. Résultat des courses, c'est le Mouloudia qui a décroché le sacre. Y a-t-il eu une erreur de stratégie qui a pu jouer en défaveur de l'ESS ? Le président Serrar a perdu le titre le jour où il a libéré Ziaya. Se passer des services d'un avant-centre de ce calibre a été une grosse erreur de stratégie qui a coûté le titre à l'ESS. A propos de technicien, on croit savoir que Robert Nouzaret vous a appelé pour vous féliciter ? Nouzaret est un très bon ami à moi. Effectivement, il m'a appelé pour me féliciter. A votre arrivée, croyiez-vous à cette possibilité de remporter le sacre ? Je suis un gagneur dans l'âme, il est donc certain que si je suis venu c'est pour remporter un titre avec le Mouloudia. Vous savez, je suis un homme de défi qui aime relever les gros challenges. Il faut savoir qu'au tout début de saison cette bande de jeunes, avec son insouciance, n'était pas programmée pour remporter le championnat. C'est au fil des matchs qu'elle s'est rendue compte qu'elle pouvait aller au bout de cette aventure.
Durant votre parcours avez-vous douté, surtout après les deux matchs nuls concédés face au MCO et la JSMB ? Ecoutez, je n'ai jamais douté. J'ai toujours cru en le potentiel de mon groupe. Face au MCO, ce fut un match catastrophique car ce jour-là le sélectionneur Saâdane avait annoncé la liste des joueurs retenus pour le Mondial. Cela a déstabilisé quelque peu Babouche, qui n'en faisait pas partie. Par la suite, il va rater un penalty alors que c'est un expert en la matière. Il y a eu plusieurs facteurs qui nous ont été défavorables. Malgré cela, j'ai essayé de maintenir le cap. Pouvons-nous connaître les autres facteurs qui vous ont été défavorables ? Il y a eu cet excès de zèle de Benchikha qui a sanctionné injustement Zemmamouche au point de le déstabiliser. A cela, il faut ajouter ce stage en Italie des U-23 toujours entraînés par Benchikha qui nous prend quatre joueurs à savoir Moumen, Bensalem, Bedbouda et Amroune, et ce juste avant le match choc face à l'ESS. Et le clou du spectacle a été la mise à l'écart de Zemma qui n'a pas été retenu pour la Coupe du monde. Mais Zemma a outrepassé sa douleur et sa déception pour jouer les deux derniers matchs contre le CRB et le MSPB. Et vous avez vu les arrêts qu'il nous fait contre Batna ! C'est extraordinaire d'avoir un gardien de but de ce calibre dans son effectif. C'est pour cela que je voulais, à ma façon, lui rendre un vibrant hommage en le faisant sortir contre le MSPB quelques minutes avant la fin pour qu'il puisse avoir droit à une standing ovation. C'était la moindre des choses. Justement, qu'avez-vous à dire sur votre gardien de but ? Il faut savoir une chose, on ne peut être champion sans un très grand gardien de but. Et Zemma en est un. Je suis convaincu que si Zemmamouche avait disputé avec nous toutes les rencontres de la phase retour on aurait eu plus de points. Cela est une certitude. Parlez-nous de cette performance réalisée par Zeddam, qui a disputé toutes les rencontres du championnat sans manquer une minute ? Zeddam est un très grand joueur qui a réussi une performance hors norme. Hamza, que j'ai connu lorsqu'il jouait chez les juniors du CSC, est un gars très attachant qui fait partie des cadres de l'équipe. Il est indispensable pour le groupe. Et Harkat qui a eu un parcours très atypique ? Harkat est un joueur très professionnel. Revenir à son meilleur niveau alors qu'il était dans le creux de la vague à l'USMA prouve qu'il a du caractère. Durant cette fin de saison, j'ai retrouvé le grand Harkat de la JSK. Et croyez-moi, ce n'était pas du tout évident de pallier le départ d'un joueur comme Coulibaly qui est un monument au Mouloudia. Hadj Bouguèche meilleur buteur du championnat. Qu'avez-vous à dire à son sujet ? Chapeau Hadji ! C'est un bosseur qui se donne à 300% sur un terrain. Il fait un travail monstre, que ce soit défensivement ou offensivement. Il a été pour beaucoup dans le succès de l'équipe. C'est un battant qui ne lâche rien. Hadj a démontré cette saison qu'il a le niveau pour embrasser une carrière professionnelle en France, ou ailleurs en Europe. Quel a été votre plus grand regret, durant ce parcours qui vous a mené au sacre ? C'est l'absence des supporters. En 2006, lorsqu'on avait remporté la Coupe d'Algérie après 23 ans de disette, il y avait cet engouement populaire. On sentait cette ferveur dans les rues de la capitale. Ce qui n'a pas été le cas cette fois. Nous avons pratiquement joué toutes nos rencontres dans un 5-Juillet qui sonnait creux. Il n'y avait qu'au stade de Rouiba qu'on sentait la pression du public, vu que cette enceinte affichait à chaque fois complet. Le fait de se produire dans un stade olympique sans vos supporters prouve que votre groupe a du caractère, car peu d'équipes auraient pu réaliser une telle performance ? Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le Mouloudia a gagné un peu à la manière des Monégasques sans cette pression des supporters. Je ne vous le cache pas que cette absence des Chnaoua m'a beaucoup affecté car je ne comprenais pas les raisons de cette désertion alors qu'on était sur le point de remporter le titre, après onze ans. Ne croyez-vous pas que la qualification des Verts au Mondial a été préjudiciable au championnat ? On avait évoqué au début le prix des billets qui a par la suite été revu à la baisse. Nous avons programmé nos matchs en nocturne pour permettre aux fans de venir en nombre au stade. Mais rien n'y fit. A l'exception de quelques rencontres, nous nous sommes à chaque fois produits devant des gradins vides. Personnellement, je ne pense pas que cette qualification de l'Algérie au Mondial est la seule raison. J'ai beau cherché des explications, je n'en ai pas trouvé. J'espère que ce ne sera pas le même cas lors du prochain exercice. Même si votre équipe à caracolé en tête du classement durant pratiquement toute la saison, vous n'avez pas été épargné par les critiques notamment lors de cette rencontre face à l'ESS où on remis en cause vos choix tactiques... C'est bien que vous m'ayez posé cette question afin de remettre les choses dans leur contexte. J'avoue avoir fait le mauvais choix ce jour-là, même si ma tactique du 3-5-2 a fonctionné à merveille en tout début de partie puisque nous avons ouvert la marque dès le coup d'envoi. Mais, par la suite, il y a eu une succession d'erreurs notamment du gardien de but qui a fait que le match a très vite basculé en faveur de l'Entente. Mais on a tendance à oublier que juste après j'ai changé d'option tactique, revenant à un 4-4-2 classique, ce qui a eu pour effet de stabiliser la partie. Avec plus de réussite on n'aurait jamais perdu cette rencontre. Au milieu de toutes ses victoires, qu'elle est votre match référence ? Il y a cette victoire au match aller face au CRB (4-2), il y aussi la rencontre de la phase aller contre l'USMH que nous avons remporté. Mais le meilleur souvenir reste cette qualification en Coupe d'Algérie face à l'USMA au stade du 5-Juillet. En battant 3 à 0 l'USMA avec ce penalty de Zemma, le club prenait sa revanche sur l'USMA qui avait fait de même lors de l'exercice précédent à Bologhine. En parlant du CRB, bon nombre de supporters vous ont reproché d'avoir arrangé ce match face au Chabab lors de l'avant-dernière journée du championnat. Qu'avez-vous à dire à ce sujet ? En aucun cas nous n'avons arrangé cette rencontre. Comment peut-on croire à ce genre de sottises alors que le CRB avait, lors du match retour, disputé une parodie de rencontre face à l'ESS au stade du 20-Août. C'est les circonstances qui ont fait que nous avons préféré assurer en fin de partie, car on était à la merci d'un but qui pouvait nous priver du sacre. Lors de ce derby, il ne faut pas aussi oublier que nous avions raté un nombre incalculable d'occasions de scorer, car nous avions buté ce jour-là sur un Ousserir des grands jours. Beaucoup croient que vous êtes un entraîneur très chanceux, puisqu'en 2006 vous aviez pris le train en marche avec au bout la Coupe d'Algérie. Idem cette année avec ce titre de champion comme récompense… Je reconnais que je suis très chanceux. Il en faut dans la vie et dans le sport de haut niveau. Mais avoir la chance sans le travail ni le talent, on ne peut arriver à rien. Je suis quelqu'un de pragmatique qui croit aux vertus du travail. Et puis il y a le destin. Je savais que c'était un signe du destin le fait de revenir le jour de l'Aïd El Kebir. Pour une majorité de supporters on ne peut dissocier ce titre d'Alain Michel à qui, selon eux, revient le mérite d'avoir bâti cette équipe que vous avez par la suite repris en main ? Certes, on ne peut pas nier le parcours d'Alain Michel. Mais il ne faut pas aussi oublier que j'ai disputé 22 matchs de championnat, j'ai remporté 11 rencontres, fait 9 nuls et perdu que deux matchs. Les deux fois sans Zemmamouche. J'ai obtenu 42 points soit une moyenne de 1,90 par match. Notre attaque a inscrit 32 buts pour 16 contres. Alors, avec toutes ses statistiques je ne comprends pas qu'on puisse vouloir remettre en cause le travail que j'ai accompli avec l'équipe. Aussi, il ne faut pas oublier que lors de mon retour il fallait me passer des services de Coulibaly, ce qui n'est pas rien. Malgré ce titre remporté, il y a de fortes chances que vous ne soyez pas reconduit pour le prochain exercice. De quoi surprendre tous les Chnaoua… Je teins à vous dire que je suis maître de mon destin. Ce qui est de mon avenir, seul Dieu le sait. En tout cas, quelle que soit la décision qui sera prise, personne ne pourra oublier ce que j'ai réussi au Mouloudia. Ma grande déception a été de ne pas rentrer dans la légende en décrochant le doublé. A défaut de cela, j'ai réussi à rentrer dans l'histoire du club. Je profite de cette occasion pour remercier Omar Ghrib et tous ceux qui m'ont fait confiance en me rappelant pour driver l'équipe. On parle d'Alain Michel comme celui qui prendre les rênes du club… Et bien, je souhaite bonne chance à Michel. Qu'allez-vous faire à présent ? Je vais rester encore quelques jours à Alger pour régler les derniers détails et percevoir mon dû, ensuite je vais rentrer chez moi en Corse pour des vacances amplement méritées. Quel sera votre prochain objectif ? Franchement, j'aimerai bien avoir une sélection nationale comme celle des locaux. Je connais bien le football algérien et je suis convaincu qu'avec des joueurs aussi talentueux que Hadj Aissa et Djabou on peut réaliser de très belles choses. Un mot sur la sélection nationale qui va prendre part dans quelques jours au Mondial… L'Algérie a les moyens et les qualités pour passer le cap du premier tour. Mais tout cela dépendra du premier match face à la Slovénie, qu'il faudra absolument gagner. On vous laisse le soin de conclure… Je remercie tous ceux qui m'ont fait confiance et cru en moi. Je suis comblé car j'ai eu l'honneur de driver les deux clubs les plus populaires du pays, le Mouloudia d'Alger et le CSC. Et le fait que l'OM ait remporté le championnat la même année que le MCA est un signe du destin. A défaut de défiler à la Cannebière, je compte bien le faire aux Trois Horloges.