«Des joueurs l'ont refusé ? Du n'importe quoi !» Le football anglais semble bien vous réussir puisqu'après avoir sorti un bon match face à l'Angleterre en Coupe du monde, vous venez de réussir une très bonne prestation avec les Glasgow Rangers sur le terrain de Manchester United, l'une des meilleures équipes du monde. Comment les choses se sont-elles passées pour vous ? D'abord, nous avons changé de tactique juste avant le début du match. Nous avons joué un peu comme la sélection d'Algérie, c'est-à-dire avec trois défenseurs centraux. C'était donc bien pour moi. (Sourire.) Nous savions que ce n'était pas à nous de faire le jeu, qu'il fallait défendre durant 90 minutes. C'était la chose la plus importante pour nous. Cela fait deux ans que les Rangers souffrent de problèmes financiers, ce qui fait qu'ils ne peuvent pas recruter les mêmes joueurs qu'eux. Nous avons donc fait avec les moyens du bord et nous nous sommes très bien débrouillés. Est-ce que vous y croyiez vraiment avant le match ? Je savais que ça allait être très dur, mais je savais aussi que si nous défendions tous ensemble, nous pourrions nous en sortir avec un match nul. Gagner, c'était difficile. Dans la réalité, est-ce que cela a été aussi dur que ce à quoi vous vous y attendiez ? Franchement, non. Ce qui était bien, c'est que nous avons tous défendu ensemble. C'était collectif. Quand tout le monde défend ensemble avec le même mental, tout devient facile. Il y a presque un an, en Ligue des champions, vous aviez été sévèrement battus à Ibrox Park par le FC Séville (1-4). A l'issue du match, dans la zone mixte, vous nous aviez déclaré que cette défaite allait vous servir à apprendre. Pensez-vous, au vu de votre prestation face à Manchester United, que vous avez beaucoup appris depuis ? Oui, nous avons appris. (Rire.) Ce n'était pas à nous de faire le jeu. Nous ne nous sommes pas livrés. Je pense que nous allons faire beaucoup de progrès à domicile. C'est notre deuxième saison en Ligue des champions et nous savons, avec notre coach, quel style de jeu il faut pratiquer. Par rapport aux matches de la saison dernière, nous avons appris beaucoup de choses. Tout cela va se voir inch'Allah dans notre prochain match. Aujourd'hui, vous avez affronté une nouvelle fois Wayne Rooney qui n'a pas marqué. Pensez-vous que c'est le même Rooney que celui du mois de juin dernier en Coupe du monde ? (Après un moment de réflexion.) Franchement, je ne sais pas ! C'est vrai qu'il a fait beaucoup d'appels, je le voyais, mais on ne lui donnait pas le ballon. Il a fait beaucoup d'efforts, mais il n'arrivait pas à passer notre équipe. Ce n'est pas le même style de jeu (entre celui de l'Angleterre et celui de Manchester United, ndlr). Ici, le jeu est plus «basé» sur lui qu'il ne l'est en sélection d'Angleterre. Cela dit, il reste un grand attaquant. Vous avez joué en défenseur axial droit. Est-ce juste parce que vous êtes droitier ou bien parce que le coach vous a dévolu une mission bien précise ? C'est simplement parce que je suis droitier. Comme milieu axial gauche, le coach a mis Papac qui est un pur gaucher. Ce soir, vous avez vu défiler devant vous quelques-uns des meilleurs footballeurs au monde et même de l'Histoire : Wayne Rooney, Michael Owen, Ryan Giggs… Est-ce pour ce genre de matchs et pour affronter ce genre de joueurs qu'on est motivé d'être footballeur ? C'est sûr que c'est toujours un plaisir de jouer des matches comme ça. Quand on joue un match de Ligue des champions, on a hâte d'en jouer d'autres. Il suffit d'y goûter pour ne plus vouloir s'en passer. Tu affrontes de grands joueurs, tu joues dans de beaux stades, tu apprends… Tu kiffes, quoi ! C'est un plaisir de jouer des matches comme ça. Vous avez été auteur de quelques gestes défensifs décisifs : deux ballons dangereux contrés, deux dégagements délicats de la tête… Vous semblez très à l'aise, comme si vous n'aviez pas du tout le trac… Non ! Le trac, c'est fini ! J'ai maintenant l'expérience des grands matches. Et puis, quand tu connais la pression des matches de l'Algérie, tu n'as plus peur de rien. (Rire.) Ce n'est que du positif. Nous n'avions rien à perdre. Si nous avions perdu, tout le monde aurait dit que c'était normal. Pensez-vous que c'était la meilleure chose que de débuter par un match aussi difficile, à l'extérieur de surcroît, pour jouer sans complexe et sans peur du résultat ? C'est vrai que c'est une bonne chose de commencer par ce match, surtout qu'il y a eu un résultat positif derrière. Maintenant, il faudra assurer à la maison. L'année dernière, nous n'avions gagné aucun match à domicile. L'année dernière aussi, vous aviez débuté par un bon résultat, un nul sur le terrain de Stuttgart avec un but inscrit par vous, mais c'était ensuite la bérézina avec une série de défaites. Avez-vous à présent assez d'expérience pour éviter que cela se reproduise ? Oui, nous avons assez d'expérience. Surtout, nous avons cela dans nos têtes. Nous voulons prouver notre potentiel à domicile. Nous allons essayer de gratter une ou deux victoires à domicile. Il nous faudra au moins 7 points pour nous qualifier au deuxième tour. Nous en avons déjà 1 et il faudra en ajouter au moins 6. Les 3 points semblent à votre portée lors de votre prochain match contre les Turcs de Burgaspor qui ont été balayés sur leur terrain par Valence (0-4)… Ah, bon ? Ils ont perdu 0-4 à domicile ? Oui. Valence, c'est du beau football, tout le monde le sait. La Ligue des champions, c'est ça : jouer différents styles de football. On va visionner tout ça. Déjà, au vu des résultats de ce soir, le match contre Burgaspor s'annonce déjà décisif. Si nous le gagnons, nous «assurerons» au moins la place pour l'Europa League (les clubs qui terminent à la 3e place dans la phase des poules seront reversés en Europa League, ndlr). Cela dit, notre objectif reste la qualification au deuxième tour de la Ligue des champions. Pour vous, c'est jouable ? Si nous obtenons deux victoires à la maison et que nous grattons un autre match nul, ce sera jouable. Ce soir, qu'est-ce que cela vous a fait de jouer un match de Ligue des champions à Old Trafford ? C'est la deuxième fois que je joue dans ce stade. La première fois, c'était avec Charlton, dans un match de la Premier League. C'est un beau stade, une belle pelouse, une histoire… Bref, c'est un plaisir. Parlons de l'actualité nationale avec la nomination d'Abdelhak Benchikha comme sélectionneur national. Comment avez-vous accueilli cette nomination ? Ce qui est bien, c'est qu'on a privilégié l'Algérien. Il n'y a pas beaucoup de pays qui ont des sélectionneurs locaux. C'est quelqu'un qui a débuté en Algérie, qui est parti en Tunisie, puis a pris la sélection des A'. C'est une bonne chose. Si Raouraoua a décidé que c'est lui, c'est qu'il a les compétences. Je ne le connais pas personnellement, mais j'ai entendu beaucoup de bien sur lui. Nous allons apprendre à le connaître lors du prochain stage. Cela va donner peut-être un autre style de football ou même aussi une autre mentalité. Il se dit qu'il y a des joueurs qui auraient préféré un entraîneur étranger et, surtout, éviter Benchikha parce que ce dernier a critiqué l'Equipe nationale après sa défaite 0-4 contre l'Egypte durant la CAN… Pfff ! Vous voyez ce que les rumeurs nous font dire ! Nous, les joueurs, on s'en f… ! Déjà, ce n'est pas à nous de décider, mais à Raouraoua. Ensuite, notez bien que nous n'avons pas eu le temps de nous concerter, nous joueurs, puisque c'est après notre départ du stage que Saâdane est parti. Comment voulez-vous donc que les joueurs disent «je veux ça » ou «je ne veux pas ça» ? C'est du n'importe quoi ! Nous n'étions pas ensemble pour nous parler. Déjà, nous ne savions même pas que Saâdane allait démissionner. Ce ne sont que des rumeurs. Il faut lui dire maintenant (à Benchikha, ndlr) qu'il n'y a aucun cadre de l'équipe qui a parlé de lui. Avec l'Algérie, nous ne jouons que pour le drapeau. En plus de ses compétences en tant qu'entraîneur, Benchikha est connu pour savoir comment parler aux joueurs pour les motiver et leur insuffler la hargne de vaincre. Pensez-vous que c'est ce qui manque à la sélection en ce moment ? Souvent, quand il y a un changement, ça donne un nouveau «boost», une nouvelle mentalité. Ce qui est bien, c'est qu'il connaît l'Afrique. Il sait comment aborder un match, comment motiver les joueurs. S'il a cette réputation-là, c'est une bonne chose pour nous. Dans la rue, il se dit qu'après avoir obtenu un nul contre l'Angleterre, les joueurs doivent être assez forts pour battre des équipes comme le Gabon et la Tanzanie et, qu'à la limite, ils n'ont même pas besoin d'entraîneur pour le faire. Ne pensez-vous pas que vous, joueurs, avez votre part de responsabilité dans les derniers échecs ? La responsabilité incombe à tout le monde, pas seulement au coach. Ce n'est pas le coach qui joue, c'est nous. Contre la Tanzanie, nous avons tout donné. Nous étions dans leur surface durant tout le match. C'est vrai que nous n'avons pas réussi à marquer, mais les gens oublient qu'avec le Ramadhan, nous n'avions pas la lucidité, le punch et le dernier geste pour faire la différence. Vous avez même paru faibles sur ce qui constituait votre point fort il y a quelques mois seulement : les balles arrêtées. Voilà ! Nous n'y arrivions pas. C'est la preuve que nous n'étions pas bien. La chose positive est que nous nous sommes procuré beaucoup d'occasions de scorer et que nous avons produit du jeu. La Tanzanie ne nous a pas dominés. Dans le football, quand on ne marque pas ou qu'on fait match nul, c'est normal que les supporters ne soient pas contents, surtout après une participation à une Coupe du monde. C'est pour ramener la victoire que vous vous déplacerez à Bangui ? Oui. Nous y sommes obligés. C'est juste les conditions de jeu sur place qui pourraient nous créer des problèmes. Ce n'est pas la qualité de la sélection de la République centrafricaine que nous redoutons, mais les conditions de jeu. La motivation, elle y est ? Ah, oui ! Nous n'avons pas d'autre choix que de gagner. C'est souvent lorsque nous sommes dos au mur que nous réagissons bien. Là, nous avons un peu de pression. Nous avions besoin de cela.