«Benzema sait parfaitement que les Français ne nous aiment pas !» A ce jour, la carrière internationale de Sofiane Feghouli n'est pas encore claire. Le joueur n'a encore rien décidé concernant son avenir en sélection. D'ailleurs, beaucoup se demandent laquelle le joueur de Valence choisira. Le refrain est connu et se perpétue d'une génération à une autre, au rythme des éclosions des footballeurs binationaux surdoués, comme lui. Les supporteurs des deux pays souhaitent, tout comme les sélectionneurs et leurs fédérations, voir des joueurs de sa trempe évoluer sous les couleurs de leur pays. Ces derniers, partagés entre l'appel du cœur et celui de la raison, hésitent longuement, avant de se décider. Dahleb et Ziani, en première intention Il faut dire que dans cette histoire, les Bleus pèsent, hélas, nettement plus que les Verts. Du moins pour ceux que la France montre un certain intérêt. Comme ce fut le cas de Karim Benzema et Samir Nasri qui avaient déjà fait leur choix à seulement 20 ans. D'autres comme Dahleb, ou plus récemment Karim Ziani, n'ont pas hésité un seul instant et se sont donnés corps et âme pour l'Algérie, écartant dès l'âge de 18 ans toute ambiguïté. A ceux-là, on pourrait aussi adjoindre ceux qui ont été barrés en Equipe de France et qui se sont rabattus sur l'Algérie. Mais il y en a encore d'autres qui ont attendu le moment opportun pour se décider. N'empêche, l'Algérie hospitalière accueille tous ses enfants à bras ouverts… Ryad Boudebouz pouvait jouer en Equipe de France Si l'Equipe de France, depuis Zidane et sa mémorable équipe «Black, Blanc, Beur» de 1998 attire un peu plus d'enfants issus de l'émigration algérienne, dont le rêve suprême est de faire comme Zizou, celle de l'Algérie, jadis larguée, a pu relever la tête quelque peu, à la suite de sa qualification au Mondial sud-africain. Le cas de Ryad Boudebouz reste le meilleur exemple et laisse même espérer un redressement de la situation au profit de l'Algérie. L'on se dit, depuis, que si un génie de la trempe de Boudebouz, qui aurait sans doute réussi en Equipe de France, a opté pour l'Algérie, c'est que la vitrine des Verts a fini par devenir assez alléchante. Il suffira juste à régulariser leurs participations aux grands évènements comme la CAN et la CM, pour arriver à convaincre. «Benzema sait parfaitement que les Français ne nous aiment pas !» Cela est primordial, si l'on tient à voir les jeunes issus de l'émigration répondre à l'appel du cœur. Car, quoi qu'en pensent certains, les jeunes binationaux ont tous l'Algérie dans le cœur. Il suffit juste de déambuler dans les rues françaises les jours de victoires des Verts pour se rendre compte de l'amour et la passion qu'ont ces Algériens nés ailleurs pour les couleurs nationales. C'est même le cas de tous ceux qui ont opté pour la France ! Il n'y a qu'à voir les yeux palpitants de fierté de Zinédine Zidane lorsqu'il évoque ses racines algériennes. Relisez aussi les déclarations de Benzema ou Nasri concernant l'Algérie et vous verrez qu'aucun doute ne subsiste là-dessus. Le Madrilène avait même acquiescé un jour qu'un de ses amis d'enfance à Bron nous disait que «Karim sait parfaitement que les Français ne nous aiment pas, mais il sait aussi que le seul moyen de se faire respecter est d'être toujours plus fort que tout le monde». A Grenoble, Feghouli était un «petit merdeux» Sofiane Feghouli aussi en sait déjà beaucoup à son âge. Le joueur de Valence n'a pas oublié le traitement que les supporteurs et les médias français lui avaient réservé lorsqu'il évoluait à Grenoble. C'est d'ailleurs pour cela que son conseiller lui a demandé de s'exiler aussi jeune, avant qu'il ne soit entraîné dans la campagne haineuse déclenchée par les médias français contre «la racaille» de l'Equipe de France. Comprendre tous les joueurs issus de l'émigration africaine. Le directeur général du club isérois, Pierre Wantiez, l'ayant déjà qualifié de «petit merdeux» Feghouli savait pertinemment qu'il ne trouverait son salut qu'à l'étranger. En France, il sera harcelé comme Nicolas Anelka La France de la haine a alors saisi la dramatique affaire du bus en Afrique du Sud pour déverser son venin sur les joueurs qui ne ressemblaient pas à Gourcuff, plus représentatif des Français «à cause de son éducation, de son mode de vie sobre et de ses pratiques culturelles» dixit un journaliste anti «Black-Beurs», qui s'était retenu de rajouter la religion pour englober tous les musulmans de l'EDF qui ont fini par exaspérer. A seulement 20 ans, Feghouli a montré qu'il avait un caractère aussi trempé que celui de Nicolas Anelka. Un joueur que la France des Guillaume (comme aiment les jeunes des banlieues à qualifier les Français de souche) a détesté un peu plus depuis qu'il a embrassé l'islam. Et si un Algérien avait dit comme Cantona «je regrette d'avoir été Français et pas Anglais» ? N'étant pas un joueur lisse et docile, Feghouli aura beaucoup de mal à se débarrasser de cette étiquette de rebelle qu'on lui a déjà collée au dos. Il sait qu'en France, on ne pardonne jamais leurs erreurs aux Arabes, et on érige au rang de super stars des joueurs comme Cantona qui a dit un jour ouvertement : «Je regrette d'avoir été Français et pas Anglais !» On se demande bien comment auraient réagi les médias français si c'était un Algérien d'origine qui l'avait dit… Feghouli risque beaucoup en optant pour les Bleus, car depuis l'histoire de Knysna, les Français guettent le moindre écart de conduite pour se venger de ce qu'ils aiment à appeler les «caïds de la racaille». L'Algérie l'accueillera avec un burnous de Ghazaouet Et, forcément, avec un caractère aussi entier que le sien plus proche de l'Algérien que du Français, Sofiane Feghouli passera à la trame un jour ou l'autre. On lui pourrira sa vie dans les médias comme on l'a fait pour Anelka, Benzema et Ribery. C'est pour cela qu'il a tout intérêt à opter pour les Verts, où il trouvera des joueurs qui parlent le même langage «rebeu» que lui et où chaque mot français arabisé sera valorisé et fera rire tous ses frères. Il ne se souciera pas de savoir qui le guette de derrière et qui va l'accuser de comploter contre les «Blancs». Avec le climat de suspicion qui règne chez les Bleus, Feghouli ne s'y sentira sans doute jamais heureux. A l'inverse de celle de ses «vertes» racines où on lui pardonnera bien plus qu'une erreur de jeunesse. On l'accueillera comme le fait sa famille. A l'algérienne ; et on lui mettra sur le dos l'un des plus beaux burnous. De ceux des vaillants cavaliers de ses ancêtres de Ghazaouet.