Kalem : «Boumediène nous avait dit : “Gagner ce match et faites-moi plaisir“» Le match du 22 mars 1969 s'est joué à Agadir. Il rentrait dans le cadre des éliminatoires de la Coupe d'Afrique des nations. A l'aller, les Fennecs avaient battu l'équipe nationale du Maroc par deux buts à zéro. Un match que nous avions abordé dans l'édition d'hier. Kalem avait ouvert la marque à la 10' et Natouri doublait la mise 10 minutes plus tard. Les coéquipiers du défunt Khiari, joueur de l'USMK, devait revenir d'Agadir avec au minimum une défaite par un but d'écart pour se qualifier. C'est ce qui s'était passé justement lors du match retour. Le Maroc avait pris le meilleur sur l'Equipe nationale d'Algérie par un but de Maroufi à 7 minutes de la fin de la partie. Le portier de l'époque, Mohamed Abrouk, gardait les buts du CRB et habitait le quartier populaire du Champ-de-Manœuvre au 5e groupe exactement, un quartier qui avait enfanté Kalem et tout récemment Bakhti et Belaïd. Contre le Maroc, Abrouk était crédité d'une partie époustouflante. La presse de l'époque, même s'il n'y avait pas de nombreux titres, titrait à la une : «L'équipe nationale résiste, Abrouk fait le reste». Il faut dire que dans les années 70, un gardien de but volait la vedette à tous ses pairs. Abrouk avait commencé par remplacer Nassou au CRB - ce dernier est toujours en vie - mais n'accorde jamais sinon très rarement d'entretiens. Mieux, il avait fait de l'ombre aux grands gardiens de but de l'époque, à l'image de Zerga, El Okbi (décédé). Ce dernier était en fin de carrière. Il y avait aussi Ouchen, qui avait eu les préférences de Makri, le coach romain, qui avait pris en main les destinées des Verts au milieu des années 70. Abrouk terminait sa carrière à l'US Santé, club aujourd'hui disparu. En 70, le hat trick de Kalem n'avait pas suffi De nouveau, les deux nations se retrouvent en 70 pour jouer les éliminatoires de la Coupe d'Afrique des nations. A Alger, le match se joue au 20-Août, le stade du 5-Juillet n'existait pas encore. Les Hongrois le construiront en 72. A l'aller, c'est un attaquant qui va se distinguer. Il s'agit de Mokhtar Kalem du haut de ses 1,70 m, il marquera trois buts, dont un joli but de la tête. Il avait fait voir de toutes les couleurs à la défense marocaine et au célèbre gardien Allal. Cette victoire, pourtant large, sera malheureusement insuffisante. Le but inscrit par Benane, à la 6', pèsera lourd dans le décompte final. Le Maroc réussit à se qualifier grâce à un but marqué à la 96'. Il menait par 2 buts à 0. Les Algériens avaient longtemps reproché à l'arbitre d'avoir exagéré en rajoutant six minutes de temps additionnel. Malgré le 3 à 1 de l'aller, le résultat restait insuffisant et les Fennecs étaient éliminés. --------------------- 22-03-1969 Maroc 1 - Algérie 0 Eliminatoires Coupe d'Afrique des nations Stade : Agadir Arbitre : Ngom (Sénégal) But : Maroufi (83') Algérie : Abrouk, Attoui Ali (Khiari), Bourouba, Tahar (Moha), Hadefi, Seridi, Natouri, Selmi, Kalem, Abdi, Achour Entraîneur : Amara Maroc : Allal, Abdallah, Filali, Idriss I, Maroufi, Saïd, Bamous, Idriss II, Bentayeb, Hamouane, Ghezouani Entraîneurs : Cluzeau et Settati --------------------- 10-12-1970 Algérie 3 - Maroc 1 Eliminatoires Coupe d'Afrique des nations Stade : 20-Août (Alger) Arbitre : Mostefa Kamel (Egypte) Buts : Kalem (46', 60', 80') (Algérie) ; Benane (6') (Maroc) Algérie : Abrouk, Amar Sid Ali, Debbah, Tahar, Hadefi, Seridi, Betrouni, Henkouche (Selmi), Kalem, Lalmas, Tahir Hacène (Chalabi) Entraîneur : Zouba Maroc : Allal, Abdallah, Boudjemaâ (Larbi), Moulay, Idiriss, Slimani, Petchou, Saïd Maroufi, Maâti (Alaoui), Bamous, Benane Entraîneur : Vidinic ----------------------- Kalem : «Boumediène nous avait dit : “Gagner ce match et faites-moi plaisir“» C'est avec l'un des acteurs essentiels de la première manche que nous avons revisité l'histoire. Mokhtar Kalem avait marqué trois buts. L'ancien buteur du CRB et du NAHD raconte aussi une anecdote en marge de cette rencontre, le passage du président de la République au centre de regroupement et de mise au vert des Fennecs. Au cours du match, l'Algérie était menée en première mi-temps avant que l'avant-centre du CRB ne mette le turbo au début de la seconde période. Vous étiez au top de votre forme, vous réussissiez trois buts… Le match était assez particulier. On avait connu des moments de friction avec nos amis marocains sur le plan politique. Je me souviens de la visite du défunt président Houari Boumediène… Le Président en personne ? Absolument. On était en regroupement à Sidi Moussa. Il avait apparu un peu fatigué, à mon sens. Dans son burnous, la présence du Président impressionnait. Quel souvenir gardez-vous de son passage dans votre lieu de mise au vert ? Que vous a dit le Président de particulier ? Il avait lâché devant une assistance silencieuse et tout ouïe : «Farhouni» (faites-moi plaisir). Parmi les trois buts que vous marquiez, un était sur un coup de tête… C'est exact, j'ai marqué un but de la tête, j'avais des coéquipiers comme Lalmas ou Selmi sans oublier Séridi. Je recevais des ballons précis tantôt de la droite, tantôt de la gauche. Malgré votre tête, qui n'est pas celle d'un avant-centre de grand gabarit, on se souvient de votre double détente. Comment expliquez-vous cette détente extraordinaire ? Vous savez, je ne mesure qu'un mètre soixante-dix, mais je compensais ma taille par un travail très dur. Je travaillais beaucoup la corde et cela me permettait de disputer le ballon aux défenseurs qui étaient de grands gabarits. Il faut savoir que cela ne sert à rien d'avoir une grande taille, si on n'est pas capable de sauter au bon moment. Le jeu de tête est une question de timing. Les moyens de l'époque n'étaient sans doute pas ceux dont on entend parler maintenant, n'est-ce pas ? Bien évidemment. On mangeait les lentilles et les spaghettis et on ne parlait pas encore à coups de milliards. Le football était une question de couleurs. On jouait par amour pour le pays et pour honorer le drapeau. Les Marocains ont dû prendre leurs précautions pour vous empêcher de marquer dans la seconde manche. Un commentaire ? La presse marocaine avait parlé de ma prestation et dès que les Marocains ont su que je serai présent lors de la seconde manche, la presse avait parlé de ma présence en titrant que le bourreau de l'équipe du Maroc était du voyage -------------------- Cela s'est passé ce jour-là Boumediène s'était rendu au Maroc, le Maghreb avait meilleure allure Le président Boumediène s'était rendu au Maroc et la visite avait permis aux deux pays de connaître une meilleure coopération. Au match de 69, qui se jouait au stade d'El Annasser, étaient conviés les responsables des quatre pays du Maghreb. Un signe de détente certain, même si quelques années plus tard, l'affaire du Sahara occidental avait jeté le trouble entre l'Algérie et le Maroc. Premier marché algéro-marocain Dans le quotidien El Moudjahid, on parle dans les pages centrales d'un premier marché algéro-marocain. Les deux pays s'échangent des produits comme les engrais de phosphate du côté marocain contre des produits pétrochimiques envoyés par l'Algérie à son voisin de l'Ouest. Comme on peut parler aussi d'échanges commerciaux entre les deux pays que de bruits de bottes à la frontière, à cette époque. -------------------- WAC 0 - MCA 2 En match aller de la Coupe maghrébine, le MCA avait battu WA Casablanca par deux buts de l'inévitable Tahir Hacen. Le match retour s'était joué le 30 mars 1969. Six années plus tard, en 76, le MCA menait par le même Tahir Hacen que tout le monde surnommait «Boukhnouna». Il avait un tic qu'il répétait trois cents fois dans un match : il s'essuyait le nez de ses deux avant-bras. Grâce aussi à Betrouni et aux nouvelles figures comme Bachi et autres Benchikh, le MCA avait gagné la Coupe d'Afrique des clubs champions. Une finale retour jouée sur le tartan du stade du 5-Juillet qui avait vu une année auparavant l'Algérie remporter les Jeux méditerranéens de 75 sous les yeux de Boumediène