«Raouraoua ne m'a rien proposé pour l'heure. S'il venait à le faire, j'en serais plus que fier et prêt à entamer ma reconversion» «J'ai des contacts des L1 et L2» L'ancien capitaine de l'EN, Yazid Mansouri, qu'on a joint hier au téléphone, a accepté de revenir avec nous sur la débâcle des Verts face au Maroc, lui qui était présent à Marrakech et a suivi de près cette rencontre. Il estime que pour le bien de la sélection, il ne faut surtout pas tout remettre en cause et revenir, comme ce fut le cas par le passé, à zéro. Avec du recul et vu que vous étiez au stade de Marrakech, comment analysez-vous la débâcle subie par la sélection nationale devant cette formation marocaine ? Je dirai tout simplement qu'on est passés à côté de notre match. Pourtant, on avait bien démarré la rencontre et on sentait que les joueurs maîtrisaient parfaitement bien le ballon durant les 15-20 premières minutes. Les Marocains ont eu la chance d'ouvrir le score sur balle arrêtée, et ce n'est qu'à partir de là qu'ils ont pris confiance et qu'ils ont rajouté d'autres buts. C'est un non-match pour l'EN, voilà tout. Maintenant, il faut penser à vite relever la tête et essayer de se rattraper du mieux que possible lors de ces deux matchs qu'il nous reste à disputer. Avouez que pour ce match retour, l'Algérie partait avec un certain avantage par rapport à l'adversaire, notamment lorsqu'on sait qu'elle disposait de l'ensemble de ses joueurs titulaires… Vous savez, la situation est un peu délicate et il n'est pas facile d'analyser ce genre de rencontres. On est en fin de saison et peut-être que certains joueurs étaient assez loin de leur forme physique habituelle. Les Marocains étaient plus entreprenants que nous et ont parfaitement joué le coup. Par le passé, notre grande force résidait dans son secteur défensif, hélas !, samedi dernier, on a vu que la défense n'arrivait pas à contenir les assauts répétés des attaquants adverses. Cela dit, ce n'est qu'un match perdu, et il ne faut pas se focaliser là-dessus. Il faut passer à autre chose et relever la tête le plus rapidement possible. Certains disent que le fait que l'EN ait programmé un long stage en Espagne a quelque peu usé les joueurs, contrairement à la sélection marocaine qui n'a entamé sa préparation que huit jours avant la rencontre. Qu'en pensez-vous ? Peut-être, car faire un long stage en fin de saison, mentalement, ça fatigue les joueurs. Cela dit, comme tout le monde le sait, il y a des joueurs qui ont intégré ce stage à sa fin. Je citerai les pensionnaires des championnats de France. Dans ce cas de figure, il faut trouver le juste milieu des choses. C'est-à-dire faire un stage qui ne doit pas être ni trop long ni trop court. Il faut avoir l'avis des joueurs. Maintenant, il y avait un coach en place et il faut, par conséquent, respecter ses décisions. Je ne suis pas bien placé pour apporter un jugement précis, car il faut voir le contenu de ce stage, à savoir si la charge de travail était oui ou non lourde, etc. Après cette défaite, beaucoup de médias ont affirmé que certains joueurs avaient découché l'avant-veille du match. Vous qui étiez présent à Marrakech durant toute cette période d'avant-match et qui étiez proche des joueurs, est-ce que vous avez entendu parler de cette histoire ? Sincèrement, non. Je pense que les joueurs sont des professionnels et je ne crois pas que certains aient fait ça avant un match aussi important. Après cette déroute, Abdelhak Benchikha a déposé sa démission. Quel commentaire faites-vous à cette décision ? Je ne sais pas pourquoi il a démissionné aussi rapidement. C'est étrange, lui qui n'a fait que trois rencontres officielles. Certes, la défaite fut très lourde, mais ça me semble assez précipité. Lors de ce match, c'est plus l'envie et la solidarité qui manquaient à l'équipe, contrairement au match de l'aller où, même si on n'avait pas fait un grand match, on a quand même assuré la victoire grâce à la grande hargne avec laquelle les joueurs ont évolué. Vous avez qualifié cette démission d'étrange. Vous ne pensez pas qu'après une telle déroute qui réduit aussi les chances de qualification de l'EN à la prochaine CAN, Benchikha n'avait pas vraiment d'autre choix que de rendre le tablier ? A mon avis, il aurait dû patienter un peu et pourquoi pas continuer son travail. Maintenant, c'est sa décision et il faut la respecter. Il a certainement ses raisons. En tout cas, j'ai un bon retour des joueurs et la plupart étaient satisfaits de lui. A travers les déclarations de certains joueurs après ce match, en l'occurrence Boudebouz, Yebda et Bouzid, qui paraissaient dégoûté de ne pas avoir joué l'intégralité de cette rencontre, ne pensez-vous pas qu'il y ait un certain égoïsme qui est en train de s'installer au sein de ce groupe et qui nuit finalement à sa bonne ambiance ? Il est clair que dans un groupe, si chacun commence à penser qu'à soi-même et veut se mettre tout seul en avant, on ne peut pas avancer. Maintenant, dans certains cas, je peux comprendre la frustration des joueurs. Cela dit, il faut respecter les décisions du coach pour préserver la bonne ambiance du groupe. Moi-même, j'ai été victime des décisions du sélectionneur lorsqu'on m'a privé d'une participation au Mondial, mais sur le moment, j'ai rien déclaré de méchant dans les médias. J'ai attendu un an après pour en parler. Même si c'est dur parfois, il faut penser à privilégier l'intérêt de la sélection avant tout. La FAF a décidé de mettre en place très prochainement un nouveau staff technique exclusivement étranger. C'est la meilleure solution d'après-vous ? Je ne sais pas si c'est la bonne décision ou pas, mais il faut faire confiance au président de la FAF qui sait ce qu'il fait. Je pense que ce n'est pas ça le plus important. Il faut se remettre au travail et relancer la machine. Ce que je trouve regrettable, c'est qu'à chaque fois que l'EN réussit à faire de bons résultats, quelques mois par la suite, elle revient presque au point zéro. C'est incompréhensible ! C'est justement la question que se posent les millions d'Algériens. Pourquoi notre EN n'arrive pas à être régulière dans ses résultats ? Ce qui se passe, c'est qu'on modifie sans cesse l'équipe et on change pratiquement tout le temps d'entraîneur. C'est vraiment dommage ! Je pense que même si les résultats ne sont pas toujours là, il faut quand même garder la stabilité et travailler davantage pour régler la situation. On doit profiter à fond des dates FIFA pour programmer des stages et jouer le plus de rencontres amicales possibles. Moi, je pars du principe que quand on est un coach, il faut rester très proche des joueurs et être affectif avec eux. Regardez comment Laurent Blanc fait avec l'équipe de France. Sa philosophie de travail a permis à l'équipe de rebondir et de devenir plus forte qu'avant. Certaines informations ont affirmé que vous êtes en pole position pour faire partie du prochain staff technique de l'EN. Confirmez-vous cela ? Très sincèrement, il n'y a rien de concret au sujet de cette information que je qualifie de rumeur beaucoup plus. Je profite justement de cette interview pour éclaircir ce point. C'est vrai qu'on s'était vu Raouraoua et moi à Doha, il y a quelques semaines de cela, et je peux vous assurer qu'il m'a juste demandé de me passer mes diplômes d'entraîneur. Pour l'instant, moi, je suis toujours en activité et personne à ce jour à la fédération ne m'a proposé d'intégrer le futur staff technique de la sélection. Maintenant, si on me propose un truc, j'y réfléchirai et je serai ouvert à un bon projet. J'en ai certes envie, car je connais tous les joueurs et je sais m'exprimer. J'ai été capitaine de la sélection durant plusieurs années et même en club. Mon ancien coach à Lorient, Gourcuff, disait de moi d'ailleurs que j'étais quelqu'un de mûr qui sait prendre de recul et bien analyser les choses. Cela démontre que j'ai le profil. En tout cas, ça me ferait vraiment plaisir de mettre, une nouvelle fois, au service de mon pays. Comment voyez-vous votre avenir professionnel pour l'instant ? Pour l'instant, je suis en attente pour un contrat de deux ans dans un club français. Maintenant, s'il y a un projet intéressant en sélection, je suis prêt à m'investir à 2000%. Quels sont les clubs qui vous ont contacté ? Il y a deux clubs de L1 et quelques formations de L2 aussi. Cela dit pour le moment, je préfère ne rien dévoiler, car rien n'est encore conclu. Quand on fait un constat général de la sélection depuis un an maintenant, on peut dire que depuis votre retraite internationale, l'EN marche moins bien… Je ne veux pas la jouer prétentieux. Je dis juste qu'il y a des joueurs en place et certains nouveaux éléments qui arrivent et il faut juste leur faire confiance. L'EN regroupe des éléments de grande qualité, l'ambiance est là et il faut juste travailler davantage. Je ne suis plus dans le groupe pour vous dire comment les choses se passent, mais ce que je peux vous dire, c'est que si on veut que l'EN avance, il faut absolument que les joueurs pensent avant tout à son intérêt. Après chaque débâcle de l'EN, on a tendance à viser les joueurs immigrés qui la composent. Certains irons jusqu'à douter de leur amour pour les couleurs nationales. Vous qui êtes un immigré, qui a longtemps défendu le maillot vert, comment interprétez-vous ce énième débat ? Ecoutez, il faut arrêter de toujours chercher les excuses en tirant sur les joueurs issus de l'émigration. Ce que je peux vous dire, c'est que c'est joueurs-là viennent toujours avec grand bonheur en sélection. Moi-même, quand j'étais international, je venais en courant en Algérie, même si, à mon époque, il n'y avait pas du tout les moyens qu'il y a maintenant. Il ne faut pas tout remettre en cause et accabler uniquement les joueurs après cette défaite. Je suis sûr qu'ils voulaient bien faire dans ce derby, mais malheureusement, les choses ne sont pas passées comme ils l'avaient souhaité. On doit rester solidaires. Dans un autre registre, et d'après les informations qu'on a eues, Meghni, qui était en votre compagnie à Marrakech, vous aurez demandé des échos sur le championnat qatari. Est-ce vrai ? A vrai dire, on s'était déjà vus là-bas à l'époque où il était venu soigner sa blessure au genou. Il connaît le mode de vie au Qatar et a son idée sur son championnat, car il avait assisté à deux rencontres de championnat. Maintenant, c'est clair que je lui ai donné quelques informations sur le fonctionnement des clubs là-bas, sans plus. Est-ce que vous lui conseillerez de venir jouer au Qatar ou bien de rester exercer en Europe, vous qui avez joué cette saison dans ce championnat qatari après plusieurs saisons de haut niveau en France ? Mourad a des qualités hors normes. Pour moi, il est le meilleur joueur de l'EN, aussi bien sur le plan tactique que technique. Malheureusement pour lui, il n'est pas gâté par les blessures. Désormais, c'est à lui de décider de son avenir. On est là pour le soutenir et l'aider à chaque fois qu'il en a besoin. Pensez-vous que le championnat qatari serait bien pour lui ? Et s'il n'a pas de proposition de l'Europe et il n'y a qu'au Qatar qu'on le sollicite ? Il est clair que dans ce cas, il n'a pas vraiment de choix que de le faire. Ce que je peux lui dire, c'est de prendre du plaisir au moins sur une année au Qatar, retrouver le temps qu'il a perdu tout au long de ces deux dernières saisons et refouler tout doucement les pelouses. Par la suite, il pourra toujours rebondir et retourner en Europe dans un bon club.