«Je rêve de jouer la Ligue des Champions avec Monaco dans deux ans» Le nouvel entraîneur de l'AS Monaco explique avec humour et sans détour comment il gère son équipe. Il promet aussi du changement lors du prochain mercato. Le tout dans un français aussi remarquable que sa coupe de cheveux. La première question ne sera pas la plus agréable, mais comment se sent-on après avoir vécu sa première défaite en tant qu'entraîneur ? Quel est le sentiment qui prédomine ? C'est le même sentiment que lorsque j'étais joueur : Je n'aime pas perdre ! L'entraîneur et le joueur sont la même personne. J'ai déjà envie de jouer le prochain match pour arranger les choses. Ça me rend… (il hésite) fou ! Enfin, je ne sais pas si c'est le bon mot mais je déteste voir mon équipe perdre. Que ce soit avec Monaco, Milan ou Barcelone. Quand on passe à travers, c'est la pire des choses, mais à Laval j'ai vu les choses que je voulais voir. Je reste donc serein. Et on passe aussi une mauvaise nuit ? On refait le match dans son lit ? L'analyse est différente vu que le rôle est différent. Mais qu'on gagne ou qu'on perde, on n'arrive jamais à dormir. Il reste trop d'excitation. Et étant joueur, c'était pareil. Je rejoue toujours le match 4 ou 5 fois. A l'époque où j'étais joueur je ne regardais que mes actions, aujourd'hui je regarde tout le match. Après trois matchs le bilan est équilibré (1 victoire, 1 nul, 1 défaite). Etes-vous satisfait de vos premiers pas en tant que coach ? Je pense qu'on pourra faire un bilan au bout de 10 matchs. Pour le moment, le plus important est de faire progresser l'équipe. Quand on prend en main une formation en cours de saison, on doit presque tout effacer pour recommencer. Je ne peux pas dire que je suis satisfait mais c'est correct. On parle souvent d'un choc psychologique… (Il coupe) Mais ça n'existe pas le choc psychologique ! La seule chose qui existe c'est qu'un groupe, une équipe a envie ou non de continuer avec un entraîneur. Quand un nouveau coach arrive avec son staff, le joueur a une plus grande attention. Comment les joueurs vous ont-ils accueilli ? Quel a été votre discours ? Ma chance c'est de connaître les joueurs déjà au club. Je les ai toujours vu jouer. Et puis les deux adjoints (Jean Petit et Frédéric Barilaro, ndlr), je les connais aussi. Même si je suis le seul à venir de "l'extérieur" il y a une forme de continuité avec le club. Qu'avez-vous apporté tactiquement alors à l'ASM ? Le staff a tout recommencé à zéro. On ne voulait pas modifier, ou arranger. On repart de zéro. On s'appuie sur nos principes. J'ai la certitude que les joueurs ont l'exigence d'avoir des séances tactiques. Il faut se mettre dans la tête qu'une équipe c'est onze joueurs. Et pour faire ça, il faut opérer des changements tactiques. L'équipe est attentive sur ce sujet. Ce n'est pas encore parfait, mais ça progresse, c'est positif. Vous êtes un observateur avisé de la Ligue 1 mais la Ligue 2 requiert des qualités bien différentes. Vous sentez-vous prêt à affronter ce championnat ? Je connais aussi très bien la Ligue 2 car je la suis depuis longtemps. Je ne suis pas surpris du niveau de la Ligue 2. Mais c'est un faux débat, je trouve. Même en National ou en CFA, si on ne respecte pas certains principes on peux avoir le maillot de Barcelone ou de Milan et passer au travers. La seule chose qui est certaine, c'est quand on montes d'une division on gagne en qualité technique. Mais les principes restent les mêmes. Ce n'est pas parce que l'on est en Ligue 2 qu'on doit se préparer au combat et oublier le jeu pur. Finalement quel est l'objectif du club, on a du mal à le situer. Vous êtes 19e mais à 7 points du podium… Le club n'a pas d'objectif. Nous prenons un nouveau départ après 6 journées. On est encore fragile sportivement. On ne peut pas se fixer un objectif. C'est un interdit, impossible. On peut le faire quand on a une idée de la valeur de son équipe. Ma vision à très long terme c'est le match de vendredi, c'est tout. Pas plus loin pour le moment. C'est un discours de façade, vous ne pouvez pas vous cacher derrière ces arguments… Non, non, non (rires) ! Je peux vous garantir que ce n'est pas un discours de façade. Dans ma vie, j'ai toujours avancé avec des rêves. Imaginons pour x raisons que nous faisons un super travail et nous montons en Ligue 1, ce rêve là aide à me pousser, à avoir des objectifs. Mais derrière tout cela, il y a une réalité. Il faut être réaliste par rapport à la situation sportive du club. Si je suis à Monaco aujourd'hui, c'est parce qu'il y a eu des problèmes avant. On doit faire avec ces problèmes mais ils ne doivent pas être mis sur notre dos. Mais c'est sûr que je rêve de jouer la Ligue des Champions avec Monaco dans deux ans (rires). Rêver permet de m'aider à progresser, c'est normal. C'était la même chose quand j'étais joueur de football. J'espère que mes joueurs font des rêves aussi. Pourquoi avoir choisi Monaco ? Aviez-vous d'autres propositions ? Non, mais peut-être que tout le monde ne savait pas que j'avais commencé à passer mes diplômes d'entraîneur. Et puis je n'avais jamais dit, que ce soit publiquement ou avec mes amis, que je voulais être entraîneur tout de suite. J'y songeais en cas de belle occasion. Quand vous avez été nommé coach vous avez clairement expliqué que vous n'étiez pas un magicien. C'est étrange comme première déclaration... Mais aucun entraîneur n'est un magicien, je peux vous le garantir. Que ce soit Mourinho ou n'importe qui d'autre, il n'y a pas de magicien. Il y a simplement des entraîneurs préparés. Vous avez aussi dit que vous n'étiez pas "entraîneur"… Encore plus étrange alors que l'on vient d'être nommé à la tête d'un club... C'est un problème de compréhension. Je voulais simplement dire que je n'avais pas l'expérience d'un entraîneur, j'en avais juste le statut. Je suis encore loin d'être un entraîneur. Vous êtes arrivé avec un effectif déjà en place sans la possibilité de le changer. Peut-on s'attendre à du changement lors du prochain mercato. En tant qu'ancien grand joueur vous devez avoir un carnet d'adresses conséquent… (Rires) J'aimerais avoir le budget de Leonardo. C'est un grand joueur, peut-être comme moi aussi je l'ai été, mais on est sur deux planètes complètement différentes. En revanche, je peux vous garantir que j'ai le même carnet d'adresses que Leonardo (rires). Certains joueurs je peux les appeler pour les féliciter, c'est tout (rires). Là, ce n'est même plus du rêve, c'est de l'utopie. En tout cas c'est plus facile de recruter à Monaco notamment pour des raisons fiscales… Je ferai des demandes à mes dirigeants pour recruter quelques joueurs, c'est sûr. Vous avez déjà réfléchi à des pistes ? Oui, mais tout ça je le garde pour moi. Vous évoquiez le PSG, un club pour lequel vous avez joué (entre 1997 et 1999, ndlr). Est-ce que cette équipe vous fait déjà rêver ? Non, le PSG n'est pas encore une équipe qui me fait rêver. En revanche, il y a des joueurs qui me font rêver, c'est sûr. Il ne faut pas penser que ce qu'est en train de réaliser le PSG est facile. Le club a quatre joueurs (Nenê, Gameiro, Ménez, Pastore, ndlr) qui peuvent faire la différence à tout moment mais il faut aussi féliciter Kombouaré et la gestion de Leonardo. Ce n'est pas parce qu'on a beaucoup d'argent que l'on gagne automatiquement. Il est en train de se passer quelque chose à Paris. Je souhaite à Leo de réussir. Il fait du bon travail. La nouvelle star du PSG, c'est Javier Pastore. En France, le grand public le découvre, mais en Italie, c'est déjà une pépite. Platini l'a même comparé à un certain Zinedine Zidane... Il faut voir si Zidane avait déjà ce niveau-là à l'âge de Pastore. Sincèrement, je ne me souviens pas du niveau de Zidane à 22 ans, mais Pastore a encore du chemin avant de réaliser ce qu'a fait Zidane. Mais il a tous les moyens pour réussir à faire ce qu'a fait Zidane. C'est un super joueur. Il y a aussi eu des petites bizarreries autour de votre statut d'agent en Italie (la loi française interdit de cumuler les deux emplois, ndlr). Que se passe-t-il réellement ? Ce sont des petites choses faites par des petites personnes. Je ne pense pas que Monaco puisse se permettre de faire des choses qui ne sont pas en règle. Nous ne sommes pas des irresponsables. Les gens (deux syndicats français d'agents de joueurs, ndlr) réagissent comme ils veulent, c'est leur problème. Vous avez aussi dû gérer la polémique avec Didier Deschamps… J'ai répondu à Didier Deschamps comme il fallait. Je ne cherchais pas la polémique. J'ai lu ce qu'il a dit, je ne l'ai pas entendu. J'ai trouvé qu'il a dit des choses justes à mon sujet. Quelqu'un a dû demander ce qu'il pensait de ma nomination (passant de consultant à entraîneur). Moi aussi j'aurais répondu comme lui. Mais ce n'était pas méchant. Moi j'étais encore journaliste il y a quelques semaines, et je sais qu'on aime bien les petites phrases pour chercher la polémique (rires).