«Si Mahmoud Djaber a des choses à me reprocher, il ferait mieux de me les dire en face» «Comment peut-il me juger alors que je n'ai joué que 10' en quatre matches ?» Entre Amir Saâyoud et son entraîneur, Mahmoud Djaber, c'est l'amour vache ! Les deux hommes couvent un conflit relationnel depuis quelques jours que l'entraîneur d'Al Ismaily a décidé de rendre public dans une interview dans laquelle il s'était attaqué «vertement» à l'international algérien qu'il dit l'avoir déçu, sans pour autant donner des arguments techniques à même d'étayer son jugement. Une «attaque» que le gaucher encaisse mal. En guise de réaction, il a refait son baluchon et est rentré chez lui dans la foulée, non sans exposer au Buteur sa situation tel qu'il la vit. Confidences ! Amir Saâyoud, vous ne jouez plus depuis quatre matches avec Al Ismaïly, quelles en sont les raisons ? Moi-même je les ignore. Je n'ai toujours rien compris. Quand j'y pense, je ne trouve aucune explication à ma situation. Comment ça se fait ? Bah, je n'en sais rien…En quatre matches, je n'ai joué que dix minutes. J'ai été convoqué deux fois, entré en jeu une fois et écarté des 18 deux fois. Le pire , c'est que je ne comprends plus rien à cette situation. Le coach n'est jamais venu m'en parler. J'aurais aimé qu'il m'explique de quoi il en retourne. J'aurais sans doute accepté ses choix. Mais là… Le courant ne passe plus ? Il n'y a jamais eu de communication entre nous. Il ne m'a pas «calculé» dès le départ. Pourquoi ? Y a-t-il un conflit relationnel entre vous ? Pas de mon côté en tous les cas. Après, lui, je n'en sais rien. Comme je l'ai dit, il n'est jamais venu me parler. A croire qu'il a une dent contre moi. C'est la première fois que vous évoluez sous sa coupe ? Oui, je ne le connaissais pas jusqu'ici. C'est la première fois que je travaille avec lui. Je ne sais pas s'il s'est fait une fausse idée sur moi, mais je ne lui ai rien fait qui vaille ce traitement. Il m'ignore complètement. Avez-vous essayé de vous expliquer, histoire de mettre les choses à plat et, si besoin est, crever l'abcès ? Non, il n'y a jamais eu d'approche. J'estime que ce n'est pas à moi d'aller vers lui. Ce n'est pas de mes habitudes d'aller demander des explications à un entraîneur sur ma situation. Logiquement, c'est à lui de le faire. Au Ahly, bien que je ne jouais pas très souvent, Manuel José me parlait beaucoup. Il m'expliquait certains choix, il me rassurait aussi. Je n'étais pas un titulaire à part entière avec lui, mais il me faisait comprendre que j'étais important. Ça me rassurait. Là, c'est le contraire. Il n'y a aucun contact. Il ne m'a jamais adressé la parole depuis qu'il est arrivé. Il a dressé un tableau peu flatteur sur vous dans la presse égyptienne, comment avez-vous réagi à ses déclarations ? Avec incompréhension. Je ne m'attendais pas à une telle sortie de sa part. Ce qu'il a dit, j'aurais souhaité qu'il me le dise en face, les yeux dans les yeux. Je lui aurais sans doute demandé des explications et on aurait mis les choses à plat comme tu le disais tout à l'heure. Là, il raconte que je l'ai déçu…En quoi ? Il m'a fait jouer dix minutes et il me juge. C'est insensé. C'est une attaque ? Oui. Enfin, c'est comme ça que je vois les choses. Apparemment, il avait un compte à régler avec moi et il l'a fait à sa manière. Sinon, comment peut-il me juger sur la base de dix minutes en quatre matches ? En Egypte, on connaît ma valeur. Je ne peux pas devenir mauvais du jour au lendemain. A vous, il n'a rien dit… Rien. Il était venu, en fait, une fois me dire que la saison était longue, que j'aurais sans doute ma chance plus tard. J'ai cru bon d'en prendre compte, mais la situation a empiré. Cela fait deux matches que je ne suis plus convoqué. Pourtant, ça a bien commencé pour vous à Al Ismaïly, non ? Absolument. La situation a changé du tout au tout. Avec Hassan, j'étais mieux considéré. Il avait fait des pieds et des mains pour m'avoir. Je jouais avec lui plus souvent. Après, les choses se sont précipitées pour lui après la défaite en Coupe. Il a été débarqué. C'est là que tout a changé. Peut-être que le nouvel entraîneur cherche à marquer de son empreinte son arrivée, comme il ne vous a pas recruté, il ne vous fait pas jouer… J'ai pensé à ça. Il dit dans la presse que s'il était en poste cet été, il ne m'aurait pas fait signer. Qu'avec moi, l'équipe joue à dix et j'en passe. Il était allé très loin dans ses déclarations. C'est de l'acharnement. Il n'y a rien de sportif à ce qui m'arrive. Vous en êtes certain ? Oui ! On ne peut pas juger un joueur sur dix minutes. Je ne me proclame pas le meilleur, mais j'ai ma place dans cette équipe. La preuve, voyez la façon dont il s'est attaqué à moi dans la presse. Vous êtes chez vous à Guelma depuis quatre jours, avez-vous été autorisé par la direction ? Non. Je n'ai pas été autorisé, mais je ne vois pas ce que je ferai là-bas. Je n'ai plus l'envie. Depuis quelques jours, je me rends à l'entraînement sans conviction. J'ai perdu mon enthousiasme. Je n'ai pas été payé, mais je n'ai rien dit. Là, ç'en est trop. Vous boudez à cause de votre argent ? Absolument pas. Je n'ai jamais rien réclamé au club et les dirigeants peuvent en témoigner. Je connaissais la situation financière du club. Je savais qu'Al Ismaïly était en crise, mais j'ai accepté de venir, car pour moi, ce qui comptait le plus était de me relancer. Je voulais d'abord jouer. Ma priorité était de relancer ma carrière. Je n'ai jamais privilégie l'argent. Mais là… Cette période coïncide avec le calendrier Fifa, votre absence pourrait-elle être justifiée ? Initialement, le club projetait de me libérer à partir du 20, mais je n'ai pas voulu rester, d'autant que le championnat est à l'arrêt. J'ai dit aux dirigeants que je rentrais chez moi. Il y a deux matches amicaux face à l'Afrique du Sud que j'ai envie de jouer. Au moins, je gagnerai en temps de jeu. C'est toujours mieux que de rester dans ma bulle. Ça ne m'aide en rien. Vous allez tout de même rentrer en décembre au Caire, qu'allez-vous faire ? Pensez-vous pouvoir terminer la saison à Al Ismaïly ? Dans ces conditions, non. J'irai sans doute ailleurs. Je ne veux pas encore perdre du temps. Je suis venu pour jouer. Si on pense qu'on ne peut pas m'assurer du temps de jeu, j'irai dans un autre club. C'est certain. Tout compte fait, ne regrettez-vous pas d'être parti d'Al Ahly ? Non. Je n'ai jamais regretté mes choix. Pour moi, un départ était la meilleure chose qui pouvait m'arriver. Je ne suis pas parti pour l'argent, ni pour le prestige. Je suis allé chercher du temps de jeu. L'ambition était purement sportive. D'autant que les frères Hassan ont beaucoup insisté pour m'avoir. Dans ce cas, je ne regrette rien. Comment expliquez-vous que votre carrière peine à décoller ? Qu'est-ce qui coince ? Je pense qu'on en fait à chaque fois un plat lorsqu'il s'agit de moi. Je pense après coup que la presse a donné de moi une image surdimensionnée. On me présente comme Messi, or il n'en est rien. Je suis un jeune joueur qui aspire faire son trou tranquillement. Je ne peux pas gagner des matches à moi seul. Cette surmédiatisation m'a nuit plus qu'elle m'a apporté. Partir oui, mais pour aller où ? On verra bien. J'ai encore le temps devant moi pour y réfléchir. Pour le moment, je préfère me consacrer à la sélection. Nous avons un objectif à atteindre. Et c'est sur ça que toute mon attention est focalisée. Comment le sélectionneur Azeddine Aït Djoudi perçoit-il votre situation ? Il est très compréhensif. Je lui ai parlé au téléphone. Il m'a rassuré. Je suis content d'intégrer la sélection. J'aime l'ambiance qui y règne. J'y vais avec beaucoup de plaisir comme à chaque fois. Comment avez-vous trouvé l'équipe lors du tournoi de l'UNAF ? Ça va, dans l'ensemble, elle a eu une bonne réaction. Face à l'Arabie Saoudite, ça ne s'est pas très bien terminé. On sait tous que ce n'était pas le vrai niveau de la sélection. La preuve, l'équipe a eu une bonne réaction le match d'après. Je pense que l'EN est en progrès. J'espère qu'on sera encore meilleurs lors des prochaines semaines. Vous connaissez la valeur des autres concurrents tels que l'Egypte, le Maroc et le Sénégal, où situez-vous les chances de l'Algérie de se qualifier aux JO de Londres ? Nos chances sont grandes. Nous avons une bonne équipe. C'est vrai que ce n'est pas encore parfait, mais on part là-bas dans la peau d'un favori. Après, à ce niveau de la compétition, toutes les équipes se valent. Il y aura sans doute des surprises. Le degré de préparation de chaque équipe jouera un rôle prépondérant. A nous d'être prêts le jour J. Le sélectionneur a beaucoup parlé de l'apport des joueurs professionnels après la défaite face à l'Arabie Saoudite (1-3, ndlr), ça ne vous met pas une pression supplémentaire d'être attendu ? Pas du tout. On est là pour servir le pays. C'est quelque chose de sacré. Au contraire, cela nous motive plus. Personnellement, je pars avec un plaisir certain. J'ai même hâte d'y être. Après, je crois que la responsabilité est partagée. Tout joueur capable d'apporter un plus sera le bienvenu.